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Retour sur l'affaire Matzneff

RCF,  - Modifié le 8 janvier 2020
A l'occasion de la sortie du livre de Vanessa Springora, Le Consentement, retour sur une affaire qui cache une étrange tolérance du milieu littéraire
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Le très beau livre de Vanessa Springora, Le Consentement, a fait éclater le secret de polichinelle concernant les mœurs pédocriminelles de l’écrivain Gabriel Matzneff. Depuis des années, tout un petit milieu littéraire savait ce que l’écrivain ne cachait pas et dont il se vantait dans ses livres et sur les plateaux de télévision : il aimait coucher avec Les moins de seize ans, pour reprendre le titre d’un de ses ouvrages, comme avec Vanessa, à quatorze ans, sans parler des petits prostitués philippins de dix ou onze ans. L’affaire est entre les mains de la justice puisque le parquet de Paris a ouvert une enquête. Je ne tirerai donc pas sur une ambulance.

Je m’interroge en revanche sur ceux qui continuent d’une manière ou d’une autre à le soutenir, en employant des arguments aussi dénués les uns les autres de sens commun. Il y a d’abord ceux qui se drapent dans leur dignité en invoquant la grandeur de l’artiste. N’ayant jamais lu une ligne de Matzneff, je n’ai aucune idée de la qualité de son œuvre, mais je rappellerai au passage qu’ici il s’agit de ses actes, et, il est vrai, le fait qu’il les ait mis en scène dans des livres grâce auxquels il a reçu célébrité et droits d’auteurs, ce qui est une circonstance aggravante.

Un autre argument est de de crier à la chasse aux sorcières. Certes, le tir groupé est spectaculaire et sans doute certains embouchent-ils trompette opportunément. Mais enfin, s’agit-il de chasse aux sorcières quand quelqu’un a pu, protégé par son auréole d’artiste, se livrer impunément à de tels actes des années durant ? C’est plutôt cette étrange tolérance qu’il faudrait interroger.

A cela, on répond parfois, à bout d’argument : « c’était l’époque ». Oui, c’est exact, cette impunité révèle bien une époque. Mais pas tant une époque récente marquée par l’évolution des mœurs. On ne le dira jamais assez, la pédocriminalité n’est pas d’abord une affaire de sexualité, mais avant tout une œuvre d’emprise et de destruction de la dignité d’une personne humaine. Ce dont il s’agit remonte à bien plus loin, et c’est le déni généralisé à propos des ravages de la pédocriminalité. Gide et Montherlant vivaient avant 68 que je sache !

J’ai lu ici ou là enfin, et c’était l’argument le plus insaisissable, que certains avaient le courage de défendre Matzneff par amitié. Pour ma part, ayant un culte particulier pour l’amitié, je ne me vois pas la donner à un pédocriminel, et j’estime que cet argument est infondé. Peut-être suis-je idéaliste ? Au fait, qu’en pense Daniel Cohn-Bendit ? On l’entend peu ces jours-ci…
 
 

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