En ce 8 mars, Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, nous avons reçu Julie Arcoulin, autrice de "Clouer le bec au Patriarcat". Thérapeute spécialisée dans l’emprise et les violences faites aux femmes depuis de nombreuses années, Julie Arcoulin aborde ces sujets brûlants avec un regard professionnel et engagé.
Pour débuter son livre, Julie Arcoulin a écrit une introduction destinée aux femmes, mais s'adresse également aux hommes dans une seconde partie. "J'ai hésité longtemps à m'adresser directement aux hommes", confie-t-elle.
Elle explique que les réactions à son projet de livre tournaient souvent autour de la crainte de susciter une haine des hommes. "Je suis en train d'écrire sur le patriarcat et on me dit 'attention à ne pas développer la haine des hommes'. J'ai trouvé ça... un peu magique, dans le mauvais sens du terme". Pour elle, il est crucial de semer des graines de réflexion dans l’esprit de tout le monde, y compris des hommes, pour déconstruire le patriarcat.
Interrogée sur les causes des violences faites aux femmes, Julie Arcoulin commence par replacer d’où elle parle : en tant que femme blanche, hétérosexuelle et cisgenre. Cela est important pour elle car son expérience personnelle est teintée de certains privilèges que n’ont pas toutes les femmes
"Après 14 ans d’accompagnement de femmes victimes de violences, je voulais comprendre pourquoi ces violences étaient systématiques". Elle pointe du doigt la domination masculine et les croyances associées, qui permettent et perpétuent ces violences. "Il y a une espèce de permission de violence pour les hommes", déplore-t-elle.
Si ces violences font partie d’un système, il est peut-être possible de trouver un système alternatif où ses violences n’ont pas lieu d’être. A ce sujet, Julie Arcoulin reste partagée entre idéalisme et réalisme. "Je pense qu’il faut y travailler chacun à notre niveau, en se demandant comment on participe à ce système et ce qu’on peut faire pour diminuer ce taux de violence". Pour elle, la prise de conscience collective est essentielle pour véritablement diminuer la domination masculine.
Arcoulin met en lumière les différentes formes de violence subies par les femmes : psychologique, physique, sexuelle, économique, et systémique. "L’emprise, c’est plusieurs formes de violence en même temps", dit-elle. Elle souligne aussi que les violences économiques et systémiques sont souvent sous-estimées.
Parmi les violences sexuelles on retrouve évidement la question du viol. C’est avec deux chapitres distincts que Julie Arcoulin aborde les questions de la culture du viol et du consentement. Pour elle, les deux sujets ne doivent pas nécessairement être mélangé. "Ce sont deux choses tellement opposées", explique-t-elle. Elle note qu’il y a encore beaucoup de confusion autour du consentement, même en 2024, citant des figures publiques qui propagent des idées rétrogrades.
Dans la plupart des cas, les violences faites aux femmes ont lieu dans le cercle proche. Et les violences conjugales affectent aussi les enfants. "Un climat de violence a les mêmes conséquences sur un enfant que s’il était directement violenté", affirme-t-elle. Elle critique la persistance de l’idée qu’un homme violent avec sa femme peut être un bon père.
Quant à la capacité de la justice à protéger les victimes, quelles qu’elles soient, Julie Arcoulin reste sceptique. "80% des plaintes pour violences sont classées sans suite en France. 0,6% des hommes accusés de viol sont condamnés. Donc non, on ne peut pas faire confiance à la justice".
Julie Arcoulin conclut en appelant chacun à prendre conscience de sa part de responsabilité dans la perpétuation des systèmes de domination et à travailler activement à les déconstruire. Son livre "Clouer le bec au Patriarcat" est un guide puissant pour comprendre, analyser et agir contre les violences faites aux femmes.
Des structures d’aide et d’écoute existent et sont à votre disposition. SOS Viol est joignable au 0800 98 100 et Ecoute Violences Conjugales est joignable au 0800 30 030. Ne restez pas seul(e), parlez-en.
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