"Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité". C’est ainsi que le Comité national d’éthique a titré son dernier avis relatif à "l’aide active à mourir", publié le 13 septembre dernier. Mais à quoi correspondent les termes d’autonomie et de solidarité ? Quel sens prennent-ils dans le cadre de la fin de vie ? Une philosophe de la faculté jésuite de Paris, une médecin spécialiste des soins palliatifs et un avocat, auteur d’un livre sur la fin de vie, en débattent dans notre émission Où va la vie ?.
Au travers des mots "autonomie et solidarité", Claire Fourcade, médecin en soins palliatifs à Narbonne, perçoit d’abord un message de soutien aux patients, "quoiqu’il en coûte". Mais elle pose vite les limites : "Est-ce que nous souhaitons basculer collectivement du côté de l’autonomie ?" Face à ce qui pourrait être un pas de plus dans l’individualisme de la société, la présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) appelle à voir "l’autonomie comme cette capacité à réfléchir à quel moment on a besoin des autres, ça nous permettrait de construire un accompagnement collectif".
De son côté, Erwan Le Morhedec, l’auteur de "Fin de vie en République - Avant d’éteindre la lumière" (éd. Cerf, 2022) est très sceptique quant à cette notion d’autonomie. "On prétend laisser la personne autonome alors qu’on parle d’une personne qui est souvent isolée et / ou fatiguée. Si la loi est adoptée, on va tous devoir se poser la question, mais elle est insoluble et oppressante", déplore-t-il. Et d’insister : "Ce n’est pas de l’autonomie, c’est de l’isolement. La société nous abandonne à notre problème."
En réalité, par autonomie, le Conseil consultatif national d’éthique (CCNE) entend que la décision soit prise "de façon libre, éclairée et réitérée". Par ailleurs, si l’aide active à mourir venait à être dépénalisée, le CCNE souhaite la mise en place de repères éthiques avec notamment une assistance au suicide ouverte aux personnes majeures atteintes de maladies graves et incurables.
Plus que l’autonomie des patients, c’est le rôle des soignants dans cette potentielle aide active à la mort, qui inquiète la docteure Claire Fourcade. "Dans tous les pays où l’euthanasie est légalisée, l’injection létale qui fait mourir le patient, est toujours faite par un soignant. Chez nous, on voit les soignants se rebeller contre cette idée en disant que donner la mort ne peut pas être un soin", raconte-t-elle. "Cela paraît tout à fait contradictoire par rapport au serment d’Hippocrate mais même dans le fond, par rapport à ce qu’est le soin, qui est une façon de soutenir et de soulager la vie des patients", complète Agata Zielenski, philosophe et religieuse xavière.
Dans son avis, le CCNE recommande que le médecin en charge du patient et les autres professionnels de santé participant à la procédure collégiale, puissent bénéficier d’une clause de conscience, accompagnée d'une obligation de référer le patient à un praticien susceptible de réaliser l'intervention. Autant de questions sur lesquelles se penchera la convention citoyenne sur la fin de vie, qui va débuter le 9 décembre. 150 citoyens tirés au sort débattront de la fin de vie jusqu’au 19 mars 2023.
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