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Nef

RCF,  - Modifié le 10 avril 2018
C’est dans la nef du Collège des Bernardins qu’a eu lieu hier cette rencontre entre des représentants de l'Eglise et de l'Etat, et que sont donnés des discours importants.
Pascal HausherrPascal Hausherr

On ne va pas bien sûr analyser ces discours, mais en revanche, on va s’intéresser au mot « nef », qui est passionnant. Il est en effet merveilleusement lié à deux domaines, celui de la mer et des Océans, et celui de nos églises. Quelle en est alors l’origine première ? Eh bien si on veut être précis et remonter le plus loin possible, compte tenu de l’état de nos connaissances, il nous faut nous situer avant même le latin et le grec, à cette langue indoeuropéenne qui est à la source de la plupart de nos langues européenne. On y trouve en effet la racine, qu’on a reconstituée, naus, désignant une embarcation, à laquelle va se rattacher le latin « navis » navire. Et de fait cette famille gréco-latine a donné, venus du grec nombre de mots liés à la navigation et, pour le latin, nombre de mots désignant des bateaux et objets qui en ont la forme.

Et la famille de mots résultant du grec et du latin est énorme, qu’on pense par exemple à tout ce que la racine  « -naute » a donné, jusqu’à aujourd’hui, les argonautes, nautique, et récemment les cybernautes, les internautes, et je passe sur le mot nausée, qui n’est autre au départ que le mal de mer, du latin « nausea ». Dans un autre domaine, il y a tout ce qui concerne le verbe « navigare » qui a donné « naviguer », mais aussi « nager ». Enfin au XIe siècle, en 1050, en partant du latin « navis », bateau, était attestée la « nef », désignant plus particulièrement au Moyen Âge un grand navire à voiles. Sur les armes de Paris figure d’ailleurs une nef avec cette devise latine. « Fluctuat nec mergitur », en gros le navire, la nef « est battue par les flots mais ne sombre jamais ».

Au XIXe siècle, l’officier de marine Pierre Loti, évoque encore ces fameuses nefs : « Nous frôlions au passage, écrit-il dans Madame Chrysanthème, des peuplades de grands jonques, avec leur poupes compliquées qui se relevaient en château, comme celles des nefs du Moyen Âge. » Belle image en effet.

Et puis, par analogie de forme, au XIIe siècle, un nouveau sens est arrivé, pour évoquer d’ailleurs ce qu’on appelle aussi le « vaisseau d’une église », c’est-à-dire la partie comprise entre le portail et le chœur dans le sens longitudinal, et où se tiennent les fidèles. Et on fait état alors de travées, c’est-à-dire des portions de voûte comprises entre deux colonnes, et voici venir de grandes nefs qui ne voguent pas mais où souffle l’esprit. Ce qui nous ramène à la superbe nef des Bernardins. Et puis j’allais l’oublier, en route pour le ciel, il y aussi bien sûr les aéronefs. Quel mot magnifique !    
 

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