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Enfant sujet, enfant objet

RCF,  - Modifié le 19 février 2020
L'Assemblée nationale a planché sur deux textes qui adressent ce matin la question des enfants objets ou enfants sujets ...

L’Assemblée Nationale s’est intéressée ces dernières semaines à l’Enfant de 2 manières différentes : en y parlant de manière fracassante du congé pour les parents ayant perdu un enfant. En y adoptant également la semaine dernière un texte pour lutter contre l’exploitation commerciale des -16ans. Dans les 2 cas l’assemblée à chercher à créer des règles spécifiques pour les enfants, dérogatoire au droit commun. Et cela adresse une nouvelle fois que chaque thématique qui fait intervenir la question de l’enfance n’est pas un sujet comme un autre : l'enfant objet, l'enfant sujet. 
  
Au-delà d’être un débat récurrent c’est un débat complexe et difficile à appréhender. On pense que les enfants ne relèvent pas des mêmes règles que celles des adultes et c’est ce qui nous a amené à construire un cadre juridique spécifique avec les ordonnances de 1945. Ce cadre a cependant besoin d’être constamment rappelé : d’abord parce que la société évolue et qu’elle pose de nouvelles questions pour nos enfants comme avec l’arrivée des réseaux sociaux ; aussi parce qu’il est nécessaire de ne pas oublier pourquoi on a décidé ce cadre et pourquoi les enfants ne peuvent être considérés comme des adultes pas tout à fait encore grand et enfin parce qu’il reste beaucoup de questions en suspens sur la manière de faire cohabiter ces droits spécifiques et notre responsabilité d’adulte de créer des espaces où leu avis, leurs actions, leurs opinions peuvent être pleinement prises en compte.
 
Quand un enfant décède, ce n’est pas n’importe quel décès. Quand un enfant réalise une pub ou une vidéo sur Youtube, ce n’est pas une vidéo comme une autre. Quand un enfant prend la parole devant les dirigeants de notre monde, ça n’est pas n’importe quel discours. Les enfants ne sont pas des adultes en miniatures. Leur droit à s’exprimer, à construire leur projet de vie, à consentir n’engagent pas le même cadre juridique qu’un adulte. C’est un cadre qui se doit d’autant plus protecteur que leurs droits sont inaliénables. C’est un cadre qui se doit d’autant plus protecteur qu’il doit leur permettre de révéler, en liberté, complètement, qui ils sont, qui ils veulent devenir.

Ces 50 dernières années le rapport à l’enfant a beaucoup changé. D’abord parce que la mortalité infantile a considérablement baissé mais aussi parce que le nombre d’enfants par famille a évolué à la baisse. L’enfant se singularise et devient porteur parfois des rêves et des espoirs de ses parents. Le travail des enfants est condamné, il ne doit donc plus être un outil de rendement économique, il devient pourtant parfois un outil de rendement social et marchand.
  
Youtube, Instagram, vous pouvez regarder les dizaines de comptes des ados influenceurs du moment, ils prêtent leur nom à des marques qui leur proposent de leur envoyer gratuitement leurs produits pour qu’ensuite ils les exposent en vidéo et en images. Ils touchent ainsi des millions d’autres jeunes. La marque se diffuse. L’ado est rémunéré et voit sa vie changer sur un écran. Leurs parents managent les rentrées pécuniaires obtenues parce qu’ils sont mineurs. Dans ce monde d’images où chaque photo essaye d’effacer l’enfant qu’ils sont, il devient plus important pour ces eux d’exister à travers l’écran. Ils deviennent objet marketing et objet parental, leur propre liberté n’est que factice.
 
Khalil Gibran écrivait dans son ouvrage Le prophète ce texte magnifique sur les enfants « Vous pouvez leur donner votre amour mais non point vos pensées, car ils ont leurs propres pensées. Vous pouvez accueillir leurs corps mais pas leurs âmes, car leurs âmes habitent la maison de demain, que vous ne pouvez visiter pas même dans vos rêves. Vous pouvez vous efforcer d’être comme eux, mas ne tentez pas de les faire comme vous. »
 
 

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