L’internat n’a pas la cote auprès de tout le monde. Depuis les années 1970, le nombre de parents faisant le choix de l’internat pour leur enfant ne cesse de diminuer. En effet, les préjugés sur ce système restent bien ancrés dans les mentalités, notamment en raison de la vision désuète du pensionnat comme un lieu de discipline. Pourtant, le ministère de l'Éducation nationale et de la jeunesse continue d’ouvrir des places dans les établissements du secondaire et semble vouloir pousser vers ce modèle.
La France compte aujourd’hui 1 529 internats dans l’enseignement secondaire et près de 223 000 places au total, dont le taux d’occupation est de presque 80 % et stagne ces dernières années. Les élèves qui sortent aujourd’hui de ces établissements sont généralement heureux de leur expérience, voire la recommandent. "La société a évolué, tout comme la discipline", explique sœur Nathalie, responsable d’internat à la Maison Française. Selon elle, il y a maintenant "une volonté de faire grandir les jeunes".
Le regard porté sur les pensionnats évolue. "L’image de l’éducation, comme la vision de l’enfant, a changé", estime Guillaume Prévost, délégué général du think tank VersLeHaut. L’internat devient ainsi une opportunité de "mieux concilier transmission et émancipation" et une façon de donner "des racines et des ailes aux jeunes", en particulier à l’âge du développement et du rejet de l’autorité parentale. Le modèle du pensionnat où l’on envoie son enfant lorsqu’il n’est pas sage n’est donc plus d’actualité. "L’internat s’impose comme une figure d’excellence capable de remobiliser les jeunes dans la réappropriation de leur apprentissage", indique-t-il.
"Mettre son enfant en internat ne veut pas dire l’abandonner", insiste Guillaume Prévost. En effet, l’institution ne se place plus dans un rôle éducatif pur, "elle ne remplace pas les parents". L’internat, tout comme les établissements classiques, ne vient qu’en complément de l’éducation parentale. La preuve en est que 98 % des jeunes estiment aujourd’hui que leur famille est leur premier secours. "Les jeunes sont beaucoup plus attachés à leur famille", considère le délégué général de VersLeHaut. Mais beaucoup ressentent le besoin de s’émanciper et de vivre en dehors de leur foyer familial. C’est le cas d’Hermine, une auditrice de 20 ans, qui confie s’être lancée dans l’aventure de l’internat pour s’éloigner de sa cellule familiale et mettre fin au harcèlement qu’elle subissait au lycée.
"L’internat est une alternative positive quand on ne sait pas comment réagir face aux comportements d’un enfant", considère Marc Assous, commissaire général du Salon de l'internat. De nombreux parents n’arrivent pas à gérer leur enfant. Le travail ou la monoparentalité jouent souvent sur le sentiment de dépassement des parents. "On aime dire aux enfants qu’ils iront en pension s’ils ne sont pas sages, mais c’est aujourd’hui une solution et une bénédiction". Les motifs sont très différents en fonction des jeunes mais "les soucis au démarrage ne concernent pas la majorité", rappelle sœur Nathalie. Beaucoup de jeunes veulent juste vivre autre chose, même si c’est "souvent à l’initiative des parents". Gaëtan, un auditeur, explique avoir pu réussir scolairement et obtenir son bac grâce au pensionnat alors qu’il était auparavant en décrochage scolaire.
Le pensionnat est devenu un réel lieu d’épanouissement des élèves, et ce à tous les niveaux. "On accompagne les jeunes dans la totalité de leur épanouissement humain, dont celui spirituel", raconte sœur Nathalie. Cette dernière estime que son établissement les aide à grandir. "La mission de notre congrégation est d'éduquer et d'évangéliser les jeunes", indique-t-elle. Qui plus est, les responsables des internats voient souvent les jeunes comme des personnes à part entière, qu’ils poussent vers le haut et auxquelles ils fournissent des clefs pour l’avenir. "Nous n'avons pas des élèves mais des jeunes, face à nous", selon sœur Nathalie. Pour Marc Assous, , ces jeunes en ressortent en "élite" et "sans les problèmes qu’ils pouvaient rencontrer" auparavant.
Cependant, "ça ne correspond pas à certains jeunes", souhaite préciser Guillaume Prévost. Selon lui, les internats sont à développer à travers la France, "mais on ne peut pas faire de généralité". La vie en collectivité peut en effet être oppressante et n’est pas adaptée à tous les profils. "Il n’y a pas de solution toute faite ou miracle", insiste-t-il. Il est ainsi nécessaire d’aller à la rencontre du jeune et d'être à son écoute, l’internat pouvant être une souffrance pour l’élève. "C'est un modèle particulier qui demande une formation adaptée des encadrants et une écoute poussée des jeunes", détaille Guillaume Prévost.
Si on remonte à quelques générations, les pensions étaient très souvent des établissements catholiques. Aujourd’hui, la religion est absente de la vie de beaucoup d’élèves. "Ce qui est beau c’est que l’internat accueille tout le monde et on propose des temps spirituels à ceux qui le veulent, quelle que soit leur confession", raconte sœur Nathalie. Tous sont ainsi au même niveau. Également, les internats catholiques sont généralement privilégiés par rapport à ceux laïcs puisqu'ils prônent de nombreuses valeurs comme le vivre-ensemble. "L’enseignement catholique est plébiscité même par ceux qui ne le sont pas, il a un véritable succès", conclut Guillaume Prévost.
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