C’est une image qui a fait le tour de la planète. Car il faut dire qu’il y a TOUT. Au premier plan, une petite fille avec un masque à gaz sur le nez. Posé sur son épaule, lové dans son bras droit, un koala endormi. Les deux sont immobiles dans l’eau. Une eau limpide, bleue, immense, calme. Mais derrière, s’élèvent des flammes impressionnantes, hautes de plusieurs mètres. Et de la fumée rouge et noire obscurcit complètement le ciel. C’est une image, vous le comprenez, pleine de symboles et c’est pour cela qu’elle circule beaucoup.
Des symboles tels que Le koala, d’abord. C’est l’animal qui dit immédiatement l’Australie. C’est une espèce endémique, on ne la trouve que sur cette île. Et son museau noir, ses oreilles poilues, son pelage qui a l’air si doux, son air débonnaire : c’est un animal fragile qui attire immédiatement l’affection. L’autre symbole, c’est la petite fille. C’est une enfant, et c’est une fille. Deux symboles d’innocence. Les photographes le savent bien. Ils cherchent toujours du regard ces êtres qui permettent de souligner mieux que quiconque l’absurdité et la cruauté de nos choix d’adultes.
On peut penser à d'autres photos célèbres comme la petite fille brulée au Napalm pendant la guerre du Vietnam, la petite fille noyée dans la boue en Colombie ... L’émotion est ainsi très puissante. Car elle est seule, la petite fille sur la photo. Aucun adulte pour prendre soin d’elle, pour l’accompagner, pour l’aider. Elle est plantée là et elle nous regarde. Il y a une accusation dans ses yeux : mais qu’avez-vous fait ? Dans quel monde me laissez-vous grandir ? Et puis il y a deux autres symboles : l’eau et le feu. Deux éléments qui nous constituent, qu’a priori tout oppose. Mais qui là, se partagent l’image. La mer en bas, la flamme destructrice en haut. Le calme et la tempête. L’eau source de vie, et le feu qui apporte la mort. Le feu, c’est aussi très photogénique. Malheureusement. Les flammes, cela nous fascine. Rien qu’un feu de cheminée, ça capte notre attention. Alors ces flammes gigantesques...
Vous dites « image », Stéphanie. Et vous faites bien. Car c’est un photomontage. La photographe australienne Thuie, l’a posté sur son compte Instagram où elle ne poste que des images de ses filles dans des décors bidouillés, modifiés numériquement. On peut voir une de ses filles en train de marcher en haut des montages, pied nu, en petite robe légère, des chandelles magiques dans les mains. Y’a une autre image, où sa fille chevauche un ours au milieu de dunes de sables, en plein désert… Oui, pas de doute, c’est une artiste, qui n’a pas de volonté de tromper.
Thuie annonce d’ailleurs clairement sur son compte Instagram que son image est un montage. Mais on sait comment ça marche : l’image a séduit un internaute, puis un autre. La légende s’est perdue en route. Et la viralité des réseaux sociaux a fait le reste. Il y a dans les journaux des photos réelles et poignantes avec des animaux, je pense notamment à un terrible kangourou carbonisé. Mais sans les flammes, sans l’enfant. Il y a des photos dingues de flammes, de ciels aux couleurs improbables, mais sans les animaux. Il y a des images d’enfants tristes, mais avec des adultes à leurs côtés, effondrés eux-aussi d’avoir tout perdu. Cette image là rassemble tous les clichés dans un seul cadre. Elle nous rappelle juste la force des symboles.
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