C'est une nouvelle génération de talibans qui est désormais au pouvoir en Afghanistan. Si leur discours se veut rassurant auprès des populations et de la communauté internationale, la répression est déjà en route et c'est bien la même idéologie qu'il y a 20 ans. Explications de Pascal Boniface, géopolitologue, fondateur et directeur de l'IRIS.
10 jours après le départ des forces américaines, le régime afghan est tombé, ce dimanche 15 août, tel un château de carte. Un effondrement qui était prévisible, selon Pascal Boniface, interrogé par Fabien Farge-Champion : "On savait que sans le soutien américain, l’armée afghane serait incapable de défendre le territoire faute de motivation, faute d’organisation et faute de loyauté à l’égard du régime."
Si "l'issue était inéluctable, le délai a été surprenant". Pourquoi une telle rapidité ? Pour Pascal Boniface, "à partir du moment où les militaires afghans n’avaient plus confiance dans leur régime et pensaient que la victoire des talibans était inéluctable, il y a eu un flux de désertion et un flux de gens qui ont rallié les talibans". Désertions et changements de camps ont été "extrêmement rapides". Devant la victoire jugée certaine des talibans, "personne n’a voulu prendre le risque de s’y opposer".
Les talibans se veulent rassurants auprès de la population. Ils viennent d’annoncer une amnistie générale pour tous les fonctionnaires d’Etat. Si une partie de la population est soulagée de la fin de la guerre, "tous ceux qui sont éduqués, tous ceux qui sont épris de liberté - surtout les femmes - sont terrorisés".
Si cette nouvelle génération de talibans au pouvoir adopte une autre façon de communiquer "l’idéologie est restée la même". Et la réalité est "nettement moins" rassurante que les discours, d’après ce que l’on a pu constater dans les villes déjà reprises où "la répression est déjà en route". Les talibans ont ainsi annoncé que les femmes pourraient recevoir une éducation, en réalité cela ne sera possible que jusqu’à 12 ans seulement.
Rappelons-le, ce n’est pas la nature oppressive du régime taliban qui avait suscité l’hostilité des Occidentaux mais bien le fait que les talibans ont accordé l’asile à Al-Qaïda, qui a organisé l’attentat du 11 septembre 2001. Cette fois, "ils ont en quelque sorte appris de leurs erreurs, ils ont compris que c’était leur opposition radicale au reste du monde et le soutien au terrorisme qui avait causé leur perte".
Les talibans adoptent donc un discours rassurant vis-à-vis de la communauté internationale. "Ce sont des talibans qui veulent apparaître comme étant policés, comme étant adaptables, comme pouvant finalement satisfaire les nations environnantes." Les relations qu’ils établissent avec la Russie, le Pakistan, l’Inde ou la Chine montrent qu’ils "essaient de se faire accepter par la communauté internationale". Communauté internationale qui "ne peut pas faire grand chose", hormis espérer que le pays ne devienne pas un sanctuaire du terrorisme... "Daech est présent sur le territoire afghan."
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