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Romain Pasquier, politologue : "on n'a jamais eu un second tour aussi indécis en Bretagne"

Un article rédigé par Julie Rolland - RCF Bretagne, le 1 juillet 2024 - Modifié le 1 juillet 2024
GRAND INVITE REGIONALRomain Pasquier : "on n'a jamais eu un second tour aussi indécis en Bretagne"

À l'issue du premier tour des élections législatives en Bretagne, la majorité présidentielle Ensemble a recueilli le plus de suffrages dans la région mais talonnée de près par le Nouveau Front Populaire. Pour la première fois, le Rassemblement national devient la troisième force en Bretagne.

Décryptage de Romain Pasquier, directeur de recherche au CNRS et titulaire de la chaire "Territoires et mutations de l'action publique" à Sciences Po Rennes.

En Bretagne, seul un député, le socialiste Mickaël Bouloux, a été élu dès le premier tour ce dimanche. ©Julie RollandEn Bretagne, seul un député, le socialiste Mickaël Bouloux, a été élu dès le premier tour ce dimanche. ©Julie Rolland

Pour ce scrutin législatif, les Bretons, avec un taux de participation de plus de 70%, n'ont pas dérogé à leur habitude d'être fidèles aux rendez-vous électoraux. "Les Bretons ont répondu présents", analyse Romain Pasquier, rappelant "un engagement démocratique supérieur à la moyenne nationale", dans un contexte particulier où la dissolution de l'Assemblée nationale a rebattu les cartes et mis de nouveaux enjeux sur la table.

Le RN, 3e bloc en Bretagne

Contrairement au reste du pays, les Bretons n'ont placé le Rassemblement national qu'en troisième position après ce premier tour. Reste que la poussée du parti d'extrême droite est bien réelle dans la région avec cinq circonscriptions où il est arrivé en tête dimanche soir (la 4e circonscription d'Ille-et-Vilaine, la 3e et la 6e du Morbihan, la 8e du Finistère et la 4e des Côtes d'Armor). "Le RN s'est imposé comme le troisième bloc en Bretagne, ce qu'il n'avait pas réussi à faire jusqu'à présent, une page se tourne en Bretagne", explique le politologue.

Le parti à la flamme s'alignera donc le 7 juillet prochain dans 26 circonscriptions bretonnes. Sans certitude pour autant de l'emporter, selon Romain Pasquier : "Est-ce qu'il va l'emporter? C'est peu probable à mon avis. Il va sans doute y avoir des reports de voix relativement disciplinés, des désistements. Il est très probable que la digue armoricaine, en dépit d'un RN très haut, tienne encore cette fois-ci et que l'on n'ait pas de députés RN en Bretagne dimanche soir".

La majorité présidentielle résiste en Bretagne

Dimanche, c'est bien Ensemble, rassemblant les forces de la majorité présidentielle, qui a recueilli le plus de suffrages dans la région, devançant de peu le Nouveau Front Populaire.

La Bretagne, terre qui avait été largement séduite en 2017 et aussi en 2022 par le parti du président de la République, permet donc à la majorité présidentielle de résister encore. Deux raisons à cela selon le politologue breton : la prime aux députés sortants de la majorité , "des députés de terrain qui avaient travaillé, étaient connus et modérés".

Le directeur de recherche au CNRS avance une autre explication, celle-ci en lien avec "l'électorat de centre-gauche modéré qui avait rejoint Glucksmann pour les européennes et qui a de nouveau basculé vers Ensemble pour ce scrutin. On a une fonction stratégique de ce centre-gauche modéré qui passe alternativement de Renaissance à la gauche, si elle est socialiste".

Des candidats LFI qui perturbent les performances du Nouveau Front Populaire?

Des électeurs qui n'ont pas empêché le Nouveau Front Populaire d'arriver en deuxième position en Bretagne dimanche. Tout comme la majorité présidentielle, les candidats de l'union de la gauche se sont positionnés en tête à l'issue du premier tour dans dix circonscriptions. Ils ont même dans leur rang un député sortant, réélu dès dimanche, le socialiste Mickaël Bouloux dans la 8e circonscription d'Ille-et-Vilaine avec 52.8% des voix.

Mais pour Romain Pasquier, le Nouveau Front Populaire aurait pu faire encore mieux : "si les appareils centraux des différents partis du Nouveau Front Populaire avaient été plus à l'écoute des territoires locaux, notamment ne pas avoir imposé trop de candidats LFI, le succès du Nouveau Front Populaire aurait été encore plus significatif et il aurait peut-être pu passer devant la majorité présidentielle.[...] C'est un choix hors-sol". Et de citer la 8e circonscription du Finistère où le socialiste dissident Sébastien Miossec a largement devancé le candidat LFI investi par le Nouveau Front Populaire.

L'incertitude du second tour

Une nouvelle campagne commence avec les tractations d'entre-deux tours. Qui se désistera? Quel report de voix? Et quelle participation à venir? Difficile à dire pour le politologue : "il y a beaucoup plus d'incertitude. On n'a jamais eu un second tour aussi indécis en Bretagne".

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