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L'édito de Sr Véronique Margron
Émission L'édito de Sr Véronique Margron © RCF

L'édito de Sr Véronique Margron - page 2

Emission présentée par Véronique Margron

Sr Véronique Margron est religieuse dominicaine, présidente de la Corref (Conférence des religieux et religieuses de France). Chaque semaine, écoutez son édito dans La Matinale RCF.

> À partir de la rentrée 2022, tous les éditos diffusés sur l'antenne nationale de RCF sont rassemblés sur une même page

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Episodes

  • Émission L'édito de Sr Véronique Margron © RCF

    Joséphine

    5 décembre 2021
    Chers amis «  Pour l’honneur français, honnêtes gens, n’allez pas voir la vicieuse Joséphine Baker, actrice non- française, la plus immorale aux tenues indécentes, aux chansons obscènes, aux danses macabres. » Voilà ce qu’écrivait en 1934 des polémistes dans la presse française, sous le titre évocateur s’il en est : « comment on nettoyera la France ». Alors, ce 30 novembre, que la 6 e femme, la 1re noire à entrer dans le temple de la République, le Panthéon, soit Joséphine Baker, est plus qu’un clin d’œil. C’est une force, un événement qui raconte ce que notre pays, notre république, sait faire de mieux, manifester où est son âme véritable, alors que notre société pourrait être tentée de s’égarer dans des affrontements stériles, des théories plus que dangereuses et une violence symbolique forte qui voudraient tout emporter du vivre ensemble. Née dans la misère au sein d’une Amérique raciste, battue, martyrisée, mariée à 13 ans avant de devenir une star internationale et une héroïne de la Résistance, gaulliste de la première heure, Joséphine aura incarné la force de ceux qui refusent de capituler et choisissent de devenir maîtres de leur destin, malgré tout. Dans une tribune parue en 2013 dans le journal Le Monde, l’écrivain Régis Debray plaidait ainsi pour sa panthéonisation : « Rien ne serait plus dépaysant, moins hypocrite et narcissique, que de hisser cette Américaine naturalisée en 1937, libertaire et gaulliste, croix de guerre et médaille de la Résistance, au cœur de la nation. Elle est à hauteur d'homme. L'époque n'est pas au sacrifice ? Justement. La Gestapo a quitté la place et personne ne nous demande de faire sauter les trains. On peut encore, en revanche, secouer les apartheids en réinventant le quotidien. Joséphine Baker n'a pas l'aspect d'une héroïne. C'est une irrégulière. Ce n'est pas un mythe. C'est un exemple. De quoi ? D'un affranchissement, qui a bousculé les conformismes et dérangé les lignes. C'était très incorrect, avant-guerre, de se produire les seins nus. Et très risqué d’entrer dans les services secrets de la France libre en 1940 et d’engloutir sa fortune pour entretenir une famille arc-en-ciel avec douze enfants adoptifs, de tous horizons. Légèreté peut rimer avec liberté, et la fantaisie donner au courage une sorte de pudeur. Cette sirène des rues pourrait bien nous aider à mettre un peu de turbulence et de soleil dans cette crypte froide. Voir reposer côte à côte la chair et la science, la fantasque et le supplicié, Orphée et Jean Moulin, ne serait pas la pire façon de faire remonter de la vie au sommet de la colline. » Alors oui un immense merci à la République d’accueillir Joséphine Baker en ce lieu hautement symbolique ; pour la rendre à nouveau présente à nos mémoires collectives et personnelles ; pour venir témoigner que chacun peut se hisser au-delà de lui-même, au nom de la passion pour l’universalité humaine et les droits de chacun au respect, à la liberté et à la dignité.
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    Assez de vérité

