Accueil
Une DB qui s'est illustrée aux 24 Heures de retour en France après 60 ans
Partager

Une DB qui s'est illustrée aux 24 Heures de retour en France après 60 ans

Un article rédigé par Maximilien Cadiou - RCF Sarthe,  -  Modifié le 11 juin 2020
Aux 24 Heures du Mans 1960 et 1961, cette DB HBR4 remportait la course à l'indice de performance, classement tout aussi important que la victoire générale. Après sa seconde victoire, la voiture était rachetée par des Américains. Pendant 60 ans, elle resta outre-Atlantique avant que la famille d'un de ses pilotes, Gérard Laureau, n'en fasse l'acquisition et en prenne possession.
Maximilien Cadiou - Gérard Laureau a piloté cette voiture aux 24 Heures, sa famille la récupère 60 ans plus tard Maximilien Cadiou - Gérard Laureau a piloté cette voiture aux 24 Heures, sa famille la récupère 60 ans plus tard

Après avoir remporté les 24 Heures du Mans à l’indice de performance en 1960 et 1961, la DB HBR 4 fut rachetée par des Américains et partie vers les États-Unis. Outre-Atlantique, l’attend une nouvelle carrière sportive puis de voiture historique de collection avant de revenir en France. Dans l’hexagone, ce sont les descendants d’un de ses pilotes, Gérard Laureau, qui en a fait l’acquisition.
 

DB, la voiture sportive française d’après-guerre

L’aventure DB, c’est l’histoire de la rencontre entre deux personnages centraux dans l’histoire du sport automobile français. Charles Deutsch (pour le D) et René Bonnet (pour le B) s’associent avant la Seconde Guerre mondiale pour donner naissance à la première DB : la DB1. Elle était propulsée par un moteur Citroën et participait au Bol d’Or automobile de 1939 sur le circuit de Linas-Montlhéry, en région parisienne.

Stoppées pour cause de conflit mondial, les DB refaisaient surface en 1949 aux 24 Heures du Mans. Cette voiture, exposée au Musée des 24 Heures du Mans, était engagée pour la renaissance, et reprenait cette association non officielle entre DB et Citroën. Face à un refus d’André Citroën de l’utilisation de ses moteurs, DB se tourne alors vers Panhard.


DB Tank - 24 Heures du Mans 1949
 

Les DB aux 24 Heures du Mans

On ne compte pas moins de 51 DB engagées aux 24 Heures du Mans. En compétition entre 1949 et 1961, ces voitures se sont illustrées à 8 reprises en 13 participations dans la classique mancelle. Parmi les pilotes engagés, on trouvait des noms qui revenaient souvent, à l’image de Pierre et Robert Chancel, Louis Cornet, mais aussi Paul Armagnac et Gérard Laureau, les deux pilotes principaux de la marque.

Aux 24 Heures du Mans, Gérard Laureau compte 10 participations et fut toujours fidèle à René Bonnet. Pilote DB entre 1955 et 1961, il passe sur les René-Bonnet entre 1962 et 1964. Gérard Laureau compte cinq abandons, dont un seul sur accident et cinq autre courses qui se soldèrent par un résultat classé. Une victoire dans la catégorie des voitures de moins de 750 cm3 (1956) et deux victoires à l’indice de performance (1960 et 1961) sur cette fameuse DB HBR 4.

Cet indice de performance suscitait l’intérêt des marques françaises pour mieux répondre aux attentes des automobiles français. En effet, dans les années 1950, le gouvernement français, pour tenter de redresser l’industrie automobile française, sectorisait la production automobile et taxait les moteurs les plus importants en terme de cylindrée moteur. Ces grosses cylindrées n’intéressaient pas les acheteurs. Il fallait que les marques se distinguent avec de petites cylindrées ; quoi de mieux que les 24 Heures du Mans pour le démontrer ? Le classement à l’indice de performance allait dans ce sens pour les marques françaises.
 

L’indice de performance, terrain de jeu des DB aux 24 Heures du Mans

Durant les années 1950, ces petites voitures sont les vedettes de la course à l’indice de performance. Ce classement parallèle équilibrait les performances très hétéroclites des voitures engagées. Ce classement combinait le poids, la vitesse et la cylindrée de la voiture pour établir une distance minimale à parcourir. Comparée à la distance réellement effectuée, le résultat de ce rapport donnait un coefficient supérieur à 1. La voiture ayant le coefficient le plus élevé remportait ce classement à l’indice de performance. Entre 1950 et 1961, ces voitures françaises et particulièrement les DB remportèrent de nombreuses fois ce classement à l’indice de performance jusqu’à la disparition de la marque en 1962.
Après DB, des CD et René Bonnet avant d’arriver à Matra.

Malgré la victoire de DB en 1961 avec le modèle HBR 4 tout juste revenue en France, Charles Deutsch et René Bonnet se séparaient pour donner naissance à leurs marques respectives. Les CD, pour Charles Deutsch, s’illustraient en 1962 à l’indice de performance quand une René-Bonnet remportait l’indice énergétique en 1963.
Le destin voulait que la santé financière de René-Bonnet n’était pas au beau fixe. Racheté par l’entreprise d’aviation Matra, cela donnait naissance aux Matra. Voitures de course bien connues des passionnés, elles se remarquaient par la mélodie d’un mythique V12, reconnaissable entre 1 000, s’imposant trois fois aux 24 Heures du Mans avec un certain Henri Pescarolo derrière le volant.


