Michel Barnier, imperturbable malgré le chahut, a exposé ses priorités dans un discours de politique générale de presque une heure et demie mardi 1er octobre. Une dissolution était-elle nécessaire pour prendre de tels engagements ? Est-ce la méthode, en rupture avec le macronisme, qui lui a permis de redonner une dynamique à un exécutif en perte d'autorité ? Michel Guénaire, avocat, écrivain et candidat à la primaire de la droite en 2017 sous l’étiquette Société Civile 2017, décrypte le discours de politique générale du Premier ministre.
Pouvoir d'achat, service public, immigration… Michel Barnier a énuméré ses priorités mardi 1er octobre devant les députés à l'Assemblée nationale.
Dans une assemblée très chahutée, Michel Barnier a déroulé son discours. Michel Guénaire y a perçu une forme de sagesse et de recul de la part du Premier ministre. "Je pense qu'après la génération Macron et sept années de gouvernance par des jeunes, sans expérience, et peut-être avec trop d'arrogance, il est temps de laisser place à la sagesse et à la prise de recul. Michel Barnier a été l'homme de la situation hier après-midi." L'avocat identifie quatre parties dans le discours de politique générale : la dette financière, la dette climatique, la nécessité de faire de la politique dans le dialogue et le respect, et enfin les cinq grands chantiers que le Premier ministre veut mettre en place.
L'absence de majorité a signé l'acte de décès du macronisme. Michel Barnier a aujourd'hui les clés pour dessiner quelque chose de différent.
Ce discours a été prononcé après trois mois politiquement mouvementés pour le gouvernement. Selon Michel Guénaire, Emmanuel Macron a été surpris par les résultats des élections européennes, ce qui l’a conduit à dissoudre l'Assemblée nationale. "L'absence de majorité a signé l'acte de décès du macronisme. Michel Barnier a aujourd'hui les clés pour dessiner quelque chose de différent."
Le discours du Premier ministre était "sur un plan", affirme Michel Guénaire, mais "il manquait un angle. On est face à un homme posé qui dresse un état des lieux et parle de tout." Michel Barnier a ainsi abordé le niveau de vie des Français, puis l'efficacité des services publics. Il a enchaîné sur la sécurité quotidienne et la maîtrise de la politique migratoire, avant de conclure sur un message de fraternité et d’humanité, inspiré par les Jeux Olympiques et Paralympiques. Il n'a pas évoqué de retour en arrière sur le mariage pour tous ni la PMA. "On n'a pas perçu de hiérarchisation ou d'angle clair sur les différents chantiers évoqués. On verra comment chaque ministre portera ses dossiers."
Il manquait un angle. On est face à un homme posé qui dresse un état des lieux et parle de tout.
Pour satisfaire une assemblée hostile, le Premier ministre a dû donner un peu à tout le monde. Il a durci son discours sur l'immigration pour la droite et annoncé une hausse du SMIC de 2 % pour la gauche. Pour l'écrivain, ce jeu d'équilibriste s'explique par la situation inédite dans laquelle se trouve Michel Barnier. "La Ve République est intrinsèquement liée à un scrutin majoritaire. Hormis l'exception de 1986, de 1958 à aujourd'hui, nous avons toujours eu un scrutin majoritaire. Aujourd'hui, il n'y a plus de majorité dans le pays, le paysage politique est éclaté." L'avocat plaide pour un retour à un modèle plus sain pour la démocratie, avec une droite et une gauche fortes, sans groupe central dominant. "L'angle n'a pas été trouvé, car on ne sait pas encore précisément de quelle France on parle ce matin."
Le Premier Ministre a été commissaire européen et porte le projet d’une France pleinement engagée dans la construction d’une Europe forte. Michel Guénaire estime, au contraire, que "la construction européenne actuelle est très néfaste. L’unique enchère européenne sur les prix de l’énergie est une folie inflationniste. Cela nous pénalise. Il faut découpler les sources d'énergie et fixer un prix qui reflète le coût réel de chaque source d'énergie." L'écrivain milite pour une réponse à la crise française fondée sur une nouvelle relation avec l’Europe. Il s’interroge sur la capacité d’un Premier ministre "très européiste" à infléchir cette trajectoire.
La France a son identité, ses marques de puissance et de souveraineté, et son histoire la place trop haut pour qu’elle devienne demain un simple pion ou un ticket dans l’agenda européen.
L’essentiel, selon Michel Guénaire, est que la France conserve son identité et sa souveraineté. "La France a son identité, ses marques de puissance et de souveraineté, et son histoire la place trop haut pour qu’elle devienne demain un simple pion ou un ticket dans l’agenda européen. Je continue de penser que notre pays peut peser sur l’échiquier international, mais il faut qu'il le fasse avec beaucoup de force et de sérénité. L'âge de Michel Barnier peut l’aider, mais à son âge, il doit également posséder la force de l’audace et de l’imagination."
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