Avec Une enfance orientale, le dessinateur Charles Berberian revient avec beaucoup de tendresse et de délicatesse sur son enfance à Beyrouth. Une album publié chez Casterman et en sélection au Festival d'Angoulême à retrouver dans la chronique BD de Stéphanie Gallet.
Charles Berberian n’est pas un petit nouveau de la bande dessinée mais cette Éducation orientale publiée à l’automne dernier chez Casterman est peut-être son album le plus personnel.
Charles Berberian est né à Bagdad en 1959, d’une mère grecque et d’un père arménien mais comme les choses ne sont jamais simples, c’est à Beyrouth qu’il a grandi. Six petites années passées à Beyrouth entre ses 10 ans et ses 16 ans, 6 petites années, écrit-il, qui ont compté double pour l’enfant qu’il était. Cet album est né pendant le confinement. Berbérian jubile. Il peut dessiner tout son saoul, les rues sont vides et on rêve d’un monde nouveau.
Et il se souvient, la dernière fois qu’il s’est retrouvé coincé chez lui à dessiner, c’était en 1975, la guerre civile s'installait au Liban et personne ne savait combien de temps cela allait durer. Et c’est là bloqué dans l’appartement de ses parents qu’il a ressenti combien dessiner pouvait être un refuge et un abri. Mais très vite, quand la guerre arrive, ses parents lui font fuir le Liban pour s’installer en France.
Charles Berberian ne retournera à Beyrouth qu'à partir de 2005. Quatre autres voyages suivront. Mais comment revenir dans une ville qu’on a quitté depuis si longtemps ? Berbérian se demande s’il n’est pas en train de s’épuiser à courir derrière un passé qui n’existe plus, qu’il ne pourra jamais rattraper ? Car le Beyrouth de son enfance a vécu. Cet album, s'il est un retour aux sources, est surtout une célébration de la bande dessinée, de sa force d’évocation, de sa capacité à faire surgir ce qui n’est plus. En dessinant, Berbérian retient le temps ou plutôt il imprime ses souvenirs. Des souvenirs heureux, l’amour de sa grand-mère, la fascination pour son frère de cinq ans son aîné désormais disparu, sa découverte de la bande dessinée. Charles Berberian raconte ces années insouciantes et l’irruption de la guerre. Il raconte son enfance et il dessine Beyrouth car c’est bien de là qu’il vient. Ce sont ces années qui ont fait de lui ce qu’il est.
Il dessine le Beyrouth d’hier et le Beyrouth d'aujourd'hui et dans ses cases, comme dans sa tête, les images se mélangent, se superposent. Graphiquement, c’est très riche. Berberian multiplie les techniques, dessins noir et blanc, aquarelle, bic quatre couleurs mais aussi collage, photo. Ça donne un aspect carnet de voyage à l’ensemble, certaines pages sont très belles. On le sent, il le dit, Charles Berberian aime dessiner Beyrouth
Au Liban, écrit-il, les gens vivent en ayant traversé la ligne blanche du chaos. Ils sont passés de l’autre côté de “ça ne peut pas aller pire”. Ça donne à l’ambiance du pays une certaine légèreté, une nonchalance, un humour "aquoiboniste", bref un charme fou …
Une éducation orientale de Charles Berberian est un regard émouvant sur la ville de Beyrouth, un voyage introspectif dans l’enfance d’un dessinateur, un album plein de tendresse et de délicatesse.
Une éducation orientale de Charles Berberian est publiée chez Casterman.
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