Le mouvement vegan s’est créé une place au soleil dans les médias. Portée par des vidéos chocs tournées dans les abattoirs, la cause animale n’a jamais été autant médiatisée. Au point que familles, institutionnels et spécialistes de l’élevage s’interrogent aujourd’hui sur notre consommation de viande. Pourtant, derrière ce combat présenté comme vertueux, se cachent des intérêts puissants. C’est du moins l’avis de Jocelyne Porcher.
Cette sociologue à l’INRA, zootechnicienne, vient de publier "Cause animale, cause du capital" (éd. Le bord de l’eau). "Cela fait très longtemps que j’agis contre la violence industrielle envers les animaux. Mon opposition au mouvement vegan vient du fait que leur action, au lieu de se porter contre le système industriel et la violence envers les animaux, se construit contre les animaux en préparant leur disparition et cela en soutenant une alimentation alternative aux produits d’élevage" explique-t-elle.
Pour Jocelyne Porcher, les vegans n’ont rien de lanceurs d’alerte. "Cela fait 20 ans que les lanceurs d’alerte existent. Il y a un enjeu très fort : faire comprendre aux consommateurs combien les systèmes industriels sont violents envers les animaux, et combien ça serait mieux de manger de la viande in vitro. Je souligne que c’est exactement l’argumentaire des associations vegans. Elles dénoncent le système industriel, mais au lieu de dire que le pas d’après, c’est de revenir à l’élevage paysan, elles laissent la place aux alternatives biotech" ajoute la sociologue.
Derrière ces alternatives biotech, se cache le mythe de la "cleen meat", ou viande d’élevage. Qui n’est plus forcément un mythe tant les choses avancent vite. Concrètement, il s’agit de biologie cellulaire qui consiste à recréer du muscle en laboratoire, via une culture de cellules. Pour l’instant, on en est au stade du labo, mais l’objectif est bien de lancer à terme des usines capables de produire cette viande "moralement" propre, à horizon 2023.
Et comme ils ne sont jamais très loin de nous, dans notre quotidien, on retrouve derrière ce lobby de la "cleen meat", les GAFA. C’est ce qu’explique Jocelyne Porcher. "Ce sont tous ces milliardaires, toutes ces entreprises qui investissent partout dans les biotechnologies de la santé, de l’alimentation, mais là particulièrement. Il y a des milliards de profit derrière" lance-t-elle, dénonçant un culte de la technique et de la science, nous faisant oublier d’où nous venons, et notre rapport à la terre et aux animaux.
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