La santé, c’est un mot qui ne pouvait pas manquer à notre tout premier dictionnaire français, celui de Richelet en 1680. Et d’emblée, en voici la définition qui commence presque par un cours de grammaire : « Ce mot, dans le [sens] propre n’a point de pluriel. » On verra qu’il en a un tout de même. Et voici la définition : « C’est une belle & naturelle disposition du corps qui exerce ses fonctions avec excellence. » Belle formulation. Il vient du latin, il y a d’abord l’adjectif sanus, sain, bien portant, au physique comme au moral. Puis vient le substantif sanitatem, santé physique ou morale, déformé en français vers 1050 et orthographié santet, avec un t final vite disparu. Alors, j’ai dit qu’il y avait aussi un pluriel au mot santé. En effet, l’abbé Furetière évoque déjà ce qu’il appelle une « cérémonie de table », pour dire à quelqu’un qu’on va « boire en son honneur », ou encore « à quelque personne absente » Et d’ajouter que « dans les festins d’Allemagne on boit la santé des puissances », on dirait aujourd’hui, à la santé des puissants.
Et on peut faire deux santés, au pluriel donc. Furetière précise aussi qu’on salue « ses amis en leur souhaitant une bonne et parfaite santé », ajoutant que « les paysans, ont une santé, une complexion robuste ». Et bien sûr, les boutades sur la santé n’ont pas manqué au fil de l’histoire.Eh bien, citons Pierre Perret, dans ses Pensées en 1979 : « Pourquoi se refaire une santé pendant l’été, si c’est pour reprendre le boulot à la rentrée. » Ou encore cette chanson chantée par Ouvrard en 1932 : « Depuis que je suis sur la terre, C’n’est pas rigolo Entre nous, Je suis d’une santé précaire, Et je m’fais un mauvais sang fou, J’ai beau vouloir me remonter Je souffre de tous les côtés J’ai la rate’ Qui se dilate J’ai le foie Qu’est pas droit, J’ai le ventre Qui se rentre J’ai le pylore qui se colore J’ai le gésier anémié, aujourd’hui, il aurait dit, j’ai le gésier « confiné » ! L’estomac bien trop bas Ah Mon Dieu ! qu’c’est embêtant d’être toujours patraque Ah Mon Dieu ! qu’c’est embêtant Je n’suis pas bien portant. » Eh bien c’est le mot à retenir : restons pour l’heure chez nous et le plus possible « bien portant ». Ah mon Dieu que c’est bien d’être bienportant…
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