Bus carbonisés, mobilier urbain incendié, scènes de pillages : deux jours après la mort du jeune Nahel à Nanterre, la fureur ne retombe pas dans les banlieues. Aucune grande ville française n'est épargnée par ce déchaînement de violence aux airs d'insurrection.
"Une rare violence". Ce sont les mots de Gérald Darmanin ce vendredi matin sur Twitter. Après une nouvelle nuit de chaos partout en France, le ministre de l'Intérieur fait également état de "667 interpellations" dans la nuit, un bilan plus de quatre fois supérieur à celui de la veille. Emmanuel Macron doit présider à 13 heures une deuxième cellule de crise interministérielle. Après la mort mardi matin de Nahel M., 17 ans, abattu par un policier à la suite d'un refus d'obtempérer, la fièvre s'est emparée de Nanterre avant de s'étendre progressivement à toutes les cités de France. Paris, Lyon, Marseille, Nantes mais aussi Amiens, Clermont-Ferrand ou Montargis pour ne citer qu'elles, aucune ville n'est épargnée par une violence qui rappelle étrangement les émeutes de 2005.
"Les situations sont très différentes, insiste Arnaud de Carmantrand, directeur général du Rocher Oasis des Cités, association implantée dans neuf quartiers urbains en difficulté, de Marseille à Bondy en passant par Nîmes, Toulon ou Grenoble entre autres. On parle de banlieues, on parle de cités, mais il ne faut pas généraliser", appuie-t-il, soulignant qu'il existe des "réalités très différentes" selon les quartiers. Il reconnaît toutefois que "des choses résonnent ensemble". Entre saccages de mairies et tirs de mortier d'artifice, elles résonnent fort ces dernières nuits.
Que les symboles de l'État, comme des mairies ou des commissariats, soient attaqués révèle l'ampleur du phénomène, qui sans aucun doute dépasse l'histoire du jeune Nahel. Le malaise est patent et montre le caractère insoluble de la ghettoïsation de certains quartiers depuis cinquante ans. Arnaud de Carmantrand tient à rappeler que le sujet de la fracture sociale liée à l'immigration remonte à plusieurs décennies. "Le Rocher est né à la fin des années 1990, à la suite d'une campagne présidentielle, celle de Jacques Chirac, qui déjà parlait de fracture sociale. C'était en 1995, on en parlait déjà", remarque-t-il.
Comment vit-on baigné d'amour pour que ces personnes retrouvent la dignité ?
Malgré ce sombre tableau, le président du Rocher veut garder espoir. "Le sujet, c'est : comment continue-t-on à aller là-bas, à rencontrer ces personnes ?", estime-t-il, relevant le "besoin d'amour" des habitants de ces quartiers. "Comment vit-on baigné d'amour pour que ces personnes retrouvent la dignité ?", interroge-t-il encore. Il faudrait avant tout, à son sens, "que les lieux soient plus beaux, que les transports en commun fonctionnent mieux".
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