Il est futurologue mais Bruno Marion ne prédit pas l'avenir. Il analyse les signes annonciateurs de la crise à venir. Une crise qu'il prédit inédite par son ampleur et sa rapidité. S'il s'inspire des survivalistes, des collapsologues ou des théoriciens du chaos, Bruno Marion puise aussi dans la philosophie et les spiritualités asiatiques pour nous enseigner l'art de vivre dans l'incertitude.
Bruno Marion vit-il le rêve des survivalistes ? Depuis plus de quinze ans, il est installé en Ardèche, dans un lieu reculé non loin de Privas où il a grandi. Il entretient son potager bio avec réserve d’eau, il a une éolienne dans le jardin et des panneaux photovoltaïques sur le toit. Il ne se dit pas en autarcie mais en autosuffisance et son mode de vie lui permet "d’expérimenter" de ce qu’il enseigne dans ses conférences, la résilience.
Comme les survivalistes, il cultive l’idée qu’il faut se préparer à traverser des crises. "Je pense que dans le monde dans lequel nous vivons, dans lequel l’humain a toujours vécu, on est amenés, on peut être amenés, à traverser des crises." Il n’est toutefois pas de ceux qui partent vivre dans un bunker survivaliste. Ce qui, d’un point de vue philosophique, a de quoi l’interpeller. "C’est la première fois dans l’histoire de l’humanité, note Bruno Marion, que le gens qui sont à la tête on va dire de notre système veulent fuir ou envisagent de fuir la société que globalement ils ont créée."
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Bruno Marion s’intéresse de près aux survivalistes, aux collapsologues et autres théoriciens du chaos. Ceux-ci nous enseignent qu’à partir d’un certain point, le "tipping point", ou "point de déclenchement", notre système est en déséquilibre. Bruno Marion décrit "des phénomènes d’auto-amplification". Comme un thermostat cassé qui émettrait de l’air frais quand il fait trop chaud, puis de l’air chaud quand il fait trop froid et ainsi de suite… "Parce que nous n’avons jamais été aussi nombreux sur terre, parce que nous n’avons jamais été autant connectés, parce qu’un certain nombre de phénomènes s’accélèrent, on voit des phénomènes d’auto amplification."
"Ma mission c’est de convaincre ceux qui ne sont pas encore convaincus que nous nous vivons une transition particulière." En tant que prospectiviste ou futurologue, Bruno Marion "aide les personnes, les organisations, les groupes, à vivre au mieux ce [qu’il croit] être une transition exceptionnelle dans l’histoire de l’humanité et à en faire quelque chose si possible d’un peu mieux pour ceux qui viennent après." Il donne des conférences à Paris, Pékin, Tokyo ou Los Angeles et publie des essais, dont "On ne va pas forcément tous finir avec une hache au fond de la forêt - Tout s'effondre : un manuel pour s'en sortir" (éd. Eyrolles, 2023).
Le futurologue ne se dit pas optimiste ni pessimiste, car, explique-t-il, dans les deux cas on croit prédire le futur. Lui pense qu’on ne sait pas ce qui va se passer mais que l’on a le pouvoir de changer les choses. Et que cette transition que l’on est en train de vivre peut être une bonne nouvelle "à condition de savoir quoi faire à l’échelle individuelle et collective".
Va-t-on être capables de faire un saut d’évolution philosophique, spirituelle, à l’échelle des sauts technologiques qu’on est en train de faire ?
Ingénieur de formation, Bruno Marion s’est intéressé aux spiritualités asiatiques et à la philosophie. À 36 ans, alors qu’il travaillait dans le monde de l’entreprise et qu’il n’avait pas d’enfant, il s’est demandé ce qu’il allait pouvoir transmettre. "Quel va être mon legs ?" Il y a plus de vingt ans, il avait déjà l’intuition de changements à venir. Il a donc décidé de se consacrer aux autres et d'expliquer quelle serait la crise à venir.
On le surnomme "le moine futuriste" car Bruno Marion développe, en plus d’une analyse scientifique sur le monde qui vient, une vision philosophique et spirituelle. "Va-t-on être capables de faire un saut d’évolution philosophique, spirituelle, à l’échelle des sauts technologiques qu’on est en train de faire ?" La réponse que l’on sera capable de donner est selon lui "liée au sens". "Pourquoi on est là ? À quoi ça sert ? Où on va ? Là, on est vraiment confrontés de manière excitante et violente à cette question."
Parce que l’être humain est porteur d’une "conscience", il a "une chance", nous dit Bruno Marion, et "une responsabilité". Si certains pensent qu’on a perdu le contrôle, lui croit que "nous n’avons jamais eu autant de pouvoir pour faire changer les choses… Ce que vous faites, ce que vous dites, peut avoir une influence qui va changer le monde et ça peut être positif."
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