Deux Français sur cinq estiment que le billet de train est trop élevé. En 2022, le prix du billet TGV était en moyenne de 45 euros. La même année, la SNCF se vantait d’un bénéfice record avoisinant les 2,5 milliards d’euros. Entre le prix du péage ferroviaire, l’augmentation des tarifs de l’électricité, et la stratégie de tarification dynamique propre à la SNCF, comment justifier le prix d’un billet de train ?
Les fêtes de fin d'année sont passées, et peut-être avez-vous déjà tenté de réserver votre billet de train pour les prochaines vacances d’été ? Vous l’avez sans doute remarqué, c’est encore un peu tôt puisque la vente des billets pour la période juillet-août ne doit ouvrir que le mercredi 6 mars. Pour autant, prendre son billet très à l’avance est un très bon moyen de payer son trajet à moindre coût.
La stratégie tarifaire de la SNCF repose sur ce que les spécialistes appellent le “yield management”, la tarification dynamique. Elle consiste à faire évoluer automatiquement le prix de manière en fonction de critères comme l’offre et la demande, le prix fixé par la concurrence ou même l'anticipation. “Quand on peut, il faut réserver le plus tôt possible. Plus vous achetez votre billet tard avant votre date de départ, et plus le train est plein, plus vous allez payer plein pot”, fait savoir Michel Quidort, président de la fédération nationale des associations d’usagers des transports.
Cette pratique du yield management est presque “culturel”, selon Patricia Perennes, économiste, spécialiste de la question du transport ferroviaire. “Les prix varient moins dans les autres pays. Si le TGV est plein, ce n’est pas grave, on reste debout. En France, c’est comme l’avion, on est assis”, ajoute-t-elle. En d’autres termes, le critère du remplissage n’en est pas un chez nos voisins européens. “Il n’y a pas de place assise garantie. Vous ne limitez pas le nombre de personnes qui peuvent prendre le train et donc limitez les possibilités de yield management”.
Si le prix de nos billets repose sur une stratégie de tarification dynamique automatique, les associations estiment aussi que 40 % du prix du billet est alloué au paiement du péage ferroviaire. Un droit de péage assez méconnu qui contribue fortement à augmenter notre billet de train.
”La France est parmi, dans les pays européens, le pays qui a les péages les plus élevés”, souffle Michel Quidord. Aujourd’hui, le prix d’un péage français entre Lyon et Paris tourne autour des 37 euros le kilomètre. En comparaison, en Italie, cette somme tourne autour des six euros. “L’Italie a décidé qu’il fallait développer la clientèle sur les chemins de fer. Et prend à sa charge une partie du coût de l'infrastructure. Les coûts ont ipso facto diminué pour le voyageur”, analyse celui qui est aussi président de la Fédération Européenne des Voyageurs.
En France, les prix risquent encore d’augmenter puisque l'Autorité de Régulation des Transports vient d'autoriser la SNCF d’augmenter ses péages de 7 % en 2024. “On va avoir des prix des billets qui vont continuer à augmenter. C’est une décision politique”, déplore Michel Quidord.
Les prix des billets de train, une décision politique ? Quoi qu’il en soit, il faut différencier les prix des TGV, des prix du TER. Les TGV suivent un objectif commercial de profit, avec l’intégralité des charges comprises dans le prix affiché du billet. Pour ce qui est du TER, ce sont les régions qui prennent une partie des coûts, expliquant la différence de prix parfois très importante entre TGV et TER. Les bénéfices engrangés par le TGV permettent de maintenir en vie les petites lignes TER, et Intercités, moins empruntés, mais considérés comme un service public régional.
“On ne peut pas dire que le train est trop cher car s’il était trop cher, les trains seraient vides et personne n'achèterait. Or aujourd'hui, les trains sont pleins”, ne peut que constater Patricia Perennes. En revanche, “pour certaines catégories de populations à certaines dates - je pense aux familles pendant les vacances scolaires - c’est un budget qui est énorme”, admet-elle. “La SNCF sait qu’elle va trouver des gens pour acheter des billets chers comme des familles aisées ou des clientèles professionnelles. Mais une famille de quatre enfants, un vendredi 22 décembre, ce n’est pas possible”, estime-t-elle. “Ça pose une vraie question d’accessibilité au train pour toutes les populations en France”.
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