A la Roseraie, l’école privée hors contrat Espérance banlieues prévoit de construire de nouveaux locaux sur son site actuel. Une opération immobilière pilotée par la Soclova, bailleur social angevin. « Une subvention publique déguisée » estime un collectif d’associations et d’organisation syndicales.
Installé dans des préfabriqués depuis 217, date de son implantation au cœur du quartier populaire de la Roseraie, le Gouvernail prévoit cette année de s’agrandir et d’occuper des locaux en dur. Un bâtiment de 500 m² est prévu dont la construction sera menée par la Soclova, bailleur social angevin dont la ville est l’actionnaire majoritaire.
Le sujet n’est pas nouveau. Il avait déjà été pointé du doigt par l’opposition lors du dernier conseil municipal d’Angers, le 20 décembre dernier. « Ce type d’établissement ne peut pas défendre une indépendance vis-à-vis de l’État et accepter des aides publiques sous forme de subventions ou de constructions de bâtiments » avait déclaré l’élue socialiste Silvia Camara-Tombini.
Après la subvention de 75 000 euros sur 3 ans accordée par la région Pays-de-la-Loire et qui avait déjà soulevé la polémique en octobre dernier, voilà la goutte d’eau qui fait déborder le vase pour un certain nombres d’associations et de syndicats angevins.
La Fédération des Œuvres Laïques, la FCPE, la Ligue des Droits de l'Homme, le Mouvement de la Paix, la Fédération de la Libre Pensée, le SNUipp-FSU, le Snes-FSU, le Snesup-FSU, le Sgen-CFDT. Tous ont décidé de s’associer pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une « subvention publique déguisée » versée à une école privée hors contrat. « C’est une provocation » s’insurge Florence Prudhomme, co-présidente de la Fédération des parents d’élèves de l’école publique (FCPE).
« Nous considérons que la Soclova n’intervient pas dans son champ de compétence. Son rôle est de construire des logements sociaux pour foyers modestes ou étudiants précaires. Nous avons là un investissement massif pour pérenniser l’implantation d’une école qui est totalement en dehors du cadre réglementaire. Le gouvernail est une école hors contrat pour lesquelles il est interdit d’obtenir tout financement d’argent public, que ce soit pour l’investissement ou son fonctionnement. Et là, clairement, on ménage une place à cette école qui peut désormais construire ses locaux avec des fonds publics. Des fonds qui seraient bien mieux utilisés dans l’école publique par exemple ».
Pour sa défense, Jean-Jacques Becouze, le président de l’association gestionnaire de l’école privée, se range derrière la réponse du maire Christophe Béchu lors du dernier conseil municipal et il précise :
« Pour ce bâtiment de 500 m², nous payerons un loyer de 36 000 euros par an hors taxes, soit 70 euros du m² par mois. Pour ce type de bâtiment, la fourchette de prix de location se situe entre 60 et 100 euros du m². Nous sommes dans la fourchette basse, je vous l’accorde, mais je ne comprends pas cette accusation de subvention déguisée ».
Lors de ce dernier conseil municipal, le maire avait d’ailleurs répondu à l’élue d’opposition. « Vos propos sont à la limite de la diffamation. Vous affirmez qu’il y a des subventions illégales. Non, il y a un bailleur social qui applique une fourchette qui correspond aux prix du marché. Ce que ça démontre, c’est votre profond malaise par rapport au fait qu’il puisse y avoir des familles qui fassent ce choix » avait conclu Christophe Béchu.
Fausse querelle financière ou véritable affrontement idéologique ?
La question du financement n’est pas le seul motif de cette bronca. La co-présidente de la FCPE le reconnait facilement. Le système hors-contrat est loin d’être sa tasse de thé. « C’est un système qui échappe aux contrôles. Mêmes si elles sont soumises à des contrôles, nous connaissons les moyens limités de l’état en la matière… Autant dire que le contrôle n’existe pas. En ce qui concerne le Gouvernail, on n’a pas de retour d’une éventuelle inspection » explique Florence Prudhomme.
« Au cours de nos 5 ans à la Roseraie, nous avons été contrôlé 3 fois » répond Jean-Jacques Becouze. « Les deux premiers ont eu lieu lors de la 1ère année et dont le second n’a pas fait l’objet d’un rapport. Le dernier remonte au printemps 2021. Un rapport a été rendu comportant quelques recommandations ».
Mais selon la représentante angevine de la FCPE, le problème est plus profond. Malgré son salut du drapeau français et la Marseillaise chantée dans la cour, ces écoles pratiqueraient « une forme de séparatisme scolaire et social ».
« Les personnes à l’origine du réseau Espérance banlieues ont clairement exprimé leur volonté d’une école aux méthodes pédagogiques traditionnalistes et paternalistes. Des méthodes que nous estimons marquées par un séparatisme social et scolaire teinté d’une idéologie que nous qualifions de réactionnaire ».
« Je ne souhaite pas rentrer dans une polémique stérile avec ceux qui nous attaquent » répondait hier soir sur RCF Anjou le président du Gouvernail.
« Ce sont des positions dogmatiques de la part de nos opposants et j’ajoute que tout le monde est invité à découvrir l’école et à rencontrer direction, élèves et parents d’élèves. L’invitation a été lancé plusieurs fois à nos détracteurs, nous les attendons toujours ».
Réécoutez en intégralité l’émission consacrée à ce sujet en haut de la page.
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