'Prévenir la radicalisation des jeunes': le titre du nouvel essai (Ed. Salvator) du père Jean-Marie Petitclerc se veut à contre-courant des l’échec des centres de déradicalisation par le gouvernement. Alors que Le Figaro comptait près de 2000 mineurs sous emprise de Daesch en 2016, l'éducateur salésien revient sur l'urgence d'accompagner les jeunes de manière personnalisée et constructive.
Jean-Marie Petitclerc n’aime pas le mot 'déradicalisation'. En effet explique le prêtre, 'c’est étrange de considérer ce travail qui consiste à détecter, incarcérer et déradicaliser comme si c’était un processus lambda.' Pour lui, il ne s’agit pas de déradicaliser, mais 'd’aider et accompagner un jeune qui a basculé dans une illusion mortifère pour les remettre sur le chemin de la vie.'
Le choix de mineurs volontaires pour participer au djihad interroge le père Petitclerc. Il y voit plusieurs facteurs. Le premier est d’ordre relationnel. 'Ces jeunes sont en quête de reconnaissance et s’isolent. Ils sont donc appâtés par des gens qui se présentent comme leurs amis et leur disent combien ils ont de la valeur, et qu’on a besoin d’eux', estime le père Petitclerc.
Le père Petitclerc fustige aussi la politique actuelle de la ville, 'fondée sur zonage'. 'Dans les quartiers de banlieue, la République n’est pas à la hauteur des attentes des jeunes.' Pour le prêtre éducateur, il est dur pour un jeune au summum de sa force de se retrouver condamné à l’inactivité, avec le chômage comme seule ligne d’horizon. 'Ils ont envie de faire quelque chose d’intéressant de leur vie. La véritable question que je pose ainsi à nos gouvernements est: qu’est-ce qu’on leur propose?'
Le 14 novembre à Tourcoing, Emmanuel Macron a annoncé la création d’une quinzaine de plans de lutte contre la radicalisation début 2018. Rappelanttentatives de déradicalisation multipliées mis en place sous le quinquennat précédent, le père Petitclerc s’insurge: 'Il est ahurissant de nous faire croire que les jeunes sous emprise vont s’inscrire d’eux-mêmes. Il faut des moyens pour les accompagner, et non des grandes causeries sur la citoyenneté républicaine.'
Autre lieu de tension identifié par Jean-Marie Petitclerc: l’école. 'Il faudrait permettre aux élèves qui souhaitent apprendre l’arabe de le faire à l’école. Pour l’instant, la République renvoient 1200 gamins à l’école coranique où ils reçoivent cet enseignement.' D’après lui, il faudrait apprendre l’arabe avec d’autres textes que le Coran, et que l’école 'puisse être ce lieu de dialogue et d’esprit critique.' Il souligne également la nécessité d’un accompagnement personnalisé, car les 'familles sont décalées face au phénomène un peu nouveau'.
'La priorité, c’est l’éducation de la mobilité pour vivre des expériences ailleurs que dans le même quartier.' Le gouvernement fournit aux éducateurs un livret de prévention qui ne suffit pas d’après Jean-Marie Petitclerc. 'Souvent, nous faisons un travail de rue car il faut aller à la pêche des jeunes radicalisés. Il faut donc se donner des moyens pour réinvestir le travail social de proximité.'
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