La quatrième édition du festival de cinéma Entendez voir ! se tiendra à Strasbourg du 18 au 26 juin prochain. Pilotée par l'association Vue d'Ensemble, c'est un rendez vous fort et surtout l'occasion de mettre en lumière un métier de l'ombre. Audio descripteur, Benjamin Kling l'exerce au quotidien. Il est également responsable de la programmation de ce festival.
RCF Alsace : Concrètement, un audiodescripteur, c'est quoi son métier surtout? A quoi ça sert et en quoi c'est important? Notamment dans un festival comme Entendez Voir.
Benjamin Kling : Pour faire un résumé simple, c'est un traducteur d'images. L'idée, c'est de raconter un film à un public malvoyant qui n'a pas accès à l'image, bien évidemment. Et donc traduire en mots ce qu'un public voyant peut percevoir. Et donc essayer de le retranscrire de la meilleure manière qui soit pour que le spectateur puisse ressentir le film comme il a été voulu par son réalisateur.
RCF Alsace: Quelles sont les clés les plus importantes de ce métier pour bien retranscrire une image à quelqu'un qui ne peut pas la voir ?
BK : Déjà, de bien ressentir le film, d'essayer de comprendre au mieux les envies du réalisateur. Certains films ne permettent pas de faire plus que de la description pure, c'est à dire qu'un film d'action, par exemple, il faut expliquer ce qu'il se passe. On peut mettre une intention, mais on ne va pas pouvoir tout dire. Un film très bavard, l'idée, c'est déjà de placer les éléments dans l'espace, de placer les éléments d'un point de vue spatio temporel et donc de faire en sorte que le spectateur ait déjà ces informations là qui sont essentielles. C'est les informations qu'on voit : le jour, la nuit, un salon, un jardin. Déjà, ça, c'est l'information essentielle auquel le spectateur n'a pas accès. Derrière ça, si on a du temps, l'idée, c'est d'essayer de trouver le meilleur mot possible pour décrire une situation, une émotion, une émotion qui n'est pas audible, bien évidemment, d'avoir un champ lexical qui va correspondre au film qu'on va décrire. Mais il y a énormément de subtilités qui font que voilà un film bien audio décrit, c'est un film ou l'audiodescription, en fait, ne va pas gêner le spectateur mais va simplement le guider.
RCF Alsace : Peut être là, vous avez parlé des films d'action. C'est quoi ce qui est le plus dur à retranscrire ou en tout cas le plus dur à transmettre à une personne spectatrice?
BK : On se retrouve face à de nombreuses contraintes, évidemment, mais les deux principales, c'est de ne pas assez en dire ou de trop en dire. Une bagarre, c'est évidemment compliqué à décrire dans le sens ou il y a plein de coups de poings, de coups de pieds, une poursuite en voiture, il y a des collisions et autres. C'est de réussir à dire la bonne information au bon moment et dans un laps de temps très très court. Parce qu'évidemment, on n'est pas censé parler sur les bruits, on n'est pas censé parler sur les dialogues. Évidemment, on n'est pas censé parler sur certaines musiques. Là, sur le cas d'une bagarre en particulier, on va dégager quelques éléments sonores qui vont être importants. Un PAF, un ou un cri. Et ce sont ces éléments là qui peuvent, être amenés à poser un problème aux spectateurs déficients visuels. Ensuite, je parlais d'une autre difficulté c'est de trop en dire sur un film contemplatif, on peut avoir l'envie de retranscrire au mieux l'image, mais avec des mots. Mais le cinéma, ce n'est pas uniquement de l'image, c'est aussi du son, et certaines musiques sont suffisamment parlantes pour ne pas avoir besoin de parler dessus. Donc on va placer les choses dans un contexte. On va encore une fois utiliser un champ lexical le plus large possible et correspondant à l'ambiance générale, et essayer de faire des phrases jolies. Mais sans oublier justement la musique. Et on peut avoir parfois effectivement tendance, peut être à trop en dire et à ne pas laisser le spectateur apprécier la musique ou apprécier tout simplement un silence, parce qu'un silence peut être extrêmement éloquent.
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