Avec un titre aussi énigmatique, vous devez bien vous demander ce que Jean Rolin peut nous raconter… Crac, c’est le nom d’un incroyable château édifié du temps des croisades, aujourd’hui en territoire syrien. Et c’est Lawrence d’Arabie qui a mis Jean Rolin sur la piste de cette impressionnante forteresse encore appelée "crac des chevaliers".
En 1909, Lawrence d’Arabie a 21 ans, et prépare une thèse sur les fortifications du Moyen Orient. Il se trouve que Jean Rolin a passé son enfance à Dinard, comme Lawrence d’Arabie : il n’en faut pas plus à l’écrivain voyageur pour se mettre dans les traces de Thomas Edward Lawrence, en quête des ruines de ces forteresses croisées perdues dans les sables, aux périphéries d’un pays agité par la guerre. Il est comme ça, Jean Rolin, écrivain flâneur de notre petit monde, faisant un livre à la poursuite des chiens errants, ou s’intéressant à l’ornithologie dans son dernier livre "Le traquet kurde" bizarrement perdu dans le Puy de Dôme… De ses déambulations curieuses, il fait des livres, et c’est tant mieux !
Il s’intéresse, bien sûr, aux édifices fortifiés, suivant scrupuleusement les annotations de Lawrence, il nous fait vivre aussi les aléas d’un voyage pas toujours simple dans cette région, quand il faut supporter le mauvais caractère d’un directeur de musée ou subir une escorte : « Au terme de la visite du château, les deux soldats sans prendre mon avis mais après s’être concertés avec Orson, mon chauffeur, ont décidé que nous irions déjeuner à mes frais dans un restaurant non loin de là ». Tantôt ouvrage documenté bourré d’informations sur la région, tantôt bouquet d’anecdotes d’un reporter soucieux des détails… Le récit est savoureux : « Sur la pente qui nous fait face, un berger conduit un troupeau de moutons dont j’ai malheureusement oublié de noter, sur le moment, combien de têtes il comptait… »
C’est la force de Jean Rolin : on est presque dans un carnet de voyage mais aussi en plein reportage, avec l’envers du décor, les impressions, les digressions, et toujours une pointe de dérision au milieu de propos érudits. Quand Lawrence d’Arabie voulût entamer son propre voyage, un de ses contemporains l’en dissuadait : « Il n’est que trop vraisemblable qu’il s’avérera fastidieux, hasardeux pour la santé et finalement décevant ». Désolé, messieurs les anglais : à la lecture de « Crac », c’est tout le contraire ! « Crac », de Jean Rolin est publié chez P.O.L.
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