Bien administrée, la parole peut modifier le cours des événements en les éclairant d’un jour nouveau. Confrontés à de fortes turbulences sociales, le Président de la République va donc tenter – à deux reprises cette semaine dans les médias - de corriger le tir.
Jusqu’ici, assumant une certaine distance avec les journalistes pour marquer une rupture avec ses prédécesseurs à l’Elysée, Emmanuel Macron pratiquait une sorte de diète déclarative. Son action devait suffire à éclairer tout à la fois : l’opinion et l’horizon.
Quelques grognes plus tard - chez les retraités, à la SNCF, dans les universités ou les EPHAD – le chef de l’Etat a ressenti la nécessité de revenir dans l’arène. Il y a sans doute peu de surprises à attendre de toutes ces interviews. Jeudi midi sur TF1 depuis le petit village normand de Berd’huis dans l’Orne, le chef de l’Etat s’adressera aux retraités et au monde rural. Il tentera de les rassurer en cherchant à convaincre de la bienveillance de l’Etat. La même démonstration se déploiera dimanche sur BFMTV,RMC et Mediapart à l’adresse d’un public plus jeune et plus urbain.
C’est donc une contre-offensive de grande ampleur, qui a été rapidement décidée. Sur le plan formel, l’exercice sera sans doute moins classique que lors du 20H sur TF1 en octobre, sans doute plus exigent que l’entretien de décembre sur France 2. Il s’agira là de convaincre du bien fondé des différents chantiers ouverts ces derniers mois et qui provoquent des crispations dans le pays : lundi la grève à la SNCF restait très suivie et le trafic très perturbé alors que cette réforme arrivait en discussion à l’Assemblée nationale. Sauf à risquer l’impasse, la fermeté affichée sur ce sujet par Edouard Philippe imposait que le Président l’accompagne d’explications pour élargir les soutiens à la réforme dans l’opinion. Le chef de l’Etat, contre ses souhaits, ne pouvait plus rester en retrait.
Emmanuel Macron doit désormais convaincre que contre les apparences et au prix de solides réorientations de ses choix, il pouvait être ce président « et de droite et de gauche » qu’il avait promis d’incarner lors de la campagne présidentielle. Jusqu’ici le déséquilibre est clairement perçu par les Français. Si Emmanuel Macron n’est pas que le président des riches - l’affirmer serait très réducteur -, il l’est quand même beaucoup. Or si cette image devait s’installer encore plus, elle cristallisait les oppositions et ses marges de manœuvre pour la réforme s’en trouveraient réduites.
Logiquement au nom du projet qu’il prétend porter et tactiquement pour conserver l’initiative, Emmanuel Macron doit maintenant donner un nouvel éclairage social à son action. En parole, il va le faire à la télévision. Mais tout cela devra se traduire assez vite en action. Il serait efficace de rééquilibrer.
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