Depuis le 6 novembre, une large partie du Pas-de-Calais subit des crues à répétition. Récit d'une semaine éprouvante face à la montée des eaux. Des premières évacuations à la visite d'Emmanuel Macron.
C'est un petit bout de campagne tranquille. Traversé par des fleuves côtiers peu profonds. Lieux de promenades et de loisirs à la belle saison. En quelques jours tout s'est transformé en un gigantesque marécage. L'alerte est donnée le 6 novembre. Lorsque les habitants des vallées de l'Aa, de la Liane et de la Hem se réveillent les pieds dans l'eau. Les fleuves ont débordés. Gonflés par les pluies diluviennes des derniers jours. Les premières évacuations ont lieu à Bourthes où l'on relève 1m50 d'eau dans certaines habitations. Mais tout le monde garde les yeux rivés sur la météo. On attend encore d'importantes pluies dans la nuit. La première alerte rouge est déclenchée le long de l'Aa. Une trentaine d'établissements scolaires ferment leurs portes.
Au matin du 7 novembre, 60 communes sont touchées, de Saint-Omer à Hesdigneul-lès-Boulogne. Dans l'Audomarois, l'Aa est sortie de son lit. Dépassant le niveau de la crue historique de 2002. Les premières constatations se font sous un timide soleil. Mais la situation reste précaire. "On est assez inquiets, on prévoit de nouvelles précipitations" s'alarme Joël Duquenoy, président de l'agglomération de Saint-Omer. Une inquiétude confirmée puisque dans la nuit du 7 au 8 novembre, de nouvelles communes sont touchées. Le long de la Canche notamment. En moins d'une semaine, il est tombé trois mois de pluies sur l'ouest du Pas-de-Calais.
L'urgence est de limiter les dégâts et le bilan.
En visite à Saint-Etienne-au-Mont mercredi 8 novembre, le ministre de la transition écologique, Christophe Béchu donne les priorités : "l'urgence est de limiter les dégâts et le bilan" déclare-t-il devant les caméras. Dans la journée les premières pompes sont installées sur des points stratégiques en aval pour évacuer l'eau. Comme à Marck ou Gravelines. Une autre est installée à Arques pour soulager une digue de l'Aa qui menace de céder. Des renforts de sapeurs-pompiers arrivent depuis l'Aisne et l'Ile-de-France. Mais les habitants commencent à être fatigués par la situation. Comme Thomas Quandalle, éleveur à Bréxent-Enocq, le long de la Dordonne un affluant de la Canche. "Le niveau de l'eau a déjà énormément remonté" s'inquiète ce soir-là l'agriculteur, qui a déjà dû évacuer ses vaches en catastrophe lundi 6 novembre.
Le 9 novembre est sans doute la journée la plus difficile. Tout le département est en alerte rouge crue. La préfecture décide de fermer pour deux jours 388 établissements scolaires. Les évacuations se succèdent. A Estrée et Estréelles, dans la vallée de la Course, une centaine d'habitants sont évacués en urgence. Une digue menace de céder. A Blendecques dans l'Audomarois, comme dans beaucoup d'autres communes, la mairie ouvre un gymnase pour les réfugiés avec l'aide de la Croix Rouge. "On n'a rien pu sauver" témoigne Jean-Pierre. Le rez-de-chaussée de sa maison est totalement sous l'eau.
Tout le week-end les bilans se suivent et se ressemblent. Les pluies récurrentes empêchent le bon écoulement des eaux vers la mer. Malgré les 5 méga-pompes déployées sur tout le territoire. Lundi 13 novembre, 42 000 mètres cubes d'eau sont rejetés à la mer toutes les heures. A la veille de la visite d'Emmanuel Macron, 300 000 personnes sont directement touchées par ces inondations.
Je sais combien la fatigue s'installe parce que c'est long, c'est dur. Mais il faut tenir.
C'est à Saint-Omer qu'Emmanuel Macron décide de se rendre le mardi 14 novembre. Il rencontre élus et forces de sécurité. Avant d'annoncer la déclaration de catastrophe naturelle pour 244 communes. 214 dans le Pas-de-Calais et 30 dans le Nord. "Je sais combien la fatigue s'installe parce que c'est long, c'est dur. Mais il faut tenir" déclare le Président. Autre annonce importante : le déblocage "immédiat" de 50 millions d'euros pour les sinistrés.
Le Président est allé, les pieds dans l'eau et sous la pluie, à la rencontre des habitants et des maraîchers. Ces derniers pourront bénéficier d'un fond exceptionnel de soutien, "soit pour les besoins en investissements, soit pour les pertes d'exploitation" précise le Président de la République. Autre point à améliorer selon les agriculteurs : l'écoulement des eaux. Ils demandent un meilleur entretien des fossés et cours d'eau ainsi qu'un assouplissement réglementaire.
Des échanges entre le Président et les habitants ressort une certaine impuissance. Emmanuel Macron ne peut que tenter de rassurer lors de sa visite à Blendecques. Puisque la pluie continue de tomber, empêchant la redescente des cours d'eau. "On sera là dans la durée" assure le chef de l'Etat.
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