« J’ai été brillant en maternelle, tout allait très bien jusqu’en primaire, et là, j’ai commencé à m’étioler… Scolarité chaotique, nombreuses heures de colle, redoublements, j’ai fini dans une boîte à bac ». L’homme qui parle ainsi, le docteur Dupagne, est aujourd’hui médecin. « Un métier parfait pour les hyperactifs -dit-il- car très autonome, sans patron ni routine ».
Le Docteur Dupagne souffre donc de TADH, comprenez « Trouble du Déficit d’Attention avec ou sans Hyperactivité ». Lui, c’est avec ! Il n’a été diagnostiqué TADH qu’à 44 ans, en discutant avec un ami psychiatre, lui aussi atteint de ce trouble. Depuis lors, il s’est intéressé de près aux enfants qui en sont affectés, qui sont nombreux. Au moins cinq pour cent des enfants sont concernés. Auteur d’un essai sur le sujet, Le retour des zappeurs il gère aussi un forum de patients qui en souffrent. « Je veux donner un point de vue positif sur ce trouble, plutôt que de le présenter comme une maladie ». Car « le TADH n’est pas une maladie, mais un caractère – explique-t-il - son comportement est celui d’un chasseur ou d’un guerrier, qui dans une population primitive ou rurale, ne pose pas de problème ».
Mais le problème, c’est que l’on a cessé d’être primitif ou rural et depuis longtemps ! Du coup lorsque l’enfant TADH rencontre l’école, avec l’obligation de rester assis, attentif pendant des heures, le mélange devient explosif ! Comme ce fut le cas pour le Docteur Dupagne. « Un zappeur n’arrive pas à se focaliser sur quelque chose qui n’est pas captivant » -dit-il. L’école n’est pas adaptée aux enfants TADH, c’est aux enfants de s’y adapter. Beaucoup n’y arrivent pas, qui plongent alors dans la spirale de l’échec et de la souffrance. « Trop souvent -dit-il- ils sont brisés à l’école, au risque d’être totalement détruits … Les profs font ce qu’ils peuvent, mais gérer un tel trouble en classe est un enfer ».
Alors, comment valoriser ces talents particuliers de ces enfants à l’école ? Des chasseurs, des guerriers … ce n’est pas simple. Selon lui, il faut concevoir pour eux un cursus adapté à leur profil : « Des cours très brefs, très animés, -dit-il- des supports visuels forts, vidéos, photos, des débats, peu de devoirs à la maison ». On devine que l’école à la maison pendant ce confinement n’a pas aidé ! Le docteur Dupagne pense aussi que l’idéal, c’est que la moitié des enseignants soient eux-mêmes TADH, qu’ils vivent eux-mêmes cette réalité
Autant dire un beau défi pour l’éducation nationale. Mais ce défi rejoint d’une certaine manière les attentes des enfants handicapés : une école qui s’adapte aux besoins de l’enfant, et pas l’inverse, cela bénéficie à tous !
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