Monseigneur Patrick Chauvet, curé de la paroisse de la Madeleine à Paris, et ancien recteur-archiprêtre de la Cathédrale Notre-Dame de Paris, publie Bernanos sans concessions, aux éditions Fayard. Largement connu pour Journal d'un curé de campagne, on peut aussi citer d'autres œuvres de l'écrivain Georges Bernanos comme La Liberté pour quoi faire ? et La France contre les robots.
Pour Monseigneur Chauvet, “Bernanos est un homme qui avait du caractère, entier, peu enclin au relativisme et qui n'a jamais voulu être enfermé”. Sa plume a marqué la génération de la première moitié du XXᵉ siècle. Pourtant, “Bernanos ne demeure pas un homme du passé”.
Confronté à notre époque, il estime que l'écrivain n’aurait pas plongé dans la nostalgie de son temps, mais aurait “donné quelques éléments de réponse pour essayer d'avancer”. Dans son ouvrage La liberté pour quoi faire, Bernanos s'exprime sur sa génération, "avec une pensée d'une étonnante modernité”.
Selon Mgr Chauvet, Bernanos interroge notre liberté intérieure : “Quand il parle de la liberté, c'est vraiment l'orientation de ce pour quoi l’Homme a été créé. Et en nous interrogeant sur l'orientation de l'Homme : As-tu été créé pour cette haine ambiante ou pour la paix ? Il va montrer que nous sommes en train de perdre notre liberté.”
Pour lui, l'Homme de 2024 n'est pas plus libre que ne l'était celui du début du XXᵉ siècle.
Au niveau de la liberté intérieure, je pense que nous sommes beaucoup plus emprisonnés par le monde de la consommation
Bernanos écrit dans La France contre les robots que l'Homme doit rester totalement libre par rapport à la technologie. "Bernanos n'est pas contre la technologie, mais il montre que le monde des machines nous robotise” explique Mgr Chauvet. Pour lui, le numérique est un mal, il le juge utile, mais déplore qu’on ne puisse plus se passer de nos téléphones portables.
Je n'ai rien contre le numérique, au contraire, on en a bien besoin. Mais on est tous esclaves de notre portable.
Pour lui, “Bernanos est un prophète pour notre temps”. Il a souvent critiqué la modernité et la société de son temps. Aujourd'hui, relire son œuvre permet de comprendre l'enjeu de liberté intérieure vis-à-vis des progrès comme l'intelligence artificielle. Pour Mgr Chauvet, l’IA peut être bénéfique : “Ça va nous aider au niveau de la science et de la médecine”. Pour autant, il estime que “penser, c'est prendre un crayon, un papier et essayer d'écrire”, or “si nous ne pensons plus, toutes les énergies du mal peuvent revenir.”
Georges Bernanos met fréquemment en avant la figure du prêtre, pourtant, “il y a des pages très dures sur l'Église” constate Mgr Chauvet. “Sur ces curés médiocres qui resteront médiocres et sur ces monsignors au Vatican qui se prennent pour des diplomates". Cependant, pour le curé de la Madeleine, Bernanos est resté fidèle à l’Église : “Il se tenait d’être toujours en communion”.
Alors que certains catholiques expriment des désaccords avec le pape François, Mgr Chauvet propose de suivre l'exemple de fidélité envers le pape de l’écrivain.
On n’est pas obligé de partager toutes les idées du pape, mais il faut essayer de le comprendre. Et se rappeler qu’il est inspiré par l’Esprit Saint.
Aujourd'hui, beaucoup de Français lisent les romans de Georges Bernanos. "La plus grande tentation est celle du désespoir" écrit Bernanos. Les écrits du penseur chrétiens sont porteurs d'espérance, estime Mgr Chauvet.
Pour le curé de la Madeleine, il y a un manque de chrétiens penseurs. Alors que la mission de l’Homme serait de “transformer ce monde en royaume d’amour”, il estime que la littérature et l’art ont un rôle à jouer très important, "pour redonner le goût, la saveur et la lumière”.
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