Vendredi 3 mars se réunit, à Casablanca (Maroc), un collectif d'une centaine de chercheurs du monde entier. Ces juristes, médecins, psychologues des cinq continents publient un appel mondial contre la gestation pour autrui. Ils enjoignent aux États de réprimer cette pratique qui gagne du terrain et foule aux pieds, selon eux, la dignité humaine.
"À l'origine, c'est un petit groupe d'experts qui s'est demandé comment contribuer concrètement à faire avancer l'idée d'un engagement international des États pour protéger les femmes et les enfants contre la GPA", présente Aude Mirkovic, maître de conférences en droit privé et porte-parole de l'association "Juristes pour l'enfance". "On a voulu engager une démarche politique en sollicitant des experts du monde entier", dit-elle, "pour symboliser de façon charnelle la dimension mondiale de ce problème... À un problème mondial, il faut une réponse internationale", assène-t-elle.
La juriste dénonce un marché "hypocrite", fondé sur la rencontre d'une offre en provenance de pays développés et d'une demande émanant des pays pauvres : "On ne peut que constater que ceux sont des personnes aisées, des pays riches, qui se tournent vers la gestation pour autrui... Il y a très peu de pays qui ont légalisé la GPA, seulement, les marchands, les sociétés commerciales de GPA rabattent vers ces pays des clients du monde entier", souligne-t-elle. La gestation pour autrui est légale dans certains États (Ukraine, Russie entre autres). Certains la tolèrent ou l'autorisent sous conditions (par exemple, la Belgique, le Danemark, la Colombie, le Mexique). D'autres, comme la France, l'interdisent absolument.
Il faut mettre un frein à ce marché qui exploite la misère
"Les femmes qui louent leur ventre et qui remettent un enfant moyennant contrat, ce sont toujours des femmes des pays pauvres", déplore Aude Mirkovic. Si la "guerre en Ukraine a révélé" ce phénomène, les mères porteuses sont, aux quatre coins du globe, des "femmes qui trouvent là le moyen de survivre". "Il faut mettre un frein à ce marché qui exploite la misère", presse-t-elle, visant frontalement les entreprises qui se nourrissent de détresse psychologique d'une part, matérielle d'autre part : "Il faut une volonté politique des États de sanctionner ces marchands de l'humain qui exploitent la misère des femmes quelques part et la souffrance des personnes sans enfant ailleurs".
Au-delà des convictions religieuses, la spécialiste du droit de la famille estime que la GPA soulève une question anthropologique majeure. "C'est le respect de la dignité humaine et des droits humains qui est en jeu. Rien que ça, considère-t-elle, c'est contraire aux droits de l'enfant que de faire l'objet d'un contrat."
Elle espère que les gouvernants se saisiront de la déclaration dont elle est signataire. "Le texte est délibérément détaché de toute structure", explique-t-elle. "Il est à la disposition de tous, à commencer par les politiques." Malgré l'augmentation, ces dernières décennies, du recours à la GPA dans le monde, Aude Mirkovic croit qu'il est encore temps d'agir. "À l'époque où des personnes se sont mobilisées pour l'abolition de l'esclavage, il était bien plus institutionnel, répandu et accepté que ne l'est aujourd'hui la GPA", veut-elle convaincre. "Heureusement qu'ils n'ont pas baissé les bras !"
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