On la connaît pour ses films "Trois hommes et un couffin" (1985), "La Crise" (1992) ou encore "Saint-Jacques… La Mecque" (2005). La réalisatrice Coline Serreau est aussi comédienne, metteure en scène de théâtre ou d'opéra et maître de chœur, car la musique est une autre de ses passions - celle de Bach, notamment. Membre de l'Académie des beaux-art depuis décembre 2019, elle n'a pas perdu son franc-parler. On l'a vue ainsi dénoncer les inégalités hommes-femmes et le patriarcat dans le milieu du cinéma et la société française, après les révélations de l'actrice Adèle Haenel. Et elle vient de publier son autobiographie "#colineserreau" (éd. Actes Sud).
Née en 1947, Coline Serreau a rejoint l'école de Beauvallon dans la Drôme, où elle a passé une grande partie de son enfance : un lieu où elle a fait l'apprentissage de la "liberté" et de la "responsabilité", comme elle l'écrit dans son livre. Fille du metteur en scène Jean-Marie Serreau (1915-1973), brillant homme de théâtre qui a découvert Beckett, Ionesco ou encore Aimé Césaire, et de l'écrivaine Geneviève Serreau (1915-1981), deux personnalités "très engagées sur le plan littéraire".
De son père, elle dit que c'était un homme "d'un courage incroyable pendant la guerre et la résistance... mais nous, sa femme et ses enfants, il nous a traités comme des moins que rien". "Une attitude patriarcle qui était nulle", dénonce-t-elle, et en même temps ce "grand homme de théâtre", elle l'a accompagné dans l'épreuve de la maladie de Charcot. "Moi je ne pense pas que ma vie a été plus dure qu'une autre, je ne suis pas dans la plainte, jamais... Peut-être que ces épreuves-là m'ont renforcée." Ce qui importe, c'est la façon dont on peut "se relire"... et rire.
Malgré une histoire familiale difficile, certains films de Coline Serreau sont pleins d'humour. "L'humour, le vrai grand humour, comme celui de Molère ou de Chaplin, ne peut venir que du désespoir."
Si "la rigolade superficielle" conduit aux "one man show sans intéret", c'est à partir de "cette conscience de qui on est dans le monde, c'est-à-dire rien" que l'on peut rigoler. "Trois hommes et un couffin" raconte tout de même l'histoire d'un abandon ! "L'humour c'est aussi la résilience, c'est survivre."
"Trois hommes et un couffin" justement, l'un des plus connus des films de Coline Serreau, est "une remise en question totale de la paternité et du patriarcat en général". D'ailleurs, la réalisatrice confie "travailler avec acharnement à bousiller le patriarcat".
Mais Coline Serreau n'est pas "féministe" - ça "l'énerve" même qu'on le lui dise - un mot prononcé trop souvent avec "condescendance" dans une société "dominée par le patriarcat". Patriarcat qu'elle définit comme "un système" où les valeurs qui dominent sont : "coopération contre compétition, empathie contre guerre, donner la vie plutôt que l'enlever..." Il en va également du "respect de la terre : la terre c'est l'utérus, c'est le symbole même de la femme".
Depuis le mouvement Me Too, les choses sont en train d'évoluer. "C'est un mouvement qui est inéluctable, qui avance de plus en plus vite... et qui ne s'arrêtera pas comme ça !" Visionnaire, Coline Serreau ? Son film "La Belle verte", considéré comme un échec à sa sortie en 1996, une critique de la société de consommation doublée d'une prise de conscience écologique très forte, le tout mené avec humour, trouve aujourd'hui une seconde vie sur internet...
Émission d'archive diffusée en février 2020
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