Rumilly
Une France à la Michel Houellebecq. C'est ce que décrivent les auteurs de "La France sous nos yeux" (éd. Seuil), sauf qu'il ne s'agit pas d'un roman. Cet essai est un large état des lieux de notre pays. Avec sa société de consommation qui se croit encore au temps des Trente Glorieuses. Cet imaginaire puissant, toujours à l'œuvre aujourd'hui, appuie ce sentiment de déclassement qui a mené au mouvement des Gilets jaunes...
"Près d'un demi-siècle après l'achèvement des Trente glorieuses, nous continuons à parler de la France comme si elle venait d'en sortir." Ainsi parlent les auteurs de "La France sous nos yeux" (éd. Seuil). Le journaliste Jean-Laurent Cassely et le politologue Jérôme Fourquet dressent un état des lieux d'un pays resté "nostalgique" des années 70. "Lors du décès de Jean-Paul Belmondo, on s'est rendu compte à quel point les Français et les médias étaient nostalgiques de cette France des images d'Épinal des années 70." Pour Jean-Laurent Cassely, "on a pas forcément vu se transformer le pays sous nos yeux". Nous ouvrir les yeux : c'est donc l'objectif de cet essai. "On vit déjà dans la France d'après..."
Le pèlerinage à Disneyland, ça fait partie de la culture et de l'identité nationale de la France d'après
"Nous, on voulait écrire l'histoire d'après, ce qui s'est passé depuis les années 80 et 90 à nos jours." Entre histoire et sociologie, "La France sous nos yeux" est une photographie de la vie quotidienne des Français. Une société tournée vers la consommation, comme la décrit Michel Houellebecq dans ses romans. Dans cette France des petites villes où les principaux employeurs sont l'hôpital ou l'Ehpad, la zone commerciale, le zoo ou le centre d'attraction, les trois quarts des Français nés dans les années 80 et 90 "on déjà fait le pèlerinage à Disneyland". "Ça fait partie de la culture et de l'identité nationale de la France d'après."
Tout comme le kebabs ou les tacos, un plat aujourd'hui très populaire chez les lycéens et les étudiants. Sa recette n'a plus grand chose de mexicain, c'est "le produit de l'hybridation et de la mondialisation". Pour les deux observateurs de notre société, le tacos est même "emblématique de cette France d'après, hybridée et ouverte aux vents de la mondialisation".
C'est sans doute avec cet imaginaire des Trente Glorieuses toujours à l'œuvre dans nos esprits qu'une "certaine catégorie de Français s'est sentie mise à l'écart de cette société de la croissance et de la consommation". L'exemple le plus frappant pour Jean-Laurent Cassely est celui des "émeutes du Nutella". En janvier 2018, des images avaient le tour de la Toile, celles d'émeutes dans des supermarchés où des pots de Nutella avait été bradés de 70 à 80%.
"Ce n'étaient pas des émeutes de la faim mais quelque part des émeutes de la consommation", selon le journaliste, qui explique : "Un produit de marque est un produit très statutaire : pouvoir offrir à ses enfants du Nutella et pas une marque de distributeur c'est un symbole !" Ces émeutes ont eu lieu quelques mois avant les Gilets jaunes. Mouvement d'une France qui se sent mise à l'écart.
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