Élevage industriel et corrida : que dit l'Église catholique ?
En partenariat avec Les Facultés Loyola Paris
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La corrida va-t-elle bientôt être interdite partout en France ? Les députés doivent voter ce jeudi une proposition de loi, portée par l'élu insoumis Aymeric Caron, pour abolir cette pratique du sud de la France. Le texte a déjà été rejeté en commission des lois la semaine dernière.
Il sera dans l'arène parlementaire jeudi pour défendre sa proposition de loi visant à interdire la corrida partout en France. Le texte, porté par le député insoumis de Paris Aymeric Caron et déjà rejeté la semaine dernière en commissions des lois, sera examiné dans le cadre de la niche parlementaire de la France insoumise à l’Assemblée nationale, journée durant laquelle un groupe d’opposition fixe son ordre du jour.
Initialement positionnée en quatrième position, la proposition de loi a été avancée mercredi à la deuxième place par le groupe politique, afin d'être sûr qu'elle soit bien examinée. Ce qui n'était pas certain jusqu'alors, car les discussions doivent terminer à minuit et d'autant plus que plusieurs centaines d'amendements ont été déposés. Aymeric Caron regrette que certains de ses collègues "ralentissent le débat".
La corrida semble diviser davantage la classe politique que les Français. Selon un récent sondage Ifop, 74 % des Français se disent favorables à l’interdiction de la corrida. C'est l’argument avancé par Aymeric Caron pour justifier son texte.
La pratique n’est autorisée que dans une dizaine de départements français, dans les régions Occitanie, Nouvelle-Aquitaine et PACA. Ce sont des dérogations à la loi Grammont de 1850 qui punit les sévices imposés aux animaux, en vertu d’une "tradition ininterrompue et locale". Ce qui permet donc ces courses dans les arènes de Béziers, Nîmes, Dax ou encore Bayonne, entre le taureau et le matador qui aboutit, sauf cas exceptionnel, à la mise à mort de l’animal. Environ 200 corridas sont organisées chaque année avec environ 1000 taureaux tués.
Qu’importe l’ampleur, c’est une question de valeurs selon Aymeric Caron. "Dans notre pays, on admet qu’un divertissement puisse consister en la torture et en l’exécution publique d’un être sensible. Pour un pays qui se dit progressiste, c’est une honte. Il faut faire sauter ce verrou", insiste le député.
La France sans corrida, Tibo Garcia a du mal à l'imaginer. Si elle devait être interdite, ce matador nîmois de 25 ans partirait probablement en Espagne, pays d'origine de cette tradition. "C’est toute ma vie, confie-t-il. Je vis à travers et pour le taureau. Je respecte énormément l’animal contrairement à ce qu’on pourrait penser et je pense que la tauromachie et la mise à mort sont adaptées au taureau de combat." Tibo Garcia s'est d'ailleurs rendu à Paris mercredi avec d'autres toreros pour "revendiquer [leur] liberté".
Depuis plusieurs semaines, les défenseurs de la corrida veulent donc se faire entendre et expliquer. Selon eux, c'est le fait de mal connaître la corrida qui peut susciter de l'hostilité. Des porte-paroles de la cause ont ainsi fait des aller-retours à Paris pour rencontrer des parlementaires et dire notamment qu'une interdiction de la corrida nuirait à la vie et l’économie locale. Les éleveurs de taureaux de combat craignent par exemple de voir leurs élevages disparaître et s'interrogent sur l’avenir de leurs terres qui selon eux pourraient être aussitôt bétonnées. Ils revendiquent d’ailleurs le bien-être de leurs bêtes, pourtant élevées spécialement pour l'arène.
L'argument est rejeté en bloc par Aymeric Caron. "C'est une activité qui vit sous perfusion publique, qui n’est plus rentable. Le public des corridas est extrêmement minoritaire. La proposition de loi ne vise qu’à une chose, faire en sorte que la loi commune s’applique sur l’ensemble du territoire." La corrida génère environ 40 millions de chiffres d’affaires chaque année en France.
Plus qu'un enjeu économique, c'est une véritable culture pour tous les aficionados, les amateurs de tauromachie. Dans les villes taurines, comme à Nîmes où vit Corentin Carpentier, la corrida est de partout. "Elle est dans les cours d’école où les enfants jouent aux toreros, dans nos boutiques avec des reproductions des œuvres de Picasso, dans le 'campo' parce qu’on a des taureaux tout autour de chez nous. C’est aussi une notion qui fédère une communauté culturelle. La tauromachie rassemble, dans les rues, dans les bodegas, dans les arènes", assure celui qui est président de l’Union de la jeunesse taurine française.
"C’est un mensonge de la part de personnes qui manquent d’arguments pour continuer à imposer un spectacle extrêmement cruel et choquant", rétorque Muriel Arnal, présidente et fondatrice de l’association One Voice, qui milite pour le bien-être animal. "C'est une très vieille tradition comme celles de violences que nous avons abolies, où on est obligé de prendre une bête comme bouc émissaire pour faire passer toutes ses pulsions."
Le sujet divise jusqu'au sein même des groupes politiques. Les élus de la majorité, par exemple, seront libres de leur vote jeudi. Mais Emmanuel Macron a assuré mercredi qu’il n’y aurait pas d’interdiction de la corrida. On doit selon lui aller vers "une conciliation, un échange".
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