Le cardinal Louis Raphaël Sako est de passage en France. Exilé depuis plus de 6 mois au Kurdistan irakien, le patriarche de l'Église chaldéenne alerte sur le sort des chrétiens d’Irak. Il s'est confié à Pauline de Torsiac.
Le cardinal Louis Raphaël Sako, c’est le patriarche des chaldéens et le responsable de l’Église chrétienne la plus importante d’Irak. En juillet 2023, il a dû quitter Bagdad, la capitale du pays, pour s’installer à Erbil, dans le Kurdistan irakien.
Le président irakien a décidé arbitrairement de révoquer un décret qui le reconnaissait officiellement comme chef de l’Église chaldéenne. Une décision qui n’est pas sans conséquence. "Je suis loin de mon siège et de mon travail", explique Mgr Sako. "Les chrétiens de Bagdad ont peur. C'était moi qui les défendais. Lorsqu’ils étaient menacés je pouvais aller rencontrer les ministres, pour leur expliquer que les chrétiens n'étaient pas respectés, marginalisés, etc. Maintenant, comment faire ? Moi, je suis loin de cela. Le patriarche ajoute avoir vivement réagi contre ce décret. "Beaucoup de musulmans et d'autres Irakiens m’ont soutenu. J’ai été une cible, la réalité le montre. Après moi, onze autres évêques ont été révoqués.”
Derrière ces révocations du président irakien une milice est à la manœuvre. Pour Mgr Sako le responsable de cette situation, c'est le chef de la Brigade Babylone, Rayan al-Kaldani, surnommé « le Chaldéen ». Il s’affiche aujourd’hui comme le représentant des chrétiens, un statut dénoncé par le patriarche des chaldéens.
Dans cette milice, ils ont de l'argent et des combattants La majorité est chiite. Il y a en réalité très peu de chrétiens.
Mgr Louis Raphaël Sako explique avoir alerté sur le fait que " cette milice ne représente pas les chrétiens et que ces députés-là ne représentent qu'eux-mêmes. Nous, comme chrétiens, nous n'avons pas une milice qui fait du mal un peu à tous et qui est corrompu. Le chef de la milice cherche à se venger de moi et il a fait une coalition avec le parti du président de la République.”
Dans ce contexte politique, les chrétiens d'Irak sont à nouveau fragilisés. Car ils ne sont protégés ni par le pouvoir en place en Irak ni par la communauté internationale. “ Les chrétiens sont une cible. Il n’ont pas de soutien de l’intérieur. Le gouvernement écoute la milice mais pas nous. Et puis avant, la communauté internationale soutenait les chrétiens d’Orient.. Aujourd'hui, ces pays sont laïcs, séculiers". Alors je lance un appel:” Soutenez-nous, ne nous oubliez pas".
Nous sommes une minorité ethnique, religieuse. Nous n'avons pas de droits. Nous sommes une deuxième ou troisième catégorie de citoyens. Cette terre d'Irak, était une terre chrétienne. Mais aujourd'hui, nous sommes une minorité marginale.
Il y a tout juste trois ans, en mars 2021, le pape foulait le sol irakien pour un voyage historique. Le déplacement du pape avait été pour la population une source d’espérance. Le cardinal Sako reconnaît que " Le pape a touché la population. Depuis la visite du pape, les mentalités ont changé. Au sein de la population, il n'y a pas ce discours de haine ou discriminatoire contre les chrétiens. En revanche, la classe politique n'a pas changé." Mgr Sako porte aussi un regard inquiet sur le conflit qui fait rage entre Israël et le Hamas. Une guerre qu’il considère comme absurde. "Le conflit a déjà fait 27 000 morts et il est urgent selon lui d’éduquer à la paix et de respecter les droits fondamentaux de l'être humain."
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