"Ce n'était pas du tout un sacrifice - le mot est vraiment rejeté, que ce soit par sa famille, ses amis, les gendarmes..." Le 23 mars 2018, Arnaud Beltrame, officier français posait un geste fort en se substituant à une otage. C'était à Trèbes, dans l'Aude, non loin de Carcassonne. Depuis, plus de 40 municipalités ont entrepris les démarches pour avoir une rue, une place, un square Arnaud-Beltrame. Ce mercredi 20 juin paraît le livre de Jacques Duplessy et Benoît Leprince, "Arnaud Beltrame, le héros dont la France a besoin" (éd. de l'Observatoire). Si parler de sacrifice semble être erroné d'après les journalistes - "c'était un combattant, il était formé pour ce type d'interventions, il espérait s'en sortir vivant" - évoquer un acte de bravoure n'ôte rien à la grandeur de son geste.
Né en 1973, Arnaud Beltrame a grandi en Essonne. Une enfance fortement marquée par la figure de son grand-père, parachutiste grièvement blessé en Indochine. "Cette figure l'a beaucoup marqué durant son enfance", explique Jacques Duplessy. Très vite la vocation militaire s'est manifestée chez lui, "c'était lui qui organisait des aventures dans les bois, des combats". Et déjà il démontrait un talent d'organisation.
Leader dans l'âme Arnaud Beltrame était comme le sont ses deux frères, un travailleur. Il ne cachait pas son ambition de devenir général, mais sans jamais écraser l'autre. "Il cherchait vraiment à tisser des liens et pas à écraser les gens", raconte Jacques Duplessy. Lorsqu'il était à Avranches, Arnaud Beltrame recherchait le contact avec la population, il avait soif de rencontres. Et ses hommes savaient qu'ils pouvaient se confier à lui.
"C'était un homme faillible, mais qui ne se laissait jamais démonter." À trois reprises, Arnaud Beltrame a échoué à l'École de guerre, qui lui aurait permis plus tard de devenir général - grâce à son MBA en intelligence économique, il comptait pouvoir présenter le concours à nouveau. Avant cela, il avait échoué au concours d'entre de l'École militaire de Saint-Cyr : un obstacle à son rêve de devenir officier, qu'il contournera en entrant à l'École militaire interarmes (EMIA). "J'ai l'impression au terme de cette enquête, que c'était un idéaliste, un passionné : par son pays, par l'histoire, il vivait vraiment pour la chose militaire."
Arnaud Beltrame vivait comme un échec son passage au GIGN. "Ça ne se passait pas très bien probablement à cause de son tempérament idéaliste, chevaleresque." Lors de la mission à laquelle il a participé en Irak, "une mission extrêmement difficile", Arnaud Beltrame a révélé non pas un problème d'incompétence mais plutôt de profil : "Il n'avait pas le profil des hommes du GIGN qui le trouvait incontrôlable." Les journalistes parlent du "côté panache" d'Arnaud Beltrame, de "son côté Cyrano de Bergerac". Sans doute n'a-t-il pas été assez accompagné, pas assez soutenu lors de son passage au GIGN, toujours est-il qu'à son retour en France, le jeune homme mettra fin à son engagement et ne gardera pas de contact avec les membres de cette unité d'élite.
Issu d'une famille catholique, croyante mais peu pratiquante, Arnaud Beltrame avait été baptisé. Une fois adulte il a ressentil "un besoin d'intériorité". "Il a suivi un chemin de conversion... À priori c'est pas comme Claudel derrière son pilier, c'est pas quelque chose de fulgurant ; mais un chemin progressif." Pendant plus de 10 ans, l'officier a fréquenté l'abbaye de Timadeuc, en Bretagne, là où il a reçu le sacrement de confirmation et fait sa première communion. Une conversion chrétienne qui s'est faite simultanément avec son initiation à la franc-maçonnerie en 2008, "à l'instigation de son beau-père". "Il a eu d'autres recherches plus ésotériques avec le druidisme, c'était quelqu'un qui avait une vraie quête intérieure et qui cherchait partout."
Muté à Carcassonne pour rejoindre sa femme, Arnaud Beltrame voulait se préparer au mariage : c'est comme cela qu'il a découvert l'abbaye Sainte-Marie de Lagrasse et rencontré frère Jean-Baptiste, qui l'a longtemps accompagné sur le plan spirituel. "C'est vrai qu'il était attiré par les religeux : ceux qu'il l'attiraient c'était les gens qui vivent ce à quoi ils croient."
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