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Il n’y aura pas d’Airbus du rail

RCF,  - Modifié le 7 février 2019
Retrouvez la chronique économie de Vincent de Féligonde chaque jeudi.
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La commission européenne a mis son veto hier à la fusion entre le français Alstom et l’allemand Siemens pour créer un géant européen du ferroviaire pour faire face à la concurrence chinoise. Une opération fortement soutenue par Paris et Berlin, de plus en plus inquiets du rattrapage de Pékin en matière technologique.
 
Qu’est ce qui justifie ce refus ?

La défense de la concurrence. La commission européenne est la gardienne des traités européens, qui définissent les règles d’une concurrence non faussée. Elle ne fait qu’appliquer les lois définies par les Etats membres.
 
Et donc ?

Après un examen minutieux, elle a conclu que le nouvel ensemble se serait retrouvé en situation de monopole dans la signalisation ferroviaire et sa part de marché dans les trains aurait été trois fois plus importante que son principal concurrent. Ce qui aurait risqué de faire monter les prix des trains pour les compagnies ferroviaires, et celui des billets pour les consommateurs.

D’autant qu’à côté de la France et de l’Allemagne, "il y a 26 autres Etats membres qui ont intérêt" à ce qu’il y ait de la concurrence, a expliqué la commissaire européenne à la concurrence, Margrethe Vestager, qui – au passage - avait été encensée par le président Emmanuel Macron pour son intransigeance vis-à-vis des GAFA, les géants technologiques américains.

Comment ont réagi les Français et les Allemands ?

Mal. Le premier ministre Edouard Philippe a qualifiée le "non" à la fusion de "mauvaise décision", "prise sur de mauvais fondements", qui "constitue un mauvais coup à l’industrie européenne"Paris et Berlin craignent la concurrence du chinois CRRC, numéro un mondial du ferroviaire né du rapprochement de deux entreprises d'Etat contrôlées par Pékin, qui aurait pesé deux fois plus lourd qu’Alstom et Siemens réunis dans le matériel ferroviaire. CRRC fabrique 200 trains à grande vitesse chaque année, et Siemens-Alstom 35, notait récemment Bruno Le Maire, le ministre français de l’économie.

Que répond Bruxelles à cela ?

"Aucun fournisseur chinois n'a jusqu'ici participé à une offre publique en Europe pour vendre sa signalisation, ni fourni un train à très grande vitesse hors de Chine. Il n'y a aucune perspective de l'arrivée des Chinois sur le marché européen dans un futur proche", a souligné hier Margrethe Vestager hier lors de la conférence de presse.

Comme les syndicats des deux entreprises, elle estime qu’en cas de fusion Alstom-Siemens, la disparition d’un concurrent en Europe aurait pu au contraire constituer un appel d’air pour les Chinois. Et du côté de la Commission, on se défend d’être des ayatollahs de la concurrence : Bruxelles, qui dispose depuis 1989 d'un droit de veto sur les grands projets de fusion, n'en a pas souvent fait usage. Depuis le début de son mandat, fin 2014, la commissaire à la concurrence n'avait interdit jusqu'à ce jour que trois rapprochements sur près de 1800 notifiées, soit 0,2%...

Pas simple !

Non. Ces questions sont très complexes. La question est de savoir si face aux Américains, aux Chinois et bientôt aux Indiens, qui ont des marchés intérieurs gigantesques, il faut favoriser la formation de champions européens, qui pourront être des monopoles sur le Vieux continent. A Berlin, où l’on était jusqu’ici très critique envers les velléités étatiques des Français, on semble avoir désormais changé d’avis. Le ministre allemand de l'économie, Peter Altmaier, a annoncé «la préparation d'une initiative germano-française» pour « modifier les règles européennes de la concurrence».

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