Au fil des jours, de projection en projection, on s’installe dans la salle avec l’envie de, qui sait, découvrir la Palme d’Or. Comme une évidence. Mais parfois, on en sort déçu, dépité. Au contraire, parfois, l'évidence saute aux yeux.
Cette année, un film vient de marquer de la sorte les festivaliers. C’est « The Zone of Interest » de Jonathan Glazer, adapté du livre de Martin Amis, paru en 2014.Avec ce film, le cinéaste britannique réussit la gageure d’évoquer l’horreur de la Shoah sans jamais la montrer.
L’horreur d’Auschwitz suggérée
C’est au domicile du commandant du camp d’Auschwitz que Jonathan Glazer choisit de poser sa caméra, un domicile jouxtant le mur d’enceinte du camp. Il y filme le quotidien ordinaire de la famille Höss, un quotidien géré avec fermeté par l’épouse du commandant, un quotidien fait de repas de famille, de disputes d’enfants, de balades à cheval, de baignades pique-nique au lac, de goutés d’anniversaire dans un jardin propret et de lecture aux enfants à l’heure du coucher. Du banal, somme toute.
Banal sauf que de l’autre côté du mur… la bande-son nous suggère l’innommable avec le bruit assourdissant du four crématoire, des cris, des aboiements, des ordres hurlés, des coups de feu. Et à travers les fenêtres de la maison, vue sur la cheminée du four, des flammes, une épaisse fumée noire. Bruits incessants et images furtives, insoutenables.
« The Zone of Interest » est un film très intelligent qui parvient à suggérer l’horreur plutôt que de la montrer, un film qui dénonce ce qu’on voudrait ne plus jamais connaître quatre-vingts ans plus tard.
« The Zone of Interest » est un film glaçant d'effroi, un film qui dérange. Un film immense. Une Palme d’Or toute trouvée.
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