Jeudi dernier dans l'interview donnée à TF1, Emmanuel Macron a réaffirmé le possible envoi de troupes en Ukraine. Pourtant, les effectifs de l'armée française, bien que formés et compétents, ne seraient pas suffisants pour soutenir l'Ukraine plus de quelques jours selon Christophe Gomart, ancien directeur du renseignement militaire et ancien commandant des forces spéciales. Qu'en est-il vraiment des moyens concrets pour apporter l'aide dont l'Ukraine a besoin ?
"On a toujours les moyens d’envoyer des troupes en Ukraine, mais elles ne tiendront pas longtemps." Jeudi dernier, dans une interview accordée à TF1 et France 2, le Président de la République rappelait le possible envoi de troupes françaises en Ukraine. Invité de la matinale, le général Christophe Gomart fait part de son scepticisme.
Pour lui, prétendre envoyer des troupes françaises en Ukraine nécessite davantage de moyens militaires. "Au vu du stock de munitions et du matériel qui existe, ce serait que pour quelques jours”, affirme l'ancien directeur du renseignement militaire et ancien commandant des forces spéciales. En effet, la taille de l’armée française est insuffisante pour contrer le grignotage russe du territoire ukrainien. Le Général Gomart rappelle que les Russes ont perdu 2900 chars depuis le début de l'invasion ukrainienne. Par comparaison, l’armée française dispose seulement de 200 à 220 chars Leclerc, et de 200 avions de chasse et Rafales.
Par ailleurs, la France produit 3000 obus par mois alors que l’Ukraine en consomme 3000 à 5000 obus par jour. La Russie a construit une vraie économie de guerre avec des usines d’armement, qui lui permet de tenir dans le temps et d’avancer sur le sol ukrainien. A contrario, l'Ukraine compte seulement sur le soutien de l’Europe et des Etats-Unis. "Si on ne fournit pas de munitions aux Ukrainiens, je pense que Vladimir Poutine pourra arriver à ses fins", annonce le général Christophe Gomart.
Par ailleurs, les volontés d'Emmanuel Macron d'envoyer des troupes au sol semblent peu réaliste au regard des militaires formés en France. "L’armée française est une armée de métier, de professionnels. Si l’on mobilise des jeunes d’une classe d’âges, il faudra les former, les entraîner, les équiper. Et tout ça prendra beaucoup de temps”, explique Christophe Gomart. "Une mobilisation générale est hors de la pensée militaire française" rappel-t-il. Il faudrait plutôt renforcer le nombre de réservistes, qui eux, pourront être opérationnels. "Par contre, si le sol français est attaqué, ce sera une autre histoire", conclut-il.
La stratégie adoptée par Emmanuel Macron est de laisser s’installer l'ambiguïté. "L’adversaire ne doit pas savoir ce qu’on va faire parce qu’à la guerre, on gagne quand il y a un effet de surprise", explique Christophe Gomart sur la dissuasion militaire. Le Président de la République balance entre une prise d’initiative concrète et un recul calculé. "Les menaces d’Emmanuel Macron sont là pour dire aux Russes de faire attention. S’ils vont trop loin, nous serons là pour soutenir les Ukrainiens", selon Christophe Gomart. Les Russes occupent actuellement 18 à 20 % de territoire ukrainien.
D’un autre côté, certains pays européens ne sont pas prêts d’envoyer des troupes en Ukraine. Mais Macron appelle à une alliance. Lors du sommet du Triangle de Weimar vendredi dernier, les trois dirigeants, Emmanuel Macron, Olaf Scholz et Donald Tusk, ont réitéré leur volonté de soutenir Kiev dans la durée. "Une vraie solidarité avec l’Ukraine ? moins de mots et plus de munitions", s’exprimait le Premier ministre polonais Donald Tusk vendredi dernier. Le soutien à l’Ukraine est réaffirmé pour l’Allemagne, la France, et la Pologne et l’assurance de ne pas "être en guerre contre le Russie" selon le Président de la République.
"Je n’ai pas l’impression que Poutine prend en compte les paroles de Macron dans sa propre stratégie", affirme le général Christophe Gomart. De plus, la Russie est passée en économie de guerre avec une vraie profondeur stratégique. Vladimir Poutine mène une guerre d’attrition, c’est-à-dire que "le but de la guerre est de détruire et de faire le plus de mal à son ennemi. Détruire ses hommes, ses chars, ses canons, ses infrastructures afin de pouvoir progresser sur le sol ennemi", explique l’ancien directeur du renseignement militaire.
"La tactique russe, c’est d’écraser tout ce qui se trouve devant eux. C’est leur manière de faire, on l'a vu pendant le Seconde Guerre mondiale." Aujourd’hui, Emmanuel Macron entend renforcer la défense française.
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