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Femmes : comment comprendre le refus d'être mère ?

Un article rédigé par Vincent Belotti - RCF, le 24 janvier 2025 - Modifié le 24 janvier 2025
Je pense donc j'agisMouvement "No Kids" : comment comprendre le refus de maternité ?

Autrefois, se marier et avoir des enfants semblait tout à fait naturel. Aujourd'hui, c'est beaucoup moins évident. 13% des femmes contre 2% en 2006 ne veulent pas être mères. Pourquoi ce refus ? Comment est-il perçu dans notre société ? Y-at-il des motivations plus profondes que la précarité financière ou l'avenir de la planète ? Des clés pour comprendre avec Bettina Zourli, journaliste au compte Instagram "Je ne veux pas d'enfants", Helen Monnet, psychologue et auteure de  "Avoir un enfant ou pas" et Karine Hendriks, rédactrice en chef de "L'école des Parents" qui consacre tout un dossier sur ce sujet dans son dernier numéro.

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Etre une femme et ne pas vouloir être mère: un phénomène nouveau ? Pas vraiment pour Bettina Zourli : "Si on regarde les courbes démographiques en France depuis 1850, il y a toujours eu entre 10 à 17 % de femmes n’ayant pas eu de d’enfants à la fin de leur vie fertile.". Des "No child" avant l’heure ? Difficile à confirmer. Par contre, une tendance qui s’est développée dans les années 60, notamment avec l’émancipation féminine, le droit à la contraception et l’avortement. Et une réflexion entamée aujourd’hui de plus en plus jeune. "Depuis cinq, six ans " observe la psychologue Helen Monnet, "l’âge de mes patientes se questionnant sur le sujet est passé entre 30 et 20 ans, avec l’éco-anxiété liée au dérèglement climatique."

Ne pas vouloir d’enfants face à un monde déjà surpeuplé et qui se dégrade de plus en plus. Un argument contesté par certains scientifiques et économistes, mais qui passe en tout cas beaucoup mieux dans l’opinion. "Si on n’a pas envie d’être parent, on va essayer de vous convaincre. Si on se dit antinataliste, on est traité d’égoïste ou d’extrémiste, c’est donc un argument qui laisse tranquille.", souligne Karine Hendriks. Une raison écologique qui n’est pourtant pas la seule à refuser d'enfanter. "En 2022", rappelle Bettina Zourli," un sondage IFOP publié dans le magazine Elle révélait que l’épanouissement personnel arrivait en tête à plus de 90 % , devant l’écologie ou des raisons politiques et sociétales. Mais la raison principale, insiste-t-elle, "c’est le non désir."

Des blocages parfois inconscients

Comment donc expliquer ce non–désir ? Souvent, il prend racine dans une histoire familiale difficile. Maltraitance, mère surprotectrice à qui on n’a pas envie de ressembler, père absent qui fait douter de trouver un conjoint suffisamment mature pour élever un enfant, autant de témoignages qu’on retrouve dans le livre d’Helen Monnet.

Des blocages aussi parfois inconscients qui peuvent se traduire par une difficulté physiologique à enfanter. D’où l’intérêt d’un accompagnement psychologique pour cheminer "Je pense qu’il est important d’avoir un espace bienveillant, de tranquillité, où on puisse se questionner, dans un sens, comme dans l’autre, pour comprendre où on se situe et dans quelle mesure l’impact inconscient de ses ascendants joue sur son propre désir." souligne la psychologue.

Procréer, une injonction à géométrie variable

Une femme qui ne veut pas d’enfant, pourquoi ça reste encore mal accepté en société. "Du point de vue extérieur, la féminité est encore associée à la maternité. Et du coup, on brouille les pistes. Si on n’est pas mère, alors qu’est-ce qu’on est ? interroge Bettina Zourli." Et puis faire des enfants, c’est assoir la puissance d’une nation, d’une religion." Des piliers dont la remise en cause peut faire peur.

Et pourtant, cette injonction à procréer a varié selon les époques et la raison d'Etat. "Au milieu du 19e siècle", rappelle Karine Hendriks, "le pasteur Malthus préconisait de maitriser la natalité pour préserver les ressources alimentaires et les autorités fermaient les yeux sur l’avortement." Une doctrine abandonnée après la défaire de Sedan, en 1870, face à une Prusse allemande supérieure en démographie. Et la relance donc en France d’une politique de natalité pour des raisons économiques et militaires …

Aimer autrement

Mais ne pas vouloir d’enfants signifie –t-il ne pas les aimer ? Une critique souvent entendue. Si l’instinct maternel n’est pas forcément automatique à la naissance, on peut apprécier les enfants des autres sans en supporter les contraintes éducatives. Exemple d’Emilie, hôtesse de l’air à la vie sentimentale et sexuelle très libre, qui adore gâter son neveu de 6 ans. Une affection qui peut aussi se tourner vers les animaux. Le cas d'Hélène Gâteau, vétérinaire, qui a trouvé son équilibre "de maternance" en préférant câliner son chien Colonel , sans pour autant le considérer comme un enfant.

Un choix assumé. Et "qui doit rester libre et personnel", en conviennent les participantes, loin des injonctions parentales, politiques ou religieuses. Pas encore gagné, avec le retour d’un certain conservatisme. Comme le soulignait la thérapeute Charline Schmerber, citée en préface du livre d'Helen Monnet: "Aujourd'hui, décider de donner la vie à un enfant ou ne pas en avoir nécessite de faire preuve de courage..."


Pour aller plus loin :

"Avoir un enfant ou pas" par Helen Monnet, psychologue intégrative. Editions "Le Courrier du livre" 2023. Les clés pour explorer son désir et ses peurs en toute liberté, avec de nombreux témoignages de femmes de générations différentes.

"Le temps du choix" de Bettina Zourli, journaliste et créatrice du compte Instagram "Je ne veux pas d'enfants" Editions Payot 2024

Et le dossier spécial "Demain , pas d'enfants ?" de "L'Ecole des parents et des éducateurs" Hiver 2025 "Demain, pas d'enfants" https://www.ecoledesparents.org/boutique/revue/demain-plus-denfant/

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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