Y a-t-il un "réseau" au sein des Missions étrangères de Paris, et une culture du secret propice aux agressions sexuelles ? Les faits révélés ce mardi, après une importante enquête, soulèvent la question. Le supérieur des MEP, le Père Vincent Sénéchal, réagit à ces révélations en exclusivité sur RCF.
La police enquête actuellement sur trois prêtres issus des Missions étrangères de Paris (MEP) pour des faits présumés d'agressions sexuelles, dont l’ancien supérieur général des MEP aujourd’hui évêque de La Rochelle, Mgr Georges Colomb. L’enquête dévoilée ce mardi par La Croix, La Vie et Famille chrétienne soulève l'hypothèse d'un réseau, d'un système de transgression et de pratiques sexuelles, contraires à la loi de l’Église - ce que démentent également les mis en cause. En exclusivité sur RCF, le Père Vincent Sénéchal, actuel supérieur des MEP répond à Étienne Pépin et réagit aux révélations parues dans la presse.
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C’est une affaire complexe qui secoue les Missions étrangères de Paris, société de prêtres qui envoie des missionnaires en Asie depuis le XVIIe siècle. Il est question de manquements au célibat mais aussi de violences sexuelles. L’enquête pointe du doigt des erreurs de discernement quant aux profils des prêtres, mais aussi des problèmes de gouvernance.
Il est enfin question d’une "culture du secret" et d’un "système" propices aux abus. "Aujourd’hui je peux vous assurer qu’il n’y a pas de réseau au sein des Missions étrangères", répond Vincent Sénéchal. "Si vous voulez, des prêtres qui manquent à leur célibat, ça ne fait pas un réseau. Nous sommes 150 prêtres. Il faut analyser à tête reposée ce qui nous arrive..."
Cela faisait plusieurs années que des rumeurs circulaient au sujet des Missions étrangères de Paris. S'il se dit "affecté" par ce qui arrive, le Père Vincent Sénéchal admet que ce travail de vérité est "douloureux" et "nécessaire". "Depuis que nous avançons avec la nouvelle équipe, élue en juillet 2022, nous savions que le moment de vérité devait se faire, que c’était une étape nécessaire, d’une certaine manière."
Le supérieur des MEP a tenu à exprimer sur RCF sa pensée pour "les personnes plaignantes" et tous ceux que les révélations ont blessés. "Je pense aussi à mes confrères les prêtres des MEP, les volontaires, les salariés qui travaillent ici et les bénévoles, en particulier tous les jeunes." Depuis 2022 en effet il existe au sein des MEP un service de volontariat, fondé par Mgr Georges Colomb. Il permet notamment à des jeunes de partir en mission en Asie, en tant que volontaire de solidarité internationale (VSI).
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"Pour nous c’est très clair, explique le Père Vincent Sénéchal, si un prêtre manque à son célibat, la première fois on voit avec lui. S’il s’amande, il a une seconde chance. Mais s’il y a récidive, s’il y a persistance, s’il y a récurrence, là il faut réfléchir… Ça peut aller jusqu’au renvoi." Parmi les faits récemment révélés, certains relèvent de la justice canonique et certains de la justice pénale, comme les agressions sexuelles. "Il y a une ligne blanche très claire, c’est lorsque l’on tombe dans les délits et les crimes, alors là nous sommes du côté de la loi pénale. Et là, nous n’hésitons pas à faire de signalement."
Ordonné prêtre en 2001, le Père Vincent Sénéchal a été envoyé en mission au Cambodge, avant d’assurer l’intérim à la tête des MEP en juillet 2021 après le départ de Gilles Reithinger, nommé évêque auxiliaire de Strasbourg (et qui fait l'objet d'une enquête canonique). Vincent Sénéchal a ensuite été élu supérieur général des MEP le 18 juillet 2022, pour un mandat de six ans. Il fait donc partie de ces supérieurs de communautés sensibilisés à la question. Il était en effet déjà en responsabilité quand a été publié le rapport de la Ciase. Ainsi, depuis qu’il a été élu, il assure avoir appliqué ce qui est prévu par "les protocoles CEF et Corref". "Depuis ma prise de responsabilité, chaque fois que des informations graves sont remontées, elles sont été écoutées, nous écoutons le plaignant, nous écoutons le mis en cause, nous nous faisons conseiller par des canonistes ou par des personnes compétentes et nous prenons nos responsabilités."
Le 11 mai dernier, les Missions étrangères de Paris ont annoncé avoir fait appel au cabinet GCPS Consulting pour mener une enquête interne. Et "faire la lumière sur des abus commis par des membres des MEP entre 1950 et 2023, en France comme dans leurs pays de mission". "Nous voulons avoir une photographie de la situation en ce qui concerne la question des violences sexuelles", explique le Père Sénéchal, qui prévient : "Ça va être un long travail parce que c’est assez compliqué, nous sommes dans 14 pays, dans des contextes interculturels extrêmement forts, et nous sommes extrêmement imbriqués dans les Églises locales." Les résultats de l’audit devraient être connus avant la fin de l’année 2023. "Nous en espérons beaucoup de fruits pour pouvoir renforcer ce qui existe déjà en termes de protection", conclut le supérieur des MEP.
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