Emmaüs entre l'ombre et la lumière après les révélations sur l'Abbé Pierre

"Les premiers éléments nous ont surpris, choqués. C'était difficilement imaginable." décrit Laurent Guinebretière, le responsable d'Emmaüs à Poitiers. Membre d'Emmaüs depuis 1986, le responsable local découvre les révélations sur les agissements de l'Abbé Pierre en juillet 2024. Si la nouvelle semble encore difficile à digérer pour le responsable, à Naintré, où l'association est installée depuis 43 ans, le maire, Christian Michaud est catégorique : "Il faut condamner. Ne pas condamner serait une faute."

Le devoir de condamné

Suite aux nouvelles révélations du 6 septembre, le conseil municipale de la mairie de Naintré, dans la Vienne, doit prendre une décision collégiale mardi 17 septembre, pour choisir si oui ou non, la ville débaptise le rond-point nommé d'après l'Abbé Pierre et retire la statue à son effigie. "L'abbé Pierre ne doit pas figurer parmi les personnalités qui sont honorés sur notre territoire" déclare Christian Michaud. 

Du côté d'Emmaüs Poitiers, Laurent Guinebretière semble chercher un équilibre entre deux facettes du fondateur : "Aujourd'hui pour les acteurs du mouvement [Emmaüs], nous sommes face à quelque chose de terrible. Avec un sentiment de tristesse. Est mis en avant le fait que ce personnage qui a été important pour Emmaüs [...] avait une part d'ombre, avec laquelle il faut apprendre à vivre, estime Laurent Guinebretière, quand je dis part d'ombre, ça n'excuse rien. Mais il y a une part d'ombre et une part de lumière." 

Dans l'antenne locale d'Emmaüs Poitiers, Laurent Guinebretière et son équipe n'ont pas encore pris de décision quant au portrait de l'Abbé Pierre affiché à l'accueil du site de la Matauderie. "Le rapport à l'Abbé Pierre appartient à chacun. Si ça a été mis là-bas, c'est que c'est important pour quelqu'un. On verra avec chacun. Si ça dérange des gens, nous l'enlèverons." affirme le responsable local.

Survivre à l'Abbé Pierre

Malgré le chamboulement que provoquent les nouvelles révélations sur les accusations d'agressions sexuelles de l'Abbé Pierre, Laurent Guinebretière ne s'inquiète pas de l'avenir d'Emmaüs : "Il y a un moment où la nécessité fait loi. On sait bien qu'il faut qu'Emmaüs perdure. Les actions qui sont mises en œuvre, le projet de société qui est porté, le refuge que cela représente pour un certain nombre de gens est aujourd'hui plus nécessaire que jamais. Et c'est cela qui est important. Cela fait déjà 17 ans qu'Emmaüs a appris à vivre sans l'Abbé Pierre." rappelle-t-il. 

Une nécessité à laquelle adhère et soutient le maire de Naintré, Christian Michaud : "Il faut distinguer l'œuvre, la création de l'association Emmaüs de la vie personnelle de l'Abbé Pierre. L'association Emmaüs doit continuer ses travaux en direction de la société et des personnes qui en ont besoin sur nos territoires." Conclut le maire de Naintré.