Matra 670B, vainqueur des 24 Heures du Mans 1973 aux
24 Heures du Mans 2012, pilotée par Henri Pescarolo

 

DB HBR 4, le retour d’une voiture partie depuis 60 ans

Comme tout ce qui touche aux 24 Heures du Mans, la marque DB a ses adeptes. Avec un livre, La saga DB (1932-1962), Alain Gaillard se positionnait comme l’un des spécialistes de la marque française. C’est cet ouvrage qui servit de base à la famille Laureau pour retrouver la trace de la voiture pilotée par Gérard Laureau. On y retrouve notamment les exploits sur circuit de ces voitures.
 

La DB HBR 4, un morceau du patrimoine automobile français aux États-Unis

Cette voiture est remarquable à plusieurs titres, ses victoires l’ont démontré, seules trois voitures semblables ont été construites Elle occupe de ce fait une place importante dans l’histoire de DB en course automobile. Ce châssis, le 1091, fut engagé trois fois aux 24 Heures du Mans entre 1959 et 1961, et remporta deux fois l’indice de performance avant de partir pour les États-Unis, sans plus jamais ne revenir en France... avant 2020.

 
La DB HBR 4 (#1091) en 1960 avec le n°48 et en 1961 avec le n°53, victorieuse à l'indice de performance aux 24 Heures

Après son départ de France, cette DB HBR 4 arrivait aux États-Unis et poursuivait sa carrière sportive. Des compétitions outre-Atlantique qui voyaient s’appliquer un règlement technique proche de celui que l’on connaissait en Europe. Ce châssis participait aux 12 Heures de Sebring en 1962 avant de ralentir progressivement le rythme.
 

Une voiture retrouvée par une annonce sur internet

Durant son séjour américain, cette DB connût trois propriétaires. Un premier, qui fit des courses avec cette voiture, l’avait acheté fin 1961 pour la conserver jusqu’en 1972, date à laquelle elle sera vendue une première fois. Ce second propriétaire la conserva jusqu’à la fin des années 1990 et la vendait à son tour à un passionné de ces petites voitures française. Il entreprenait la restauration de cette voiture avec les pièces mécaniques d’origine, remises à neuf, et de concourir dans quelques épreuves historiques.

C’est en 2014 que les négociations entre la famille Laureau et ce dernier propriétaire américain de la voiture débutent. Six ans pour parvenir à faire revenir cette voiture sur le sol de ses exploits, mais aussi dans la famille d’un de ses anciens pilotes, la famille Laureau. C’est presque par hasard que les descendants du pilote eurent connaissance de cette vente, puisqu’elle fut mise sur internet.
 

Une odyssée vers la France

Une fois la voiture acquise, il fallut la ramener dans l’Hexagone. Une mission rendue possible grâce à l’implication de Michel Germaine, Français d’origine, Américain de cœur, où il vit la moitié de l’année. La voiture devait transiter depuis le nord des États-Unis, en hiver et sous la neige, jusqu’à San Francisco, où le précieux chargement embarquait sur un bateau cargo. Mais c’est à ce moment que s’est déclaré l’épidémie de COVID-19, et si le trajet n’a pas semblé posé de problèmes, le débarquement au port du Havre était impossible. Finalement parvenu jusqu’en Sarthe, aux entrepôts Robineau Transport à Soulitré, cette voiture posait ses roues en terre sarthoise dans le courant du mois de mars. Impossible à remettre à la famille, ce n’est qu’en juin, alors qu’auraient dû avoir lieu les 24 Heures du Mans, qu’un public de passionnés pouvait assister à cette présentation.

Le 6 juin 2020, date symbolique pour le lien entre Américains et Français, cette voiture était présentée dans un état comme neuf. Ses propriétaires successifs ont pris grand soin de la mécanique, jusqu’à restaurer la voiture avec ses pièces d’origine. Seul un arceau et un harnais de sécurité, qui n’étaient pas obligatoire à l’époque, diffèrent de la version originale.
Il faudra s’y habituer, la sécurité prime désormais, surtout quand il s’agira de faire revivre cette voiture.


La DB HBR 4 #1091 aujourd'hui

Antoine Laureau, sur les traces de son grand-père Gérard Laureau, emmènera le bolide sur le circuit des 24 Heures pour la prochaine édition du Mans Classic en 2021, 60 ans après la dernière participation de cette voiture dans la Sarthe, tout un symbole.


La relève est assurées avec la famille Laureau au complet.
Jean-Louis Laureau à droite, Antoine Laureau, petit-fils à gauche et
les arrières-petits-enfants de Gérard Laureau.

 

Cet article vous a plu ?
partager le lien ...

RCF vit grâce à vos dons

RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation  de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !

  • Ce don ne me coûte que 0.00 € après déduction fiscale

  • 80

    Ce don ne me coûte que 27.20 € après déduction fiscale

  • 100

    Ce don ne me coûte que 34.00 € après déduction fiscale

Faire un don