À chaque jour, un nouveau nom... Depuis le début de la semaine, Emmanuel Macron a envisagé de nombreuses hypothèses pour Matignon : de Xavier Bertrand à Bernard Cazeneuve, en passant par Thierry Beaudet, ou encore Jean-Louis Borloo et David Lisnard. L’Élysée a finalement annoncé hier la nomination de Michel Barnier, membre du parti Les Républicains, dont la personnalité semble moins clivante. Philippe Moreau-Chevrolet, expert en communication politique, et Luc Rouban, directeur de recherche au CNRS, analysent la nomination de l’ancien commissaire européen.
Après 59 jours d’attente, de rumeurs et de négociations, Emmanuel Macron a nommé Michel Barnier Premier ministre. À 73 ans, l’ancien commissaire européen marque une rupture dans la politique de la Macronie en succédant à Gabriel Attal.
"Le Président s’est assuré que le Premier ministre et le gouvernement à venir réuniraient les conditions pour être les plus stables possibles et donner les meilleures chances de rassembler le plus largement", a annoncé le communiqué de presse de l’Élysée le jeudi 5 septembre. Après deux mois d’hésitation, il est étrange, selon Philippe Moreau-Chevrolet, de communiquer au conditionnel. Il faudrait au contraire faire preuve de détermination. L’expert en communication explique ainsi que Michel Barnier est sous une double tutelle : "Il est nommé par le président et il a besoin du Rassemblement national pour pouvoir gouverner. Cela semble compliqué pour quelqu’un qui n’est pas proche du Rassemblement national. Michel Barnier est issu d’une droite gaulliste, sociale, avec des valeurs chrétiennes, bien qu’il ait également des positions assez dures sur l’immigration."
Il est nommé par le président et il a besoin du Rassemblement national pour pouvoir gouverner. Cela semble compliqué pour quelqu’un qui n’est pas proche du Rassemblement national. Michel Barnier est issu d’une droite gaulliste, sociale, avec des valeurs chrétiennes, bien qu’il ait également des positions assez dures sur l’immigration.
Michel Barnier, à 73 ans, vient de la droite et possède une grande expérience européenne. Il pourrait être le trait d’union entre la gauche modérée, la droite et ce qui reste de la majorité présidentielle, analyse Philippe Moreau-Chevrolet. Cependant, "il y a un fossé sur l'Europe avec le Rassemblement national. Cela pourrait les conduire à voter la censure du gouvernement et ainsi provoquer la nécessité d’une présidentielle anticipée."
Les critères de sélection d’Emmanuel Macron, d'après Luc Rouban, étaient qu’il ne revienne pas sur la réforme des retraites, qu’il puisse diriger un gouvernement stable et qu’il ne puisse pas se servir de Matignon pour une élection présidentielle. "Son âge est ici un atout qui permet de penser qu’il ne se présentera pas, ce qui permet à Emmanuel Macron de rester le maître des horloges quant à sa succession."
Son âge est ici un atout qui permet de penser qu’il ne se présentera pas, ce qui permet à Emmanuel Macron de rester le maître des horloges quant à sa succession.
Ce choix marque cependant une rupture avec le macronisme, selon Philippe Moreau-Chevrolet. "On passe de Gabriel Attal, plus jeune ministre de France, pur produit de la Macronie, avec ses costumes cintrés, jeune et innovant, qui veut aller vite ; à Michel Barnier, avec ses costumes amples, ses lunettes fumées, un peu chiraquien, et sa bonhomie. On passe d’un style à l’autre." L’expert en communication politique souligne que Michel Barnier a plutôt bien été accueilli par les partenaires sociaux qui souhaitent dialoguer, mais il garde cependant une épée de Damoclès au-dessus de la tête, "une dissolution que tout le monde lui prédit et une présidentielle anticipée."
On passe de Gabriel Attal, plus jeune ministre de France, pur produit de la Macronie, avec ses costumes cintrés, jeune et innovant, qui veut aller vite ; à Michel Barnier, avec ses costumes amples, ses lunettes fumées, un peu chiraquien, et sa bonhomie. On passe d’un style à l’autre.
Michel Barnier a la volonté de reprendre en main les relations avec les Français, affirme Luc Rouban. Il va pour cela reprendre contact avec les élus locaux, dont les relations avec le pouvoir se sont détériorées depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017. Le directeur de recherche du CNRS rappelle que cela fait partie de la fibre du parti Les Républicains, qui possède des racines politiques profondes dans les territoires, contrairement à la Macronie. "C’est le retour de la vieille garde et la lente agonie du macronisme. C’est la fin d’une formule politique."
C’est le retour de la vieille garde et la lente agonie du macronisme. C’est la fin d’une formule politique.
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