    28 novembre 2021
    Chers amis, Dans l’avant-propos du rapport de la CIASE, Jean Marc Sauvé écrit ceci : « La commission ne prétend donc nullement détenir LA vérité́ et, moins encore, TOUTE la vérité́ sur les violences sexuelles dans l’Église catholique. Elle ne prétend pas davantage imposer, ni même apporter LES solutions (…)Au terme de ses travaux, elle estime, comme a pu le dire Mgr Desmond Tutu en d’autres lieux et dans un tout autre contexte, qu’elle a réuni « assez de vérité́ » pour s’exprimer et proposer des pistes de travail pour l’avenir. » Notre Église, chacun peut-être, moi-même comme théologienne et spécialiste d’éthique, affirmons bien souvent dire La vérité, ou La défendre. Le 5 octobre dernier, « assez de vérité » – et non toute la vérité, nous est venue par un autre que nous-mêmes, par un tiers compétent, engagé, la CIASE. De la vérité sur le plus sombre, le plus impensable de l’Église : les abus et atteintes sexuelles. J’aime décidément cette phrase de Desmond Tutu, archevêque anglican du Cap et président de la Commission Vérité et Réconciliation, à l’occasion, en 1998, de la remise du rapport à Nelson Mandela, alors tout jeune président de l’Afrique du Sud : « Nous croyons que nous avons fourni assez de vérité concernant notre passé pour qu’il y ait un consensus à son sujet ». « Assez de vérité » va contre l’idée qu’il y aurait une vérité, unique et absolue, la vérité concernant ces tragédies et leur analyse : il y a bien plutôt de la vérité, un bout, des bouts de vérité. « Assez », « pour », un partitif, comme du pain, de l’eau, de la vérité. Une quantité suffisante de vérité pour qu’elle soit utile et qu’elle serve. Qu’elle nous serve, aujourd’hui. Qu’elle soit efficace. Oui, le rapport Sauvé a fait assez de vérité pour enfin déclencher nos décisions fermes et claires. Il a fait assez de vérité pour que le récit des victimes, premières sources d’effroi et de connaissance, soit considéré comme source du vrai. Assez de vérité pour que nous prenions enfin conscience de l’étendue du malheur dans chaque existence et de la trahison de la mission de l’Église autant que de l’Évangile. Alors continuons de nous souhaiter assez de vérité pour avancer résolument. Pour que nos commissions de reconnaissance et de réparation, dont les missions sont communes mettent en œuvre une justice qui restaure l’humanité et la grandeur de chacun. Qu’elles puissent, autant que faire se peut, instaure de neuf dans l’existence de la victime. Assez de vérité pour que nos communautés, notre Église en France, soient dignes de l’Évangile et de celles et ceux qui lui font confiance. Véronique Margron op.
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    Responsables pour l’avenir

