L’Arc de Triomphe est en train d’être enveloppé dans vingt-cinq mille mètres carrés de toile argentée aux reflets bleus, tenus par trois mille mètres de cordage rouge. Ce dispositif restera en place durant 16 jours, du samedi 18 septembre au dimanche 3 octobre. Pendant les trois week-ends concernés, la place de l’Étoile sera réservée aux piétons pour qu’il puisse admirer l’œuvre en toute tranquillité.
On doit cette performance à Christo, plasticien d’origine bulgare, et sa femme française, Jeanne-Claude. Elle est décédée en 2009 et lui en 2020. Ils sont connus pour avoir réalisé au fil du temps d’extraordinaires opérations en dehors des murs des musées.
Quelques exemples : une dizaine d’îlôts de la baie de Miami entourée de vastes surfaces de tissu rose, des pontons flottants habillés de jaune permettant de marcher sur le lac d’Iseo en Italie et puis des empaquetages, celui du Pont-Neuf à Paris en 1985 ou celui du Bundestag à Berlin en 1995.
Ils souhaitent déplacer notre regard, nous amener à regarder le monde autrement. Sans pour autant s’imposer à nous. Tous ces projets ont été temporaires et ils ont été conçus pour ne pas laisser de traces derrière eux. Il n’y a aucune arrogance dans leur démarche. A l’Arc de triomphe, le chantier s’est interrompu chaque jour à l’heure où la flamme du soldat inconnu est ranimée. Et il en sera ainsi durant les deux semaines « empaquetées ».
Le budget annoncé est de 14 millions d’euros. Mais il faut savoir que cela ne coûte rien au contribuable. L’une des originalités de la démarche de Christo et Jeanne-Claude est que leurs oeuvres monumentales sont entièrement autofinancées par la vente de dessins préparatoires, dessins d’ailleurs très beaux car Christo était un très talentueux dessinateur.
Cette gratuité était au coeur des projet du couple, comme l’a dit un jour Christo: "personne ne peut acheter ces œuvres, personne ne peut les posséder, personne ne peut vendre des billets pour les voir. Nous-mêmes, nous n’en sommes pas propriétaires. Tout notre travail parle de liberté".
Non, peut-être pas. Avant sa mort, Christo a demandé son neveu qui gère sa succession, de mener à bien deux projets. L’arc de triomphe, donc. Et puis un mastaba dans le désert d’Abou Dhabi. Un mastaba, dans l’ancienne Égypte, c’était un monument funéraire trapézoïdal. Celui, rêvé par le couple d’artistes pendant des décennies, serait haut de 150 mètres, composé de 410 000 barils de pétrole. À l’inverse de tous les projets précédents, il aurait vocation à demeurer. Comme un monument à la mémoire d’extraordinaires artistes.
Chaque mardi à 8h45, Guillaume Goubert et Simon de Monicault présentent une exposition ou un événement qui raconte l'histoire de l'art.
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