Il y a 12 ans, jour pour jour, son fils militaire, Imad était tué à l’âge de 30 ans, assassiné à bout portant par le terroriste Mohammed Merah. Présidente de l'association IMAD pour la Jeunesse et la Paix, Latifa Ibn Ziaten est engagée pour la promotion de la paix auprès des jeunes.
Le 19 mars 2012, Imad était la première victime de Mohammed Merah, ce terroriste qui a tué ensuite six autres personnes, dont trois enfants. Presque douze ans plus tard, sa mère Latifa Ibn Ziaten poursuit son combat. Un combat qui résonne d'autant plus en ce 11 mars, journée nationale d'hommage aux victimes du terrorisme.
"Le mois de mars est toujours dur. Je ressens la douleur, la séparation avec mon fils, la souffrance. C’est quelque chose qu’on ne peut pas oublier. On ne peut pas tourner la page", témoigne Latifa Ibn Ziaten, mère d'Imad. Fraîchement arrivée dans l’Hexagone, cette maman marocaine et musulmane ne parlait pas français au moment de la mort de son fils. Après la douloureuse nouvelle de la mort de son fils, elle cherche à comprendre et entame une démarche pour retrouver les traces de l'assassin et tenter de guérir.
Elle se rend alors à Toulouse dans le quartier de Mohammed Merah où le malheur a frappé. "J’avais besoin d’aller voir où habitait cet assassin, où il a grandi, qui il est et pourquoi il a tué mon fils. Il m’avait laissé un souvenir : les tâches de son sang sur le sol", raconte-elle.
Ils sont l'origine de ma souffrance.
Ce jour-là, elle rencontre six ou sept jeunes "livrés à eux-mêmes et le visage marqué par la souffrance", se souvient-elle. S'en suit alors un échange choquant pour cette mère endeuillée : "Je leur ai demandé où habitait Mohamed Merah. L'un d'eux s'est mis à sourire et m'a dit : "Madame, vous ne regardez pas la télé ? Vous ne lisez pas les journaux ? Mohamed Merah c’est un martyr, un héros de l’Islam. Il a mis la France à genoux"", relate-t-elle.
Par la suite, ce jeune homme l'aurait interpellé sur leurs conditions de vie dans ce quartier. "Vous savez, quand les rats sont enfermés, ils deviennent enragés", lui a-t-il dit. De cette discussion inattendue, Latifa Ibn Ziaten a fait un constat : "Ces jeunes sont à l’origine de ma souffrance. Mais je vais tendre la main à la jeunesse."
Il faut donner du bon sens à la jeunesse.
Forte de son expérience, Latifa Ibn Ziaten commence des séries de conférences dans les écoles pour parler de son histoire et de son intégration. "À force, je voyais tellement de fractures et de souffrance", exprime cette maman. Elle décide de changer son discours, et d’axer ses paroles sur les valeurs humaines et celles de la République : "je parle de tolérance, de laïcité, du respect de soi-même, et du respect de l’autre".
Son objectif est de donner un but à tous ces jeunes "mal-éduqués", de leur permettre de réussir et de démarrer eux-mêmes une vie. Elle s'appuie beaucoup sur sa foi. "On croit tous à quelque chose, qu’on soit juifs, chrétiens, musulmans, ou autres. La croyance donne de la force", dit-elle avec assurance.
Son combat pour la paix et la tolérance n'a pas trouvé écho que dans les écoles... Il a résonné jusqu'au Vatican. Latifa Ibn Ziaten a même pu rencontrer le Pape François à l'occasion d'une audience générale, le 2 mars 2022. Un échange riche au cours duquel elle a demandé au souverain pontife de prier pour elle, afin qu'elle continue son combat. Elle se souviendra longtemps de la réponse de celui qu'elle qualifie de "grand homme" : "priez aussi pour moi. Votre prière est importante parce que vous êtes mère d’un martyr", lui a-t-il répondu.
Consciente des défis auxquels la France et le monde doivent faire face, Latifa Ibn Ziaten encourage une attitude fraternelle en société. Cette attitude doit permettre d'aider "cette jeunesse complètement perdue" et de réduire "la fracture très grave en France et dans le monde".
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