    14 novembre 2021
    Responsables pour l’avenir Un enfant pétrifié. Un enfant qui demeure pétrifié au long des années. Voilà le symbole intense déposé à Lourdes, grâce à la photo prise par une personne victime. Portrait de l’enfance martyrisée dans le silence et l’invisibilité de l’Église. Il tient en sa larme les décisions fortes et claires des évêques de France il y a quelques jours. Il convoque aujourd’hui la prochaine assemblée générale des religieuses et religieux qui se tiendra à Lourdes du 15 au 19 novembre, intitulée « responsables pour l’avenir ». En avril dernier, nous avions reconnu « la responsabilité collégiale et spirituelle de l’ensemble de la vie religieuse. » Aujourd’hui il faut la traduire en actes. Le rapport de la CIASE est sans concession car la réalité l’est. Sobre, il laisse voir avec plus de netteté encore l’ampleur du désastre, des vies volées, des stratégies d’évitement, de contournement, parfois de complicité. Il faut se laisser habiter, hanter par les vies brisées et des enfances arrachées – y compris chez les adultes rendus vulnérables. Laisser retentir les mots sans euphémisme, sans détour comme la parole des victimes qui s’est extirpée au dehors, devenant ainsi témoin. « Ça continue toute la vie en fait, c’est comme Tchernobyl, on met ça sous un sarcophage mais cela continue. » (p. 53) Oui, la parole subjective, au plus singulier de l’histoire, fait vérité. Il est indispensable d’entrer dans les arcanes de ce qui a valu les enfers pour tant de victimes, des enfers de désolation. Et que le troisième jour peut mettre la vie à venir. Ou ne jamais poindre. Aider chacun, selon sa place, à prendre la mesure de l’impensable pour ne pas nier, oublier. Regarder en face, avec honte et sans plus de faux-semblants, ce terrifiant envers de l’Église, de la vie religieuse en son sein. Responsables pour l’avenir c’est signifier pour de vrai, en actes plus qu’en paroles, « plus jamais ça »., Passer au crible tout ce qui doit être examiné et qui, jusqu’à hier, a facilité la stratégie des agresseurs : déni, silence, secret mal situé, défense de sa réputation, non-perception des « signaux faibles »… Immense chantier. Passer au tamis, pas sans celles et ceux dont le savoir est dans leur peau et leur âme, dans l’élaboration, souvent si puissante, qu’ils ont faite de la brisure subie et de ses hautes vagues sur leur existence. Responsables pour l’avenir Alors, humblement et pauvrement, devant notre dette insolvable, pourtant réparer, faire justice pour retisser le temps rompu par le mal. Responsables pour l’avenir, c’est à travers les mutations et les conversions profondes auxquelles nous assignent ce désastre, son cortège de morts et le rapport de la CIASE, affirmer qu’il incombe à notre génération de mener dans la foi un labeur de justice et de vérité, afin que nos communautés soient véritablement à profondeur d’humain, du Christ fait chair. Merci de penser à nous. Véronique Margron, op.
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    « Heureux », un engagement de Dieu

    31 octobre 2021
    Chers amis, Je suis partagée. Je voudrais pouvoir vous parler d’autres choses que du rapport de la Ciase, que du fracas des vies des victimes, de leurs proches, parfois aussi des brisures de celles et ceux qui pauvrement prennent leur pas. Mais je n’y arrive pas car leurs visages – connus ou non – peuplent mon existence, ma supplication, mon cœur, ma pensée. Alors je lis et relis l’Évangile de demain, jour de tous les saints. Les béatitudes. Jésus est avec ses plus proches. C’est sa première parole publique. Et ce qui commence renvoie à d’autres commencements, comme à ce serpent de Genèse 3, persiflant que l’homme et la femme peuvent tout avoir et tout savoir, de suite, sans Dieu, sans médiation, tout maîtriser. Tragique actualité des auteurs d’abus et d’atteintes sexuelles que de se croire sans autre loi que la leur. Les béatitudes sont un démenti du serpent. « Heureux ». Formule en apparence si paradoxale, scandaleuse même, car je ne sais consoler ceux qui pleurent et me heurte tant de fois au mur du malheur et du non-sens. « Heureux » pourtant, affirme Jésus. Non comme un constat, mais comme une promesse, un engagement que je veux me redire encore et encore aujourd’hui. Il n’est pas question de faire du malheur un bonheur, du mal un bien. Trop d’hommes prétendent à cette imposture qui fait alors de nouveaux ravages dans des vies déjà brisées.« Heureux » est une direction. Celle qui raconte que je peux tout prendre de la vie, ses pages radieuses, pleines de sens, comme celles douloureuses, inintégrables, auxquelles tant de victimes d’abus et de violences sexuelles se cognent toujours. Je peux prendre mes deuils et mes larmes, mes combats et mes échecs. C’est possible car celui qui est « doux et humble de cœur » prend tout de moi auprès de lui. Il recueille tout. Le Christ, homme des béatitudes, qui ne cherche pas à se sauver lui-même, m’invite à prendre sa suite. Il n’est pas nécessaire que je masque quoi que ce soit de moi. Je peux tout lui confier. « Heureux », alors ceux qui croient que notre Dieu de la vie et de la liberté invite chacun avec tout ce qu’il porte, sans faire de tri et à s’y réfugier. « Heureux » sont-ils de ne pas tomber dans le mirage destructeur de la seule maîtrise, de la toute- puissance mais qui croient que leur manque les ouvre à autrui, à ne pas se refermer, se suffire. Alors oui « soyons dans la joie », non que la vie devienne facile, ce n’est nullement le cas, bien au contraire pour tant et tant. Mais parce que cette joie grave, douloureuse même, de pouvoir prendre en compte tous les côtés de la vie, personne ne pourra nous la ravir (Jean 16, 22). Ne pas se résigner au mal, opter pour l’existence. Une joie des profondeurs offerte à qui peut recueillir que le Christ habite avec lui les expériences cruciales de nos vies, l’abîme, l’excès de mal, le don. Véronique Margron op.
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    Prière de ne pas abuser

    17 octobre 2021
    Chers amis, Jean Marc Sauvé, président de la commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église, a remis son rapport il y a un peu plus de dix jours. Une déflagration. Ce n’est pas le rapport qui est dur. Mais la réalité qu’il dévoile et analyse qui est accablante et laisse en miettes au plus profond de son âme. Je vous invite à lire ce rapport, à en parler autour de vous, entre vous. A lire avant tout le recueil de témoignages, durs, bouleversants, dans le volume magnifique « de victimes à témoins. »A vous saisir des recommandations ; dans votre paroisse, votre diocèse, votre mouvement… C’est indispensable. Ce matin, permettez-moi de m’effacer pour laisser la parole à Patrick Goujon. Prêtre, jésuite, agressé sexuellement par un prêtre alors qu’il avait entre 8 et 11 ans. N’ayant pu alors trouver une écoute de sa parole à bas bruit, le silence s’est refermé sur lui durant près de 40 ans, « déni traumatique ». Patrick Goujon écrit un bouleversant livre rare, Prière de ne pas abuser. 90 petites pages bouleversantes, dont chaque mot compte, pudique et direct. « Ce qui m’a poussé à écrire pour d’autres, dit Patrick Goujon, fut la conviction qu’on avait quand même peu idée, dans la société et en particulier dans l’Église, non pas tant de la gravité de ce qui arrive à un enfant quand il subit des abus sexuels, mais de la gravité de ce qui arrive à un adulte quand il a subi enfant des agressions sexuelles. » Voici quelques lignes : «  J’ai retrouvé la parole alors que j’ignorais en avoir été privé. Enfant j’ai été abusé par un prêtre pendant plusieurs années. Il m’a été donné un jour de me le dire à moi-même, puis de parler. Je n’avais pas imaginé que cela aurait été si bienfaisant. Il m’aurait fallu croire que la honte n’était pas qu’un fantôme, qu’elle n’était rien en comparaison de la paix en se libérant des entraves. Je ne savais pas que je m’étais tu. Je ne me souviens pas m’être décidé à me taire. La parole n’est pas venue. Déni. J’avais confondu ces deux syllabes avec celles de l’oubli. Le déni n’oublie pas. Il conserve. La souffrance ne disparait pas ; elle n’a pas où aller. Elle se tapit ; elle se terre. Le déni travaille ; il fait grincer le corps entier. Le déni drape le monstre en un revenant méconnaissable. Il voile ce qui sans lui ferait horreur. La victime ne pourra en soupçonner l’origine : elle a été dissimulée afin que l’enfant puisse grandir. Séquelles : « suites, complications plus ou moins tardives et durables d’une maladie, d’un accident. » Ceux qui ne comprennent pas pourquoi les victimes se déclarent si longtemps après leurs « prétendues » agressions entendront-ils la voix blanche du lexique ? Comme ces pierres qui remontent des champs, ou, comme à Verdun, ces obus qui reviennent à la surface et menacent d’exploser au visage de qui les manipulent sans précaution. Prendre la parole m’a retiré d’un champ de mines. » Patrick C. Goujon, Prière de ne pas abuser, Seuil.
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    Se recueillir pour recevoir le rapport de la CIASE

    3 octobre 2021
    Il est des jours où l’on voudrait juste se taire, faire un édito silencieux. Se recueillir tout au fond de son âme pour espérer pouvoir accueillir ce qui va venir de douloureux. C’est là où je suis à deux jours de la remise du rapport de la Commission indépendance sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE), mise en place fin 2018 par la conférence des évêques et celle de la CORREF. Notre dette, à tous dans l’Église catholique, sera immense envers M. Jean Marc Sauvé et l’ensemble des membres de la CIASE d’avoir mené à terme un tel travail aussi inédit qu’éprouvant. Il est bien difficile d’être porteur de témoignages de vies empêchées comme d’explicitations des défaillances, des aveuglements et des complicités actives ou passives qui ont rendu possibles que ces crimes se perpétuent sur les corps et dans les âmes de personnes vulnérables, mineures ou majeures. Dans un entretien avec Cécile Chambraud du Monde, Jean Marc Sauvé dévoile avoir eu « le sentiment d’être attirée vers le bas-fond de l’humanité ». Personne de nous ne peut être préparé à un tel choc. Désormais il reviendra à l’Église, à l’ensemble de ses responsables en 1 er lieu, de prendre ce fardeau et de s’exposer du creux de la chair comme de la foi à ces « bas-fonds ». Affronter avec pauvreté ces non-lieux d’humanité où les victimes virent leurs vies se briser me partait la seule manière d’espérer, aujourd’hui, décider ce qui est juste. J’ai bien conscience que cette impensable réalité va nous ébranler profondément. Qu’en ces heures il n’est pas facile d’espérer. Et d’espérer dans et avec notre Église. Parmi vous chers auditeurs, il y a des femmes et des hommes qui ont subi en leur âme et leur chair ces crimes, dont les enfances furent emmurées, car c’est toujours l’enfance qui est touchée, y compris quand l’agression a lieu à l’âge adulte. Alors juste être là, pour vous. D’autres parmi vous se diront que c’est trop. Que pour continuer à croire, à faire communauté, il faut se détourner de ses abominations. Comment ne pas comprendre ? Mais il faudra lutter contre cette légitime tentation. Le seul chemin, en mouvements, en paroisses, en communautés, est d’en parler ensemble. Pour ne pas nier ni désespérer. Pour faire face, soutenir les plus vulnérables, et construire. « En ces bas-fonds, une création peut commencer et l'on devient proche les uns des autres » 1 . Il nous faut passer par ce creuset, puiser au plus profond la force du Dieu fait chair pour avancer dans la vie évangélique. Peut-être avez-vous lu ce petit livre du Christian Bobin, Le Très bas, à propos du Dieu de François d’Assise. C’est là où nous sommes. Le très bas. Véronique Margron op
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    Le combat pour la vie

    26 septembre 2021
    Il y a tout juste une semaine, nous célébrions dans notre pays les 40 ans de l’abolition de la peine de mort, sans aucune restriction ni réserve ». Alors même que l’opinion était majoritairement hostile, Fr. Mitterand mis cette résolution dans son programme et ce sera une des premières lois votées. « Dans la réalité judiciaire, qu’est-ce que la peine de mort? » Déclara Robert Badinter ce 17 septembre 1981. « Ce sont douze hommes et femmes, deux jours d’audience, l’impossibilité d’aller jusqu’au fond des choses et le droit, ou le devoir, terrible, de trancher, en quelques quarts d’heure, parfois quelques minutes, le problème si difficile de la culpabilité, et, au-delà, de décider de la vie ou de la mort d’un autre être. Douze personnes, dans une démocratie, qui ont le droit de dire: celui-là doit vivre, celui-là doit mourir! Je le dis: cette conception de la justice ne peut être celle des pays de liberté, précisément pour ce qu’elle comporte de signification totalitaire. » M. Badinter avait alors mis toute sa conviction d’âme pour dénoncer une "justice qui tue" et les "exécutions furtives, à l'aube sous le dais noir" tendu dans une cour de prison.  Il faut lire ou relire cette ultime phrase de sa plaidoirie, celle qui sauva la tête de Patrick Henry, Le 20 janvier 1977 : «  un jour prochainement on abolira la peine de mort en France comme c’est déjà le cas dans toute l’Europe occidentale. Et vous, vous resterez avec votre condamnation. Et un jour vous direz à vos enfants où ils l’apprendront…que vous avez condamné à mort un garçon de 23 ans et vous verrez leurs regards … » Ne rien minimiser, excuser, nier. Regarder en face le crime, et se battre pour la vie. Car nul ne possède l’avenir. Pas de rhétorique, mais placer chacun devant sa responsabilité personnelle, d’hommes, de femmes. Comment ne pas entendre en écho ces vers immémoriaux de Victor Hugo dans Les Quatre Vents de l’esprit ( 1881) «  Que la pierre bâtisse et non lapide ! Pas de sang ! pas de mort ! C’est un reflux stupide Que la férocité sur la férocité Un pilier d’échafaud soutient mal la cité. Tu veux faire mourir ! moi je veux faire naitre ! » Le combat de Robert Badinter, toute sa vie durant, n’est pas un combat contre la mort. Mais pour la vie. La vie dont il connut le prix terrible, quand son père, Simon Badinter, tombe dans une souricière dirigé par Klaus Barbie, à Lyon en février 1943. Il ne reviendra jamais, déporté au camp d’extermination de Sobibor en Pologne. Robert décida alors de vivre intensément. Alors oui son vrai combat, celui qui honore l’humanité toute entière, est pour la vie, pour qu’in fine, ce soit elle qui gagne, envers et contre tout, envers et contre tous. Oui la mort n’est jamais une victoire. Merci Monsieur Badinter.
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    Jouer dans les bidonvilles.

    19 septembre 2021
    Savez-vous que le jeu d’échecs existe depuis 1000 ans ! Son origine se trouverait en Inde. Il est sans doute le plus célèbre au monde, ayant conquis d’innombrables cultures. Mais son introduction en Afrique restait assez confidentielle. Pourtant la situation change. Un film de Disney y a contribué : Queen of Katwe, (La Dame de Katwe) en 2016. Il raconte l’histoire authentique de Phiona Mutesi, jeune Ougandaise, pauvre, découvrant par hasard les échecs. Sa passion pour le jeu l’amena à marcher des kilomètres par jour, juste pour pouvoir pratiquer les échecs. Avec deux autres jeunes ougandais, elle gagna au Soudan un tournoi international pour enfants. Une histoire qui a donc largement aidé à la diffusion des échecs à travers l’Afrique, montrant aux enfants et aux parents que jouer à ce jeu pouvait offrir un avenir à certains, et surtout développer pour tous des capacités de concentration, de stratégie, de créativité, d’adaptation. Un jeu aussi où il est quasiment impossible de tricher. Aujourd’hui, au-dessus de Lagos, au Nigeria, dans l’immense bidonville sur pilotis d’Ikorodu, de plus de 250 000 personnes, les enfants reçoivent la visite de Tunde Onakoya. Ancien champion, lui aussi originaire d'un bidonville, il est le fondateur de l'ONG « Chess in Slums »(« Les Échecs dans les Bidonvilles »). Avec d’autres bénévoles, il vient apprendre à jouer aux échecs à ces enfants, dont la grande majorité n’est pas scolarisé afin d’aider leur famille. Les plus jeunes ont tout juste 3 ans. Et les voilà tous concentrés, tout occupés à leur tournoi. "Je me suis dit que si j'arrivais à apprendre les échecs aux enfants des bidonvilles, la façon dont ils sont perçus par tout le monde changerait. Au lieu de les voir juste comme des enfants pauvres, on verrait qu'ils ont de grandes capacités intellectuelles", explique Tunde Onakoya. Il ajoute, lui qui a aussi appris les échecs à l’école primaire, « croire en ce jeu, parce qu’il améliore les facultés intellectuelles et la concentration ; c’est comme de la nourriture pour le cerveau. Au départ, le but était d’apprendre aux enfants un jeu qui change leur vision du monde et leur donne confiance en eux, mais c’est devenu bien plus que cela. C’est une porte d’accès à d’autres opportunités. » D’ailleurs un architecte nigérian très connu a offert de devenir le mentor d’un garçon de 11 ans qu’il avait vu construire des maquettes en carton ! « Ce qui fait de vous des champions, c’est la manière dont vous réagissez. Ne déprimez pas quand vous perdez, ne vous découragez pas, concentrez-vous et faites de votre mieux », explique encore le professeur, qui n’a que 24 ans – à ses petits élèves. « Je veux être un grand maître », dit en riant un enfant. Magnifique !
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    Voyage dans l’Est

    12 septembre 2021
    Véronique Margron revient sur la sortie du livre de Christine Angot Voyage dans l’Est chez Flammarion...
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    New-Yorkais

    5 septembre 2021
    New-Yorkais, c'est le titre de l'Edito de Soeur Véronique Margron...
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    Assumer la coresponsabilité

    20 juin 2021
    « Que dois-je faire face à cette catastrophe ? » Telle est la question posée par le pape François dans sa réponse du 10 juin au cardinal Marx qui lui avait proposé sa démission...
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    The´rapies de conversion

    13 juin 2021
    La Reine Élizabeth II, 95 ans, a annoncé l’interdiction des « thérapies de conversion » dans son discours pour l’ouverture de la session du parlement britannique...
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    Crimes sexuels et Livre VI

    6 juin 2021
    Avez-vous entendu cette information? La Réforme du Livre VI du droit interne de l’Église catholique a été rendue publique ce 1er juin, au terme d’un chantier lancé en 2007 par Benoît XVI
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    Foi et contingences

    30 mai 2021
    Peut-être avez-vous lu ce très beau papier d’Elodie Maurot concernant le grand sociologue allemand Hans Joas qui s’intéresse au phénomène religieux...
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    Mémoire noire

    16 mai 2021
    Véronique Margron se souvient de sa visite à Gorée, petite île au large de Dakar devenue le symbole mondial de la traite négrière...
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    La République laïque

    9 mai 2021
    Comment faire un avec du multiple, comment tenir la pluralité des convictions et des croyances et l’unité d’une nation ?... Véronique Margron s'interroge
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    La voix des pauvres

    2 mai 2021
    Existe-t-il un point commun entre les pauvres et les chasseurs, demande Guillaume Leblanc, philosophe, dans un article du quotidien Libération. Quelle étrange question ! et pourtant...
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    Hommage

    25 avril 2021
    Plus de 100.000 victimes du Covid 19 en France. Ce chiffre renvoie à une réalité informe qui nuit à imaginer ce que chaque défunt a pu endurer, ce que chaque famille souffre aujourd’hui...
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    Digne

    18 avril 2021
    Dans si c’est un homme Primo Levi raconte sa relation de détenu de camp avec Lorenzo, ce civil italien qui travaille avec les prisonniers et qui lui apporte tous les jours une gamelle de soupe, simplement parce qu’il est un homme...
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    Le bien combattant

    11 avril 2021
    Faut-il encore le rappeler ? Le génocide commis au Rwanda, en 1994, par une population civile hutue alors frappée de démence a fait « plus de 800 000 Tutsis tués en moins de cent jours dans le pays. »

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