Le professeur Michaël Peyromaure a une idée bien précise de la direction que devrait prendre l'hôpital public en France. C'est ce qu'il explique dans son livre Hôpital, ce qu'on ne vous a jamais dit, paru aux éditions Albin Michel. Il faut dire qu'il connaît très bien son sujet, il est chef du service urologie de l'hôpital Cochin à Paris. Et selon lui, si l'hôpital public est en grande tension, il ne s'est pas effondré. "On s’attendait à ce que l’hôpital s’effondre à la moindre difficulté. Mais il a retrouvé ses fondamentaux. Les soignants sont revenus au premier plan" explique-t-il. La crise sanitaire n'a fait qu'aggraver et souligner les problèmes que rencontre l'hôpital selon professeur Peyromaure : "l’hôpital est sur une pente douce depuis de nombreuses années. Il est très dangereux de penser qu’on va rester dans une situation pareille".
La solution serait donc de remettre en avant le personnel soignant, aujourd'hui soumis à une forte administration. Un personnel non-médical qui constitute environ 35% de tout le personnel de l'hôpital en France. Michaël Peyromaure a le sentiment que l'on renforce le pouvoir administratif vis-à-vis des soignants : "on a écarté les médecins des décisions du pouvoir et mis en place une administration très puissante avec le but affirmé de réduire le déficit."
Cela a créé une véritable désillusion pour les soignants qui ont perdu leur "sentiment d'appartenance à une équipe qui fonctionne", selon Michaël Peyromaure. Aussi, il constate depuis des années que les médecins, dont il fait partie, font face à des tensions avec les patients. "Au fil des décénnies on a donné de plus en plus de prestations aux patients, ils ont acquis des droits mais ils ne doivent rien en retour. Ça génère beaucoup de dysfonctionnements", estime-t-il, avant de conclure assez gravement : "le délitement de l’hôpital est multifactoriel et tout le monde a sa responsabilité".
Face à ce sentiment que les patients ont perdu la notion de service public, le professeur estime qu'il faudrait réduire le périmètre de l'Etat providence, qui a conduit à la sécurité sociale que nous connaissons aujourd'hui. Michaël Peyromaure n'hésite pas à la critiquer : "on est allés trop loin dans la générosité". Peut-être les patients devraient-ils payer un peu, s'interroge le médecin, pour responsabiliser les patients.
Mais le choix le plus urgent selon Michaël Peyromaure serait de "faire confiance aux soignants et de restaurer l’autonomie des services". Toutefois un sentiment pessimiste l'envahit chaque jour, "mais je ne peux pas m’empêcher d’avoir espoir. Ça n’est pas trop tard, l’hôpital fonctionne encore. Tout se dégrade mais ça marche encore", conclut le professeur.
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