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Il y a 65 ans, la défaite de Diên Biên Phu

RCF, le 2 mai 2024 - Modifié le 2 mai 2024

​Il y a 65 ans avait lieu la bataille de Diên Biên Phu. Le 7 mai 1954, l’armée française capitule, mettant fin à la guerre d'Indochine. Retour sur la mémoire d'une guerre un peu oubliée.

Des prisonniers français en 1954Des prisonniers français en 1954

la fin de l'indochine française

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Il y a 65 ans avait lieu la bataille de Diên Biên Phu, c’est en effet le 7 mai 1954 que l’armée française capitule face aux armées du général Giap. Plus de cinq mois de combats sanglants, des milliers de morts, 8000 côté vietnamien, 2000 côté français, sans oublier 10 000 prisonniers français dont 3000 seulement reviendront de l’enfer de la jungle.

Diên Biên Phu c’est le dernier affrontement majeur de la guerre d’Indochine, c’est celui qui donnera le signal de la fin de l’empire colonial français. Pour en parler, nous recevons Bénédicte Chéron historienne, spécialiste de l’armée et auteure d’un livre sur Pierre Schoendoerffer, photographe et cinéaste de la guerre d’Indochine. Chercheure partenaire au CIRIS et enseignante à l’Institut Catholique de Paris.

Le 7 mai 1954, après 55 jours de combat acharné dans cette plaine entourée de collines au nord du Viêt-Nam, la dernière grande bataille de la guerre d’Indochine prend fin. Cette défaite française aboutira aux accords de Genève qui scelleront la paix entre la France et ce qui était l’Indochine française. Les français en métropole, restés jusqu’ici indifférents à cette guerre coloniale qui éclate juste à la fin de la seconde guerre mondiale ont pris conscience de ce qui se jouait en Asie du Sud-est.

 

« Cette défaite a agi comme un électrochoc bien tardif pour que les français s’intéressent à ce qui se passait en Indochine »

 

Des travaux récents de Pierre Journod et Ivan Cadeau, spécialistes de la stratégie militaire, ont permis de préciser les raisons de cette déroute. Les soldats sur place ont eu l’impression d’être abandonnés par les chefs militaires et responsables politiques. Cette defaite marque « le premier grand déclin de l’Empire », qui avait déjà commencé avant la seconde guerre mondiale, et a conduit les Français a réaliser la « fragilité » de leur empire colonial.
 

un regain d'intérêt

Si cette guerre est un peu tombée dans l’oubli de la « mémoire nationale de la décolonisation », c’est qu’elle a été suivie très peu de temps après par la guerre d’Algérie, qui va laisser des blessures « beaucoup plus vivaces et durables dans la mémoire française ».
Pour les soldats français restés sur place, la défaite ne signe pas la fin de l’enfer.

Entre dix et onze mille Français seront faits prisonniers. Emmenés dans la jungle par les Vietminh, seuls un tiers d’entre eux reviendront vivants d’une captivité de plus de quatre mois. Si la guerre a été une épreuve, la captivité est devenue une épreuve « morale », dans le contexte idéologique de la Guerre Froide.

Depuis le début des années 2000, cette guerre d’Indochine redevient un objet d’intérêt pour les français, notamment grâce aux travaux conjoints d’une nouvelle génération d’historiens français et vietnamiens.  Des travaux débarrassés de « grilles politiques et idéologiques » qui avaient cours en France dans les années 60 qui ont permis de s’intéresser au sort des combattants dans les deux camps sans, leur coller des étiquettes politiques qui  « pour beaucoup les dépassaient » pendant la guerre.

Bénédicte Chéron, qui a signé un ouvrage consacré à Pierre Schoendoerffer souligne l’importance du cinéaste pour la mémoire de la guerre d’Indochine. Le réalisateur qui a été caméraman des armées était présent lors de la bataille de Diên Biên Phu. De cette expérience il a tirée une œuvre « très isolée dans le paysage cinématographique français » consacrée à ces jeunes officiers qui ont connu leur première expérience du combat en Asie.
 

une mémoire apaisée

L’historienne s’est rendue à Hanoi il y a plus de dix ans et elle a pu rencontrer des anciens combattants vietnamiens. Malgré leur victoire, Bénédicte Chéron s’est rendue compte que les soldats vietnamiens avaient eux aussi l’impression d’être des « oubliés », quelques décennies après la bataille, tout en portant un discours d’ « apaisement » et une parole « respectueuse » sur leurs anciens ennemis français. Des rencontres entre anciens combattants ont d’ailleurs été organisées dès les années 80.

Si la mémoire de ce conflit n’est pas aussi vive que celle de la guerre d’Algérie, il existe tout de même des commémorations pour les cinquante ans de la dernière bataille. Dans les mémoires familiales françaises, cette guerre est moins présente, « écrasée par la mémoire » de la seconde guerre mondiale et de la guerre d’Algérie, et aussi parce qu’il s’agissait d’une guerre d’engagés volontaires, contrairement aux deux autres conflits.

Pour beaucoup de soldats, cette guerre a été « initiatique », moins qu’idéologique. Le fait d’en parler de façon apaisée, sans faire de « procès politique » aux soldats est la meilleure manière de leur rendre hommage, selon Bénédicte Chéron.  
Aujourd’hui, la guerre d’Indochine reste un conflit riche en enseignements stratégiques pour les militaires, des enseignements toujours utilisés dans les opérations extérieures actuelles.
 
Livre « Le soldat méconnu : les français et leur armée état des lieux » Armand Colin

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