Lundi dernier, la ministre des Armées française a signé à Luxembourg avec huit autres pays le lancement de l’initiative européenne d’intervention. C'est, en quelque sorte, un premier pas vers ce qu’Emmanuel Macron avait appelé l'"avant-garde éclairée" dans son discours de la Sorbonne.
Le président français parlait alors d’un groupe de pays, qui, dans un domaine spécifique, pourraient s’unir et avancer plus rapidement et efficacement. On le voit sur de nombreux sujets, la migration aujourd’hui, le risque est la fragmentation ou la différentiation voire l’immobilisme. Aussi, quelques états peuvent créer des dynamiques. Lundi, neuf pays européens, l’Allemagne, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, l’Estonie, les Pays-Bas, le Portugal et le Royaume-Uni (qui ne part pas donc de tout) se sont engagés à harmoniser leurs méthodes de travail pour faire face aux "nouvelles menaces dites hybrides", allant des catastrophes naturelles aux attentats terroristes. Ce sont des réponses opérationnelles. C’est une forme de consortium régulé par les États, dont le but est d’accélérer les prises de décisions pour agir dans des situations d’urgence.
Plus qu’une indépendance qui ne pourrait être une réalité qu’après des décennies, c’est d’une réflexion stratégique autonome dont nous voyons les prémices. En créant cette possibilité d’intervention, les États ne concurrencent pas l’OTAN, ni même les Nations unies : c’est un complément. Les pays participants conservent leur liberté de décision nationale et ne sont pas contraints à participer à une opération. Cela vise donc plutôt à créer des habitudes de travail communes qu’à constituer de nouvelles alliances militaires. Depuis deux ans les progrès sont réels au niveau européen : budgets communs pour la recherche et le développement, projet d’outils et de programmes dont la direction est assurée par un État : le char du futur est piloté par l’Allemagne quand le programme d’un avion de combat est conduit par la France.
L’Allemagne, justement, est réticente à s’engager en matière de défense, et le Royaume-Uni, sur le point de quitter l’UE, font partie de cette initiative. Nous ne sommes plus dans l’après-guerre de 45 et le XXIe siècle nous montre que pour notre sécurité il ne faut compter que sur nous-mêmes. L’accord de lundi est passé inaperçu, mais c’est une ambition fondamentale : agir sans attendre le feu vert de l’ensemble de nos partenaires. C’est bien entendu possible aujourd’hui, au Mali par exemple. Mais dans "initiative européenne d’intervention" chaque mot compte et a son importance : pour assurer la sécurité continentale, que ceux qui veulent agir puisse le faire. Par la force des choses, c’est un début de révolution stratégique.
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !