C'est une profession encore assez méconnue : les biographes hospitaliers. Mais une profession dont la profondeur et l'utilité émergent, et qui a valu à la journaliste Lola Dufeu - qui en a fait un portrait magnifique dans Ouest France - d'être récompensée cette semaine par le jury du prix Varennes.
Tout est parti de Valéria Milewski. En 2000, après un licenciement, elle décide de prendre le temps de s’interroger sur ce qu’elle aime vraiment : Ecouter. Ecrire. Les histoires. bref, les gens. Le lendemain, elle se réveille habitée par cette évidence: « pourquoi ne pas proposer à des personnes gravement malades de se délester en transmettant, pour s’apaiser ». Cette intuition ne l’a plus quittée, elle devient bénévole avec l’association JAMALV, Jusqu'À la Mort Accompagner La Vie. Et à force de rencontres et de providence, des soignants qui ont cru en son projet l’embauchent en soins palliatifs. Elle fonde alors son association « Passeurs de mots et d’histoire ».
Avant l’écriture, tout se passe autour de deux mots : rencontre et écoute. Et entre deux personnes : le biographe et celui qui se confie. Et ce qui se passe est beau. La personne malade se retrouve avec ce projet qui remet du sel et du sens dans sa vie, sa fin vie. Qui restaure son sentiment de dignité s’il a été fragilisé par la maladie. Elle dépose ce qui a le plus compté dans sa vie. Le merveilleux. Le tragique. Ce qu’elle veut léguer, transmettre. Et si cela fait émerger un sentiment de gratitude, mais quel apaisement !
C’est le seul soin où le patient redevient l’homme ou la femme qu’il est
C'est le sentiment d’une vie accomplie. Et c'est antalgique, ça soulage la souffrance morale. Une biographe explique : « C'est le seul soin où le patient redevient l’homme ou la femme qu'il est. Ce n'est plus un malade. C'est une personne ». Je trouve ça juste beau. C’est revoir l’unique en chacun, en fin de vie, et chacun comme unique, jusqu’à la fin.
C'est aussi un soin pour les proches. Ce manuscrit sera offert à la famille, aux amis. Ca créé un lien durable entre celui qui meurt et les vivants. Et il y a beaucoup de soin mis aussi dans le livre, l’objet lui-même, du beau papier, une belle reliure… C'est fort pour les proches de le découvrir. Mais d’expérience, les biographes ne le remettent pas trop vite après le décès, sinon le livre s’associe trop à la perte, à la souffrance vive. Il est remis plus tard, en s’adaptant à chaque famille, à chaque besoin.
Ce qui m’a le plus émue, c’est de découvrir le besoin de laisser des pages blanches, à la fin. De ne pas mettre un point final, qui serait trop dur à vivre. Ces pages blanches pourront, plus tard, accueillir petits mots, photos, dessins des petits enfants. Ou rester blanches, parce que sacrées…
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