À quelques jours de l’armistice du 11 novembre, Sandrine Broutin de la Fondation Falret s'intéresse aux effets de la guerre sur notre santé mentale. Folie ordinaire, agir pour notre santé mentale, une chronique à écouter chaque lundi sur RCF.
Cela semble d’autant plus nécessaire que la guerre est à nos portes en Ukraine. Nous la voyons de façon moins distanciée que pour d’autres conflits ; je pense en disant cela aux français qui accueillent des réfugiés, et qui sont bouleversés par la souffrance que vivent nos voisins. En fuyant pour leur vie, ils perdent tout. Qu’ils soient encore là-bas, ou chez nous, déracinés, beaucoup d’entre eux ont été exposés à des scènes atroces.
Les facteurs de stress -et le mot est faible- parlons de peur, d’impuissance, d’horreur provoquent des blessures invisibles mais bien réelles. Ces blessures de l’âme sont aujourd’hui connues sous le nom de syndrome de stress post-traumatique. Les symptômes sont nombreux et variés. Ils augmentent l’anxiété chez les enfants et les adultes avec des émotions intrusives et négatives. Ce sont des cauchemars par exemple, et des flash-back qui viennent parasiter le quotidien, ou des pertes de concentration, de sommeil et de conscience.
À mesure que s’égrènent les guerres, nous avons mieux compris leurs effets dévastateurs et la gestion du traumatisme. La première guerre mondiale, par la violence de ses champs de bataille, a poussé les médecins à aller au front opérer dans l’urgence, à innover avec la chirurgie réparatrice de la face. Sont apparues les premières greffes de peau et les appareils d’orthodontie pour réparer les « gueules cassées » comme on dit. Mais qu’en est-il des âmes ? De ces hommes, sans blessures apparentes, prostrés dans les tranchés ne pouvant plus bouger. Ou de ceux que l’on voit sur certaines photos, le sourire hébété, le regard hagard, étonné d’être là, encore là ?
Ces séquelles psychiques observées par les médecins ont permis des progrès considérables dans la psychiatrie moderne et la médecine militaire. Il y a de nombreuses études qui attestent de la longévité des effets de la guerre, en particulier avec les vétérans du Vietnam. La fin des combats ne met pas toujours fin à la souffrance des combattants ; les champs de bataille restent dans la tête. Certains endurent des symptômes de stress tout au long de leur existence. Pour d’autres, ce sont des évènements qui font réapparaître tardivement et de façon brutale les fantômes de la guerre. Le traitement des traumatismes est essentiel. C’est un combat pour se libérer du passé, de ces souvenirs qui hantent parfois jusqu’à la mort.
Cela peut frapper toutes les personnes qui ont vécu un événement traumatique ou en ont été témoin. Les symptômes surviennent parfois plusieurs mois, voire plusieurs années après. L’accès aux informations et aux images des médias peut même raviver des traumatismes chez les personnes ayant vécu des situations similaires par le passé. C’est important de recevoir de l’aide à ce moment-là.
Et c’est pour cela qu’il est important en parler !
Une chronique en partenariat avec la Fondation Falret, une fondation reconnue d'utilité publique, fondée en 1841 par le psychiatre français Jean-Pierre Falret; elle accompagne des personnes souffrant de troubles psychiques et/ou en difficultés psychosociales afin qu’elles trouvent leur place dans la société et exercent pleinement leur citoyenneté.
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