Alouette, alouette, je te plumerais… on connaît la comptine, mais il s’agit dans le livre que je vous propose d’un exercice d’admiration. L’auteur, pourquoi le nier, n’est pas né de la dernière pluie, et se souvient de ses années d’enfance, quand il courait par champs et chemins dans les Flandres. Mais voilà, l’alouette des champs se fait rare…
Francis Grembert veut rendre hommage à l’oiseau en une déclaration d’amour écologique et poétique : « Chère Madame et très joyeuse alouette », écrit-il en exergue de ce petit livre. « Je ne peux me satisfaire de votre absence en ce lieu où je vis. » Et on en apprend des choses, sur ce monde en voie de disparition. Savez-vous, par exemple, que l’alouette est capable de quelque 600 notes et articulations différentes, comme si elle était douée de parole. Ses trilles faisaient partie du paysage : « J’étais avec mon frère dans les champs. Les yeux levés au ciel, comme deux nigauds heureux, nous tentions de vous repérer. Votre chant nous appelait. Vous étiez notre oiseau choisi », se souvient-il. Pourquoi pas le rouge-gorge, la mésange ou la sitelle torchepot ? Allez savoir : il évoque le chant de l’alouette, sa dextérité pour s’élever dans les airs et redescendre en piqué… et l’auteur insiste sur l’humilité de l’alouette : « Vous êtes un oiseau à nul autre pareil. Votre discrétion n’a d’égale que votre jouissance du paysage ouvert, dont vous êtes la signature intime sous la forme d’un point d’exclamation ». Quand d’autres nichent dans les bosquets, l’alouette est un oiseau de plein champ.
L’alouette comme bien des oiseaux est-elle menacée ?
Comme pour nombre d’espèces, on ne peut que déplorer une perte drastique d’individus, et pas seulement l’alouette. Oiseaux, rongeurs, et autres insectes, c’est un vrai carnage que nous tentons malgré tout d’enrayer… « L’arme était insidieuse : un pulvérisateur, tiré par un Massey Fergusson ou un John Deere. La systémisation des insecticides, déversés à longueur de saison sur les emblavures vous a contrainte à quitter bon nombre de vos habitats. » Voilà qui n’est guère rassurant : « votre présence était la preuve que tout était en ordre, que rien ne manquait à l’appel : larves, vermisseaux, champignons et autres micro-organismes. » Bref : il y a là une vraie question écologique, mais faisons « place aux poètes, aux barges et aux alouetteurs », nous invite l’auteur. Parce que l’alouette inspire ses admirateurs, à commencer par Van Gogh et son « champ de blé avec alouettes » ou encore Jules Renard : « l’alouette vit au ciel, et c’est le seul oiseau du ciel qui chante jusqu’à nous. »
L’alouette aurait une place à part, une confrérie d’admirateurs ?
Dès le plus jeune âge, qui n’a pas chanté Alouette, alouette, je te plumerai la tête, et le cou, et les ailes… alouette, … gentille alouette qui supporte les comptines et se cache quelque part pour ne pas se faire plumer. Si l’hirondelle annonce le printemps, l’alouette est messagère de toutes les saisons. Rien n’est perdu : « Elle chante l’invincible, l’increvable espérance : la petite alouette des champs », écrit Henri Brunel. Et puis, ne soyons pas exclusif : si vous ne prenez pas le temps, durant cet été, d’observer l’alouette, il y a bien d’autres spécimens qui méritent votre attention : « Si chacun de nous écrivait sa lettre à l’animal de son choix pour lui dire que sans lui il manquerait quelque chose à la vie, je suis persuadé, écrit Francis Grembert, que nos imaginaires, irrigués d’une puissance nouvelle, se déploieraient. »
Chaque jeudi à 8h44, Christophe Henning (La Croix) et Christophe Mory (RCF et Radio Notre-Dame) présentent le livre de la semaine.
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