J'ai quand même un problème avec notre exercice de la démocratie, surtout quand il s’applique à des sujets écologiques. J’en veux pour preuve le débat qui s’enflamme en France autour de la 5G, cette technologie qui a pour but d’accélérer le débit de données par les réseaux téléphoniques et qui a valu au Président de la République de traiter les écologistes d’Amish.
Effectivement, si nous vivions tous dans la sobriété heureuse des Amishs, la question du réchauffement climatique ne serait même pas un sujet. Mais à ce stade, ne refaisons pas l’histoire et constatons que nous avons collectivement construit un mode de vie dont nous apprécions le confort même si désormais, la problématique écologique nous oblige à réinterroger ce modèle.
Si la démocratie française n’était pas rythmée par des sauts de puces électoraux quinquennaux, nos élus auraient sans doute pu appréhender depuis fort longtemps l’enjeu de la préservation de nos biens communs. Emmanuel Macron, en créant la convention citoyenne pour le climat, a fait lui aussi le constat du dysfonctionnement de notre démocratie.
Et c’est pour cela que 150 personnes, pas seulement des Amishs puisqu’ils ont été tirés au sort, ont travaillé durant de long mois avec, comme seul horizon, le long terme et l’intérêt général.
Saluant ce travail avant cet été, le Président de la république a retenu 146 des 149 propositions faites par la Convention citoyenne dont celle d’une phase de moratoire et de débat avant le déploiement de la 5G. Mais l’automne est arrivé … Et le Président de la république a décidé de poursuivre le déploiement de la 5G ! A l’heure où l’on constate, d’élections en élection, la désaffection des français pour les urnes, celte décision ne peut que nourrir la défiance des français vis à vis de l’exercice démocratique dans notre pays.
Le problème de la 5G est un problème de fond. Trop de questions sont posées sur les effets du rayonnement de cette technologie sur les organismes vivants dont les humains.
Ce qui nous est promis c’est que la 5 G nous permettra de développer la télé-médecine, les voitures sans conducteur, et tout ce qui transforme nos objets domestiques en outils connectés. Mais il n’est plus possible aujourd’hui d’adopter de tels projets au nom du progrés quand l’on sait que c’est au nom de ce même progrès non éclairé que nous sommes dans la situation climatique actuelle. Accélérer n’est pas un objectif en tant que tel. Accélérer en provoquant le changement de téléphones de tous les habitants de la planète alors que nous savons les impacts écologiques de la fabrication de ces mêmes téléphones ? Accélérer pour quoi ? Accélérer vers où ? Accélérer pour qui ? Se poser ces questions invite d’abord à ralentir. Sans doute même à s’arrêter un moment sur le rebord du monde pour penser le futur de ce monde qui est aujourd’hui bien assez sombre pour ne pas y aller trop vite.
Chaque jeudi, à 7h20 dans la matinale, la chronique de Julien Dezécot, Directeur de publication, cofondateur du Magazine Sans transition, et de Lucile Schmid, essayiste, ancienne conseillère régionale d'Île-de-France et co-fondatrice de La fabrique écologique.
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