Lors de sa prise de parole de la mi-janvier, Emmanuel Macron a formulé le souhait de rendre le théâtre obligatoire dans les collèges, dès la rentrée prochaine. Une bonne idée selon les enseignants des Pays de Savoie, qui redoutent néanmoins des pesanteurs logistiques.
Dans les lycées Baudelaire d’Annecy et Vaugelas de Chambéry, la présence d’une section théâtre est quasiment historique. Sophie, élève de Terminale, a d’ailleurs choisi l’établissement de la cité des Ducs pour cette spécificité. “Je suis une grande fan d'art, c'est ma passion” explique-t-elle. "L'analyse des personnages, l'analyse de leurs comportements, pourquoi est-ce qu'il fait ça ? Quelle est sa réaction ? Et donc ouais, foncez ! Même si on hésite, ça va nous ouvrir les yeux sur plein de choses !"
Elève brillante, mais anxieuse, la jeune femme est métamorphosée une fois sur les planches. Le théâtre qui représentait pour elle une “bulle à part" est finalement devenu un but de vie : l’an prochain, forte de son expérience acquise au lycée, elle espère rejoindre un conservatoire parisien.
Pour Frédéric Roux, son professeur, une chose est sûre, la pratique apporte bon nombre de bienfaits à un élève. “La connaissance de lui-même, la connaissance du potentiel du corps, apprendre à affronter le regard des autres, à être ensemble (...) et puis évidemment à affronter, en se préparant, les examens, les oraux que les élèves auront dans leurs oraux”.
Des atouts dans le cadre scolaire, mais pas seulement. “C’est un outil d’émancipation” ajoute Antoine Guillot, metteur en scène et fondateur de la Compagnie Caravelle qui intervient dans les lycées Vaugelas et Baudelaire. “C’est une émancipation culturelle, parce qu’on rencontre des gens qu’on aurait pas rencontré sinon, on rencontre des auteurs, des paroles, des pensées qu’on n'aurait pas rencontré autrement (...) quel que soit le milieu social ou le milieu culturel dont on vient”.
Si les bienfaits sont indéniables, faut-il, pour autant, contraindre des élèves à monter sur les planches ? À Annecy, le professeur Antoine Piel du lycée Baudelaire, craint que la pratique devienne contre-productive. "On ne fait pas du théâtre quand on n'en a pas envie" commence-t-il. "On s'expose, on se met à nu (...) c'est l'adolescence et la personnalité est encore fragile".
L’enseignant s’interroge aussi sur les modalités logistiques. Qui pour enseigner le théâtre à l’intégralité des lycéens ? Aujourd’hui peu de professeurs sont spécialisés dans la pratique théâtrale. De son côté Antoine Guillot insiste : "la pratique n'a que du bon, à condition que les artistes qui interviennent restent des artistes et non pas des animateurs socio-culturels".
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