Mars 68. "La France s'ennuie", note Pierre Viansson-Ponté (1920-1979), alors journaliste au Monde. Elle ne va pas s'ennuyer longtemps. Le 22 mars le campus de Nanterre est occupé par un groupe de 142 étudiants emmenés par Daniel Cohn-Bendit. On connaît la suite. Presque un demi-siècle nous sépare désormais des tumultes de mai 68, ces semaines qui ont divisé la France. Un aspect méconnu de la vie de René Rémond pourrait cependant réconcilier les uns et les autres sur le sujet. Dans "René Rémond et Nanterre - Les enfantements De 68" (éd. Le Bord de l'eau), Charles Mercier montre comment René Rémond s'est engagé aux côtés des étudiants réformistes, pour transformer l'université. Un ouvrage remarquable par sa précision et sa richesse.
Quand éclatent les événements de mai 68, René Rémond (1918-2007) est professeur à la faculté de Nanterre. Il est l'un des grands historiens et intellectuels de l'époque, reconnu pour son essai "La Droite en France de 1815 à nos jours" (1954), qui a touché un large public. "Il représente un peu la figure de l'universitaire chrétien qui essaie de faire entendre une vision chrétienne du monde dans le débat public et de faire dialoguer la pensée chrétienne avec la pensée contemporaine de son temps."
Dans son ouvrage, Charles Mercier croise deux parcours. Celui d'un historien embématique et celui d'une université non moins emblématique. D'un côté "Nanterre la rouge", "Nanterre l'enragée", de l'autre, René Rémond, l'intellectuel modéré, chrétien... Bref le contraire du soixante-huitard. "René Rémond dans ses écrits, explique Charles Mercier, avait déclaré de façon provocante: 'Je suis moi aussi à ma façon un enfant de 68'."
Nanterre occupe une place particulière dans les archives de l'historien. Charles Mercier explique que "René Rémond faisait partie de ces universitaires réformistes investis dans la reconstruction de l'université, en coopération d'ailleurs avec une partie des étudiants moteurs de mai 68, que l'on pourrait appeler les gauchistes participationnistes", ceux qui avaient fait le choix quitter la rue pour essayer de reconstruire l'université sur de nouvelles bases